S’il y a encore des Nigériens qui doutent sur le fait qu’il existe ou pas de prisonniers politiques au Niger, il faudrait très vite qu’ils se ravisent ; car, toutes les personnes arrêtées en dernier lieu suite aux événements consécutifs aux dernières élections présidentielles ne sont rien d’autres que des prisonniers politiques en bonne et due formes. En principe la politique est terminée ; il faut donc le libérer. En effet, quelques soient les griefs retenus contre des personnalités comme Hama Amadou, Moumouni Boureima dit Tchanga, Abdou Maman Lokoko, Seydou Tahirou Mayaki et les autres, il faut reconnaître que les nigériens dans leur grande majorité ont fini de comprendre que ces gens ont été mis aux verrous juste pour que le plan électoral qui a porté Bazoum au pouvoir puisse se dérouler sans grands ambages. Ceci dit, à présent que cette mascarade a été consommée, malgré les récentes sorties presque désespérées de l’opposition politique, ces personnalités ne doivent plus continuer à croupir en prison. Pour la plupart, les griefs qui leur sont reprochés ont trait à l’incitation aux troubles et à la haine ethnique. Néanmoins, à bien y regarder, tous les partis politiques en compétition ont eu à user de ces deux créneaux. Le président Bazoum lui-même avait clamé haut et fort lors d’un meeting à Tahoua qu’après la proclamation des résultats, qu’il attend de voir celui qui oserait les contester ; et, qu’il mettrait systématiquement au verrou toute personne qui agirait dans ce sens Comprenez qu’avant même de connaitre les résultats, ces propos tenus ne sont rien d’autres que des menaces, une sorte d’intimidation ou même d’incitation à la violence. Comme pour dire à ses propres militants de se tenir prêts pour sévir contre les contestataires. L’autre argument, ethnique ou ethnocentriste n’est rien d’autre qu’une tradition dont se servent pratiquement tous les politiciens au monde. Allez le vérifier aux Etats-Unis, dans la plus grande démocratie au monde ; le candidat a toujours raflé le plus de scrutin dans sa région natale. Qui plus est ici au Niger où l’électorat des partis politiques s’aligne carrément sur la région d’origine du candidat.
Somme toute, il faudrait que les uns et les autres se ravisent. Les propos tenus par les personnalités incriminées relèvent de joutes électorales ; le combat était serré et l’émotion laissait libre cours à tous les excès, surtout langagiers. Certes, certains propos étaient un peu osés ; cependant, voyons ce que les autres d’en face ont dit ; examinons dans leurs contours les propos tenus par les autres candidats, notamment le président Bazoum lui-même. S’il vous plait, il faut qu’on arrête de se moquer du commun des mortels. Le nigérien n’est plus ce dupe d’avant les années 1990 qu’on embarque avec toutes sortes de subterfuges. On a compris ; les uns et les autres ont concocté et fait aboutir un processus entaché de faussetés, le tout cautionné et accompagné par les occidentaux, avec les sbires de la Françafrique en tête. Les prisonniers politiques doivent être libérés sans délais pour qu’ils retrouvent leurs familles et leurs camarades d’infortune.
Un autre argument qui plaide en faveur de la libération des prisonniers politiques, c’est le nouvel état d’esprit plein d’espoir que le président Bazoum cherche à imprimer à sa gouvernance. Certes, il est le représentant du Pnds-Tarayya ; il fait donc partie de l’armada socialisante qui est en train de dérouler un plan de gouvernance quasiment sous-régional avec l’aide des sbires socialistes français et des autres pays occidentaux. On pourrait donc dire qu’il ne ferait que s’aligner sur les actes posés pendant dix années par son Mentor Issoufou Mahamadou. Cependant, il y a lieu d’accorder un temps soit peu le bénéfice du doute à cet homme désinvolte qui a commencé à poser des actes surprenants à profusion. Même si l’on pense qu’il s’agit juste d’un démarrage forcé pour s’attirer la sympathie des nigériens qui ne veulent absolument pas de lui, il faut reconnaitre que certains des actes posés par le nouveau Président démontrent une volonté réelle de ne pas se laisser manipuler à volonté par son mentor et les caciques inutiles du parti. Rupture, il y a véritablement rupture entre le mentor et son dauphin. Les signes les plus tangibles se retrouvent dans ses tous premiers choix politiques, notamment celui des hommes autour de lui. On a certes réussi à lui imposer quelques personnalités. Cependant, le président Bazoum Mohamed est resté ferme quant à la taille de l’équipe gouvernementale.
De plus, la suppression de certains postes tautologiques, inutiles et budgétivores a été saluée haut la main par tous les nigériens meurtris par la politique de partage et de gabegie instaurée par l’ex président pendant dix années. Faites un peu le calcul de l’argent dilapidé dans la prise en charge des directeurs et chefs de cabinet des ministres, des conseillers techniques à la présidence, à la primature, à l’Assemblée nationale et dans certains projets stratégiques. Il y a aussi cette vague nouvelle de conseillers et d’attachés dans les préfectures, les communes, les gouvernorats et autres. Si réellement le nouveau président tient cette ligne fermement, il va s’attirer la sympathie de plusieurs nigériens ; il aurait rappelé aux nigériens la période du regretté Seyni Kountché qui n’a jamais cautionné la gabegie dans la gestion des affaires de l’Etat.
Pour cet élan que nous dirons salvateur, le président Bazoum doit se faire violence et libérer les prisonniers politiques. De cette façon, il aurait montré à la face du monde qu’il a véritablement besoin de composer avec tous les nigériens en tournant la page des joutes électorales. Car, pour réellement dépolitiser l’administration, pour panser les plaies des déchirures qui ont porté un coup dur à la cohésion et à l’unité nationale, il doit faire le premier pas en libérant non seulement les prisonniers, mais aussi en piochant parmi eux des compétences réelles pour les mettre au service du pays. Ce serait une première et cet acte pourrait servir hautement et durablement le pays qui est en proie à des assauts intempestifs des terroristes.
Car, la division, le manque de cohésion, l’ethnocentrisme et l’exclusion politique sont des trappes ouvertes pour l’expansion du terrorisme. La meilleure arme pour lutter contre le terrorisme est une adhésion totale de la population à la gouvernance en place ; on aurait ainsi fermé les portes à la délation, à la trahison, à la lâcheté, des tares dont profitent les terroristes pour s’infiltrer dans la société et sévir par conséquence.
D’ores et déjà, le plus vieux des conseillers à la Présidence, en l’occurrence Sanoussi Tambari Jackou a déjà pensé à cette option qu’il a proposée à Issoufou avant de quitter le pouvoir. Lettre morte ; influence malsaine des brebis galeuses qui ont ligoté la volonté de l’ex président dix années durant. Résurgence aussi des tares comme l’intolérance et la rancoeur. Le Président Bazoum doit tenir compte de cette option et agir très vite, avant qu’on ne réussisse à lui imposer des conseillers occultes et rancuniers qui vont le détourner de cette vision. Dans tous les cas, l’opposition politique est encore là et elle continue à contester la victoire de Mohamed Bazoum à la Présidence de la République. De ce côté aussi, il a besoin de calmer les ardeurs des uns et des autres pour les dissuader d’abandonner leur ligne afin de saisir sa main tendue. A bon entendeur salut.
Mallam