Depuis que les socialistes nigériens sont arrivés au pouvoir en 2011, l’on a assisté par le phénomène connu désormais sous l’appellation peu glorieuse de “concassage”, à tant d’agitations dans les partis politiques. Le Pnds qui se sait peu populaire ne pouvait qu’user d’un tel moyen pour se maintenir et consommer un pouvoir mal acquis. Comme gérant, il a accumulé des biens, spoliant l’Etat et le peuple. On n’a jamais connu cela auparavant dans le pays. Pour se maintenir au pouvoir, conscients de l’illégitimité de son pouvoir, les socialistes avaient compris qu’il leur fallait jouer à déstructurer les partis politiques, à provoquer la chienlit dans le champ politique, pour pouvoir survivre dans le désordre politique. C’est ainsi que le Pnds avait traversé tous les partis politiques, se servant de personnalités corruptibles, sans conviction, et qui, s’ils n’avaient été tentés par des fibres subjectives, avaient été «convaincus» et poussés à rallier le camp du pouvoir à coups de frics ou de confort dans le système avec notamment la promesse de postes juteux. Depuis, aucune valeur ne sous-tend la politique au Niger et la qualité de notre démocratie s’en est ressentie. Naturellement, face à toutes les rebellions qui ont été provoquées dans les partis, les acteurs ont cru que la justice pouvait les aider à ramener la normalité en déboutant des hommes mus par la malveillance et qui veulent se servir de leur turpitude pour mettre à mal une démocratie balbutiante qui avait pourtant besoin du sérieux des acteurs, de leur intégrité et de leur probité pour émerger et prouver à la face du monde que l’Afrique – le Noir, peut-on dire – est aussi capable de démocratie et de vraie démocratie.
Dans sa stratégie, pour survivre au milieu de grands partis politiques, le Pnds visait dans cette déstabilisation, les plus grands partis en se servant de la vulnérabilité des personnages les plus vénaux qu’il était possible d’embarquer avec la première promesse alléchante. C’est ainsi que beaucoup de personnalités, souvent de grande envergure, avaient succombé aux largesses calculées des camarades. La CDS-Rahama de Mamane Ousmane était le premier à passer dans la sauce de la Renaissance comme premier arôme. Après une suite de procès, sans doute lassé par des arrêtes contradictoires qui ne peuvent avoir le courage de donner à la partie qui détient la légitimité du parti la responsabilité de sa gestion, et sans doute aussi ayant compris le jeu dans lequel le pouvoir qui avait quelques comptes à lui régler voulait le pousser, Mamane Ousmane a dû se résoudre à abandonner le combat pour laisser le parti aux mains d’un homme qui s’était laissé embarquer dans un autre jeu où il perdra jusqu’à son honneur, et même le parti pour lequel il s’était âprement battu contre Ousmane pour en être lui-même chassé à la suite de ses déboires judiciaires, ruminant depuis des mois des douleurs et des regrets, et devenant par la suite la risée d’une classe politique devenue moqueuse à son égard.
Vient ensuite le tour du Mnsd qui avait donné naissance auparavant au parti de Hama Amadou, au parti de Tahirou Guimba, avant que tous, se rendant finalement compte de la naïveté et de l’immaturité politique dont ils avaient montre pour se laisser manipuler, ne comprennent leur erreur fatale, celle qu’ils n’auraient jamais dû commettre. Ils en paient le prix aujourd’hui. Du reste, c’est au dernier congrès d’investiture du nouveau secrétaire général du parti de Tandja Mamadou que Tahirou Guimba, regardant ce que représentent le parti d’Albadé, celui de Seïni Oumarou, celui de Hama Amadou, celui de Omar Hamidou dit Ladan Tchana, et son propre parti, s’est rendu compte du grand mal qui leur a été causé, du grand mal qui a été causé au Niger et à sa démocratie, car détruire le Mnsd c’était détruire le Niger en miniature, vu dans toute sa splendeur et toute sa splendeur. On sait comment le Pnds réussit à fracasser ce qui restait du Mnsd, avec un autre grand parti qui nait de son flanc, le MPR-Jamhuriya, lui-même d’Albadé Abouba.
Alors que ceux qui partaient, rêvant du meilleur, aujourd’hui prennent conscience qu’ils pouvaient avoir eu tort d’avoir fait le choix d’un homme et de son système au lieu du choix du pays, on peut croire à quel point aujourd’hui, certains, même s’ils ne peuvent avoir le courage de l’avouer, vivent l’amertume de leur choix immature.
Mais le Pnds, même en réussissant à semer le désordre dans presque tous les partis politiques, ne put s’arrêter en si bon chemin et continue la sale besogne, revenant à déstabiliser les partis qu’il créait en se servant du même mode opératoire, notamment de rebelles manipulés. On avait ainsi connu l’épisode de Kiishin Kassa, celui de Amen-Amin, de Jamhuriya, et depuis des jours, c’est le Mnsd et le Moden/ Fa Lumana qui sont dans le viseur du système. Si, pour le Mnsd c’est Abdoulkadri Tidjani qui joue à Seïni Oumarou les trouble-fêtes, au Moden/Fa Lumana, c’est un personnage tout aussi terne qui joue à saboter le parti sans qu’il ne sache ce qu’il peut en faire, juste pour le besoin du mal qu’il porte désormais au parti et à son président.
Ce qu’il y a de commun dans ces deux cas qui font réfléchir beaucoup de nigériens, et qu’on ne voit dans chacun qu’un individu qui se bat contre une structure organisée, montrant que l’individu, tant qu’il pouvait soutenir ou promettre de soutenir le système, pouvait être curieusement plus fort que la structure. Pourtant il y a des cas qui font jurisprudence. En effet, qui ne se souvient pas que lorsque le Pnds avait eu besoin de chasser Ibrahim Yacoubou de ses rangs, il lui avait juste suffi d’une déclaration publique pour que l’acte soit consommé sans que des juges n’aient à s’en mêler. Pourquoi pour d’autres cas, lorsque l’individu n’est plus en phase avec le groupe et avec le parti, un autre, fut-il un juge, peutil vouloir lui donner la place que le groupe lui refuse ?
Comment, un homme qui n’a aucune structure du parti avec lui, peut-il être plus fort que la structure ? Le juge qui tente de donner raison à un électron libre, rend-il franchement service à la démocratie qui est par essence la loi du plus fort ? Or, en parlant du cas du Moden/Fa Lumana, tout le monde sait, y compris le Pnds de Issoufou Mahamadou, pardon de Bazoum Mohamed, qu’il est loin, très loin de prétendre porter le parti. Comment d’ailleurs une banale histoire d’intérim, peut-elle pousser un parti à des turbulences qui n’ont pas lieu d’être ? C’est pourtant à un tel individu qu’une certaine justice tente de faire ce plaisir. Cette justice, peut-elle vouloir, elle aussi, de la déstabilisation du parti de Hama Amadou ? La question mérite d’être posée. C’est le même scénario qui se dessinait au Mnsd Nassara avec d’abord à travers une attestation d’ordonnance rendue par le Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Niamey qui «[ordonnait] au Mnsd Nassara de suspendre la tenue du congrès extraordinaire d’investiture du Secrétaire Général du parti prévu le 15 août 2020 à Niamey, jusqu’à l’intervention d’une décision judiciaire définitive au fond sur l’action introduite par le requérant contre la décision de rejet de sa candidature par la commission des candidatures et de vérification des mandats». Le document qui donnait des ailes à l’exsecrétaire général du parti avait alors fait le tour du monde par les réseaux sociaux qui l’ont largement diffusé. Alors qu’Abdoulkadri Tidjani, était heureux de sa victoire, réussissant par cette ordonnance à empêcher la tenue du congrès extraordinaire, le Mnsd avait surpris en attaquant à la Cour d’Appel cette décision. La joie du sieur Tidjani avec tous ceux qui le soutenaient dans sa cabale fut courte. Le samedi, matin, les militants avaient alors convergé vers le palais des sports où devraient se tenir le congrès extraordinaire. Le Mnsd Nassara avait sans doute réussi le tour de vis qui lui permit de desserrer l’étau et de se libérer de ce qui ressemble bien à un nouvel complot contre le Mnsd. Est-ce seulement la preuve de l’indépendance de la justice ? Tout le monde, regarde, médusé. L’aubaine pour le parti de Seïni Oumarou est d’autant plus surprenante que beaucoup d’analystes se demandent comment le Mnsd a-t-il réussi cet exploit ? Faut-il dès lors croire que ce feuilleton de l’ex-secrétaire général du parti est désormais derrière le parti ? Pourquoi, lorsque pour le Moden/Fa Lumana il n’est question que d’un précaire statut d’intérimaire, peut-on continuer à imposer ces situations au parti, sachant que l’homme ne peut se prévaloir d’aucune force dans le parti pour vouloir le reprendre, l’arracher car jusqu’ici, il n’a pas été capable de montrer qu’il a le soutien même d’une coordination départementale, a fortiori d’une structure régionale du parti. Pourquoi la justice, peut-elle soutenir des rebelles dans les partis politiques si ce n’est pour entretenir le désordre dans notre démocratie, peut-être même dans le pays ?
Comment le Mnsd a-t-il réussi là où tous les partis politiques ont échoué ? De quel moyen peut-il disposer ? Faut-il croire comme le pense un confrère qu’il aura usé de chantage pour réussir à tenir son congrès ? Ceux qui veulent disputer la paternité des partis politiques, s’ils peuvent se prévaloir de quelques forces, n’ont qu’à créer leurs partis politiques. Dans ce sens, on peut comprendre l’arrêt qui a permis au Mnsd de tenir son congrès sans être inquiété et contrarié. Mais, cela ne devrait pas se faire qu’à la tête du client : la justice doit être la même pour tous. Mais, bien d’observateurs se demandent si le nouvel arrêt grandit le Mnsd ?
L’on sait que le Mnsd avait voulu régler ce problème à l’amiable et il avait de bonnes raisons de redouter le pire pour vouloir une solution concertée, mieux négociée entre acteurs pour éviter au parti des déchirements inutiles. Mais visiblement la crise était beaucoup plus profonde qu’on ne le pensait, les deux parties étant irréconciliables. En continuant sa route tout en laissant sur ses bords Abdoulkadri Tidjani et consorts, le Mnsd peut savoir qu’il perd des plumes. Si l’ex-secrétaire général ne peut avoir de tentacules dans les autres régions, au moins à Maradi, peut-on savoir qu’il a son petit monde que le Mnsd pourrait ne pas vouloir perdre à l’approche des échéances.
Mais il n’avait pas d’autres choix : on ne peut faire des omelettes sans casser des oeufs, dit-on. Tant pis.
Gobandy
25 août 2020
Source : Le Canard en Furie