Crise sécuritaire, crise du système éducatif, crise sanitaire sur fond de persistance de la pandémie de COVID-19, problème d’emploi des jeunes, cohésion nationale ébranlée, lutte contre la corruption, etc. Autant dire que les défis qui attendent le Président de la République, M. Mohamed Bazoum, et l’équipe gouvernementale qu’il vient de mettre en place,  sont tout aussi multiples que brûlants.

Ayant pris fonction dans un contexte sécuritaire particulièrement délétère marqué par les récentes attaques sanglantes de Tillia et de Banibangou, qui continuent encore d’agacer l’émotion des Nigériens, avec près de 300 civils innocents tombés sous les balles assassines des groupes terroristes en l’espace de près d’une semaine, le Président de la République et son gouvernement se retrouvent de fait en face à un défi primordial qui est celui de la sécurité. Il est vrai que le dispositif mis en place par les autorités précédentes avec la dotation en moyens matériels adéquats et un déploiement massif des forces de défense et de sécurité a commencé à apporter ces fruits. Dans la zone des trois frontières Niger-Burkina-Mali, la situation est quasiment passée sous le contrôle de la Force du G.5 Sahel, à  travers l’opération Takuba.

Urgence sécuritaire…

Mais la nouvelle donne, et c’est proprement préoccupant, c’est celle nouvelle tactique des groupes terroristes. En effet, ces derniers qui n'ont jusqu'ici pris pour cible que les services de sécurité et les symboles de l'Etat, semblent décidés à ne plus épargner la population, comme en témoignent les massacres perpétrés dans les zones de Tillia et de Banibangou.

Sur cette question, les nouvelles autorités gouvernementales doivent agir vite et avec tact pour donner un signal afin de calmer les esprits des populations traumatisées par ces attaques qui dénotent d’une certaine barbarie. A ce propos, ces riches expériences d’ancien ministre en charge de l'Intérieur et de la Sécurité Publique lui seront d’un grand atout. Car, en plus du carnet d’adresses dont il  dispose en la matière, il fut également un des architectes de la stratégie sécuritaire du Niger basée sur la coopération régionale à travers le G5 Sahel, et internationale avec l’apport des forces.

Mieux, dans son programme de gouvernance, le nouveau Président de la République a anticipé sur la question en misant sur un maillage plus dense et harmonieux des Forces de Défense et de Sécurité (FDS), afin d’assurer une délivrance optimale des services de sécurité. « J’engagerai les actions qu’il faut pour mettre rapidement fin aux souffrances des populations dont la vie est empoisonnée par les rapts, les paiements des rançons, les paiements de l’impôt aux groupes terroristes, les extorsions, les enlèvements d’animaux et les crimes systématiques », a-t-il promis dans le discours-programme qu’il a prononcé lors de son investiture.

Autre défi majeur : redonner à l’école nigérienne ses lettres de noblesse. L’enjeu est de taille, car depuis de longues décennies qu’elle est tombée en panne sous le poids des innombrables difficultés qui l’assaillent, l’école nigérienne a besoin, pour se relever, de soins intensifs. S’il est vrai que des efforts considérables ont été faits par le gouvernement précédent notamment en matière de mise en place d’infrastructures et de formation des formateurs, il  n’en est pas moins vrai que le système éducatif tel qu’il se présente constitue en lui-même source de difficultés. C’est justement sur ce volet que les acteurs et les partenaires de l’école attendent des réponses appropriées de la part du Président de la République.

Redonner à l’école nigérienne ses lettres de noblesse…

Le Président Bazoum Mohamed l’a bien compris. C’est ainsi que, aussi bien dans son programme de gouvernance que dans son discours programme de l’investiture, il a mis un point d’honneur à énoncer les actions d’urgence qui compte menées dans le secteur de l’éducation. L’angle d’attaque privilégiée à travers son programme de gouvernance porte sur une reforme curriculaire complète qui prendrait en charge l’efficacité et l’efficience du système éducatif. C’est dans cette droite ligne que le Président de la République Bazoum Mohamed a réaffirmé dans son discours d’investiture qu’il entend apporter plusieurs réformes dans le système éducatif nigérien dont la construction des internats pour les élèves filles au niveau des collèges de proximité des villages environnants.

Restaurer la cohésion sociale…

Le Président Mohamed Bazoum est également fortement attendu sur le défi de la réconciliation des Nigériens avec eux-mêmes. En effet, au terme d’un cycle électoral mouvementé, l’atmosphère politique malsaine a eu pour effet d’émietter gravement la cohésion sociale au Niger. Le Chef de l’Etat a une claire conscience de cet état de fait. Aussi, s’est-il dit disposé à entretenir avec les leaders de l’opposition « le dialogue constructif qu’il faut pour favoriser un climat politique apaisé, propice aux intérêts de notre pays ». Car, a-t-il poursuivi, « le Niger attend de nous que nous nous mettions tous au travail, chacun à son niveau, dans la cohésion, l’harmonie et la conviction que notre avenir dépend de nos engagements patriotes et de notre souci du bien commun (…).  Je serai un Président de République au service de la paix, du progrès et du bonheur du peuple nigérien ». 

Toujours est-il que, face aux défis sécuritaires qui assaillent notre pays, nous avons tous intérêt à accorder nos violons pour réfléchir et agir ensemble afin de dresser une barrière infranchissable aux forces du mal dont la seule ambition est de semer la terreur et le désarroi au sein de notre population.

Les questions de bonne gouvernance, avec en toile de fond la dépolitisation de l’administration et la lutte contre la corruption, constituent également un défi aux enjeux multiples. Sur ces questions, le Président Bazoum a donné une réponse tranchante et retentissante dans son discours d’investiture.  « Je voudrais dire clairement ici que quiconque a une responsabilité dans l'administration publique répondra désormais tout seul et entièrement de ses actes. Son parti politique, sa "base", sa famille, sa communauté ne lui seront d'aucun secours au cas où son comportement devrait commander une mesure coercitive à son encontre. Pour cela, j'exigerai de tous les responsables aux différents échelons de l'administration que les cadres soient promus sur la base de leur compétence technique et de leur moralité », a-t-il prévenu.

Le Président de la République et le gouvernement doivent enfin forcer la confiance de la jeunesse nigérienne qui endure les difficultés liées au problème de l’emploi. Cette frange de la population, qui constitue une majorité écrasante, attend tout naturellement du nouveau Président qu’il lui assure une formation adéquate et surtout des emplois pour être à l’abri de la précarité.

Pour apporter des réponses urgentes et efficaces à tous ces dossiers cuisants du moment, le nouveau Président de la République et l’équipe gouvernementale doivent faire preuve de diligence pour donner les orientations à suivre et mobiliser les moyens et les hommes rompus à l’œuvre en vue de l’édification d’une Nation nigérienne toujours plus forte pour relever les défis.

Par  Assane Soumana


09 avril 2021
Source : http://www.lesahel.org/