Certaines discussions majeures devraient bientôt s’engager entre la firme d’Etat chinoise CNPC et la nouvelle équipe au pouvoir à Niamey, notamment au sujet de la construction du pipeline d’exportation du pétrole d’Agadem. La China National Petroleum Cop (CNPC) vient de nommer un nouveau patron pour sa filiale au Niger. Selon nos sources, c’est Zhou Zuo Kung, jusqu’alors responsable de la filiale soudanaise, qui suivra le développement du projet d’exportation d’Agadem vers le Bénin du groupe d’Etat chinois. Il remplace ainsi Cheng Cunzhi, arrivé en 2017 à Niamey, sui attendait impatiemment la retraite depuis de longs mois. La CNPC a décidé de prendre un spécialiste de suivi de gros projet afin de s’assurer de la bonne marche des travaux de construction du pipeline d’exportation, dont la mise en production est désormais prévue pour mars ou avril 2023, soit avec quelque quinze ou seize mois de retard du fait du Covid-19. Zhou Zuo Kung a déjà participé à plusieurs réunions avec les officiels du ministère du pétrole et de l’énergie ; dirigé depuis le 4 avril par le fils de l’ancien président Mahamadou Issoufou, Mahamane Sani Mahamadou, dit ‘’Abba’’. L’oléoduc, d’un coût total de 2,3 milliards de dollars pour 1980 kilomètres, dont 1293 sur le territoire nigérien et 687 au Bénin, permettra de transporter un plus de 90.000 b/j, à quoi il faudra ajouter les 15.000 à 20.000 b/j qui continueront à approvisionner la raffinerie de Zinder, mise en fonctionnent en 2011.

L’Etat veut monter au capital

L’un des sujets prioritaires qui devraient s’imposer dans les prochains mois entre la CNPC et Abba est la participation de l’Etat dans la société West Africa Gas Pipeline Co (Wapco) chargée de construire puis de gérer les futures infrastructures de transport du brut. Du temps de n’ancien ministre du pétrole Pierre Foumakoye Gado (2011-2021), il était question de prendre 15%, représentant quelques 35 millions de dollars (le reste étant dans les mains de la CNPC). Or le ministre des Finances n’aura probablement pas cette somme et devra envisager des emprunts. Plusieurs traders se seraient déjà fait connaître au plus haut sommet de l’Etat à Niamey afin de proposer des fonds en échange de la commercialisation des futurs barils du pays. Glencore, par exemple, a déjà l’habitude de ce genre de financement : le trader helvétique avait notamment prêté en 2014 à l’Etat tchadien 1,45 milliard de dollars afin de racheter les 25% de Chevron sur les blocs de Doba opérés par ExxonMobil. Goûtant probablement assez peu ces montages financiers, la CNPC pourrait aussi être tentée de prêter ellemême la somme à l’Etat nigérien à des taux plutôt faibles ; afin d’éviter de faire rentrer dans le jeu une firme occidentale.

Comment Bazoum gère le pétrole

En plus d’Abba et de Foumakoye Gado-nommé à la présidence du chef de l’Etat-le nouveau président élu début avril Mohamed Bazoum pourra s’appuyer en matière d’hydrocarbures sur son nouveau conseiller pétrole et mines. Ex-secrétaire général du ministère des mines jusqu’à sa retraite en 2019, Mahamadou Sougou Dikouma est un membre du bureau politique du parti au pouvoir, le Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNSD). Il connaît Bazoum depuis quarante ans, ayant été sur les bancs de l’école avec lui. Dikouma a l’immense avantage pour le président d’être originaire de la région de Diffa où sont situées les réserves pétrolières d’Agadem. Les leaders politiques de cette province ont régulièrement protesté auprès du pouvoir, faisant valoir qu’aucun des leurs n’était nommé à des postes à responsabilité dans le secteur des hydrocarbures. C’est désormais chose faite.

Source : Africa Intelligence
Edition du jeudi 10 juin 2021.