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Depuis l’annonce des résultats de l’élection présidentielle du 27 décembre dernier, qui ont consacré l’échec du « coup K.O » chanté par les partisans du candidat du principal parti au pouvoir, les tractations vont bon train pour le second tour prévu le 21 février prochain. Malgré les colossaux moyens mobilisés et des pratiques somme toute honteuses utilisées pour le faire passer dès le premier tour, le candidat Bazoum Mohamed est bien obligé d’affronter l’ancien président de la République Mahamane Ousmane.

Et c’est là que tout devient difficile pour sa formation politique, le Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDSTARAYYA), animé par une volonté féroce de garder le pouvoir. La situation est d’autant plus compliquée pour Bazoum et son parti qu’il leur faut négocier des partis capables de leur garantir une victoire. Il se trouve que les seuls partis qui leur sont restés fidèles, en refusant de présenter des candidats à l’élection présidentielle, sont loin de relever un tel défi. On rappelle que ce sont tous ces partis réunis avec le PNDS-TARAYYA qui ont permis au candidat Bazoum Mohamed d’obtenir ses 39,33 du premier tour. Conscient de cette évidence et sentant le danger venir, le parti présidentiel est donc obligé de pâturer au-delà de son entourage. Ainsi, il mène une offensive en direction des partis avec lesquels ses relations sont plus ou moins au point mort. Il s’agit des partis avec lesquels le PNDS-TARAYYA avait lié des alliances par le passé, mais envers qui il a eu des attitudes inamicales à l’épreuve de l’exercice du pouvoir.

C’est le cas notamment du Mouvement patriotique nigérien (MPN KIISHIN KASSA) de l’ancien ministre des affaires étrangères Ibrahim Yacoubou, de l’Alliance des mouvements pour l’émergence du Niger (AMEN-AMIN) de l’ancien ministre des transports Omar Hamidou Tchiana, du Mouvement patriotique pour la République (MPR JAMAHORIYA) de l’ancien ministre de l’agriculture et de l’élevage Albadé Abouba et du Mouvement national pour la société de développement (MNSDNASSARA) de l’ancien Haut-Représentant de la République Seini Oumarou. Malgré leur ferme soutien au PNDS-TARAYYA et au Président de la République, ces partis ont connu des crises qui, si elles n’ont pas été directement créées par le pouvoir, ont bénéficié d’un soutien manifeste de celui- ci. C’est ainsi que presque tous ceux qui ont entretenu les crises au sein de ces différents partis politiques s’étaient retrouvés à la Présidence de la République avec des titres de conseillers avec rang de ministre ou au niveau d’autres institutions. Les leaders des partis ont été présentés comme des moins que rien, à travers des écrits des militants bien connus du PNDS-TARAYYA sur les réseaux sociaux et même des déclarations comme celle publiée par les partis soutenant la candidature de Bazoum Mohamed, du plus fort du débat sur la nationalité nigérienne d’origine de ce dernier. Ibrahim Yacoubou et Omar Hamidou Tchiana ont particulièrement été victimes de cette forme de lynchage quand ils ont annoncé avoir démissionné d’eux-mêmes du gouvernement. Ils ont été traités comme des vulgaires menteurs. Pour avoir décidé de présenter leurs candidatures à l’élection présidentielle, à un moment où le PNDS-TARAYYA fantasmait un soutien à son candidat dès le premier tour, Albadé Abouba et Seini Oumarou ont été présentés comme des gens non reconnaissants vis-à-vis d’un régime qui les a nourris. Jusqu’à l’annonce des résultats du premier tour de la présidentielle, le parti de Bazoum Mohamed avait une attitude de mépris vis-à-vis de tous ces partis qu’il est aujourd’hui contraint de courtiser et renégocier en vue de se maintenir au pouvoir et s’imposer comme le seul et unique parti politique au Niger. Si, pour des calculs alimentaires, ces mêmes partis aident le PNDS-TARAYYA à se maintenir au pouvoir, ils seront ses premières victimes dès les premiers mois de son pouvoir. Un parti comme le MPN KIISHIN KASSA pense-t-il que le parti de Bazoum Mohamed va lui pardonner cet «affront» de le battre dans toutes les communes du département de Dogondoutchi qui est un de ses réservoirs électoraux ? Le MPR JAMAHORIYA croit-il que le PNDS-TARAYYA va le laisser continuer à émerger dans son fief de Tahoua ? Le MNSD-NASSARA, qui a déjà perdu ses fiefs de Niamey et Tillabéry, pense-t-il que le parti de Bazoum Mohamed va lui permettre de reprendre son naguère fief de Maradi qui commence aussi à lui échapper, au vu des résultats des dernières élections communales, régionales et législatives, ainsi que du premier tour de la présidentielle ? Aujourd’hui qu’ils sont en position de faiblesse, les responsables du PNDS-TARAYYA sont prêts à toutes les concessions, y compris à s’agenouiller, pour convaincre les partis qu’ils négocient. Mais une fois au pouvoir après le second tour de la présidentielle, ils retomberont dans les mêmes attitudes de mépris, d’arrogance et de déstabilisation qu’ils ont eues avec tous les partis qui se sont alliés à eux pendant les dix ans de leur gouvernance. Il appartient donc aux partis qu’ils courtisent d’avoir un esprit critique et visionnaire pour ne pas se limiter à quelques privilèges matériels qu’on leur miroite aujourd’hui et qu’on peut leur reprendre à tout moment, une fois le pouvoir acquis. Comme l’enseigne la sagesse, si l’oreille a entendu, le reste du corps est sauvé.

Hamidou Bello