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Des rumeurs essentiellement liées au peu de confiance qu’aurait Bazoum Mohamed en la sécurité présidentielle. Dirigée depuis une décennie par un officier passé depuis lors général, la Garde présidentielle s’est muée en une sorte d’armée d’élite super-équipée en armements sophistiqués, hors de portée des casernes militaires. Des casernes militaires démantelées et éloignées de Niamey, la capitale. Au milieu, donc, de la mêlée, se trouve une garde présidentielle que l’on dit prétorienne sous les ordres du général Tchiani, un valeureux militaire totalement acquis à l’ancien président, Issoufou Mahamadou à qui il est resté loyal jusqu’au bout. Selon des sources généralement crédibles, entre les deux hommes, il y aurait une histoire de serment régulièrement renouvelé. Quoi qu’il en soit, Tchiani a veillé, 10 ans durant, sur la sécurité d’Issoufou avec la ferveur d’un soldat dévoué. Chacune des sorties de l’ancien président, lors de ses voyages comme dans ses déplacements en ville, sont des occasions de démonstration de force de la garde présidentielle.

L’ostracisme aveugle d’une garde présidentielle à fleurs de peau

Ayant cédé son fauteuil présidentiel à Bazoum Mohamed depuis les 2 avril 2021, Issoufou Mahamadou n’en reste pas moins présent. D’une présence suffocante pour son remplaçant que l’on dit très préoccupé par le poids, immense, de son prédécesseur sur le système de gouvernance. Entre autres préoccupations, les informations qui circulent dans les salons feutrés de Niamey tiennent en bonne place la sécurité du nouveau chef de l’Etat. Bazoum, selon ce qui se raconte, ne se sentirait pas en sécurité avec le dispositif sécuritaire qui a prévalu depuis 10 ans. Lors de ses premières sorties à l’extérieur du Niger, les Nigériens ont été surpris de ne pas constater et subir le traditionnel jalonnement d’hommes et de véhicules blindés le long du parcours qui mène de la présidence à l’aéroport Diori Hamani. Une nouvelle donne qui a plutôt plu aux Niameyens, victimes pendant 10 ans, de l’ostracisme aveugle d’une garde présidentielle à fleurs de peau. Lors de son voyage au Nigeria comme au Tchad ou encore au Congo, La garde présidentielle a été absente, pour ne pas dire effacée.

L’entourage proche de Bazoum verrait d’un très mauvais oeil la présence, autour de l’ancien président, d’éléments armés de la garde présidentielle

Les Nigériens semblent se réjouir de cette nouvelle façon de faire de Bazoum, ignorant que derrière ce constat, habillé d’une volonté de changement de paradigme du nouveau chef de l’Etat, se cache une réalité douloureuse. Si Bazoum n’a pas l’intention de mettre la garde présidentielle en congé, il aurait tout de même celle de prendre quelques précautions d’usage. Selon une source politique interne au Pnds, Bazoum pourrait bien se débarrasser du général Tchiani qu’il trouverait encombrant. La présence, autour de l’ancien président, d’éléments armés de la garde présidentielle est un fait que l’entourage proche de Bazoum verrait d’un très mauvais oeil. Mais, pour le moment, il ne peut que faire contre mauvaise fortune, bon coeur. En attendant que le nouveau locataire du palais présidentiel déniche l’officier en qui il placerait aussi sa confiance pour diriger et coordonner sa sécurité. Ce ne sont pas les officiers valeureux qui manquent dans l‘armée nigérienne.

L’on parle de plus en plus, dans certains cercles, de la présence d’officiers militaires d’un pays étranger non encore présent au Niger

L’enjeu, dans cette opération nécessaire pour Bazoum, est de taille. Se sentirait-il otage d’Issoufou comme cela se susurre ? Tchiani, dit-on, c’est l’homme d’Issoufou et de personne d’autre. En 10 ans, il a formaté la garde présidentielle selon les contingences du moment mais aussi en fonction des desiderata de son patron. Cependant, ce corps d’élite de l’armée nigérienne étant au service du président de la République, Bazoum ou tout autre, devrait se fier en principe à la loyauté de ses éléments. Or, l’on parle de plus en plus, dans certains cercles, de la présence d’officiers militaires d’un pays étranger non encore présent au Niger. La rumeur enfle et se propage. L’on parle de plusieurs rotations d’avions cargos étrangers qui auraient acheminé du matériel militaire lourd pour le compte de la présidence. Malgré la gravité des informations qui circulent, le gouvernement n’a encore daigné claquer la langue pour confirmer ou démentir.

Selon la rumeur, persistante, le Président Bazoum Mohamed, rapporte-t-on, n’aurait pas confiance en son armée. Sur ce point, il est dans le même sillage que son prédécesseur et mentor. À la différence que ce dernier s’est exclusivement appuyé sur l’armée nigérienne. Si ce qui se raconte se vérifie, il y a de fortes chances pour que Bazoum se débarrasse effectivement de la garde présidentielle qu’il va dissoudre. Irait-il cependant jusqu’à constituer autour de lui une nouvelle garde militaire qui jure d’avec ce qui a toujours prévalu ? L’hypothèse est peu probable, mais elle est déjà admise au sein de l’opinion nationale comme la surprise de taille de Bazoum Mohamed à la tête de l’Etat.

Déjà critiqué pour avoir tenu des propos peu valorisants sur l’armée – ce qu’il a formellement démenti – Bazoum Mohamed est aujourd’hui le commandant en chef de l’armée. Aurait-t-il un déficit à combler avec son armée qu’il ne s’y prendrait pas de cette façon pour le faire. Chef suprême des armées suivant la Constitution, il doit impérativement se réconcilier avec son armée, la mettre en confiance et s’engager, à ses côtés, sur le sentier de la guerre contre le terrorisme et le trafic de drogue. Il y a déjà trop d’armées étrangères sur le sol nigérien. Y introduire d’autres ne serait que transformer le Niger en une poudrière. Comment le chef suprême des armées nigériennes pourrait-il expliquer et justifier la présence de corps militaires étrangers autour de lui ? La probabilité, en tout état de cause, rouvrirait les vieilles blessures.

Doudou Amadou