Tel est le verdict prononcé par La Chambre de Contrôle du Pôle Spécialisé en matière économique et financière de la Cour d’appelde Niamey, dans l’affaire ‘Ministère public contre Ari Mallah et autres’. C’était lors de son audience du 25 juin 2021. Après avoir délibéré conformément à la loi, La Chambre « dit n’y avoir charges suffisantes des chefs d’accusations de détournement et complicité de détournement des deniers publics à l’encontre des inculpés Ari Mallah, Saidou Bakary, Hamadou Soumana, Saley Kiari, Diouf Abdoulaye, Adam Moussa Larabou et Idrissa Koubokoye ; dit en conséquence n’y avoir lieu à suivre davantage contre les inculpés desdits chefs ». Heureux épilogue, donc, d’une affaire qui n’aurait pas lieu d’être, puisqu’à plusieurs reprises, les concernés ont été innocentés des faits qui leur étaient reprochés. Heureux épilogue d’autant plus que Saidou Bakary et ses compagnons d’infortune ont passé presque cinq (5) ans, sur la base d’une accusation de détournement et de complicité de détournement de deniers publics dont le montant s’élève à cinq (5) milliards FCFA, et qu’ils se retrouvent aujourd’hui blanchis par la justice. « Allah n’est pas obligé », comme dirait l’autre.
Cette affaire, à cause de laquelle des pères de famille ont été brutalement séparés de leurs familles, remonte à 2005. Ari Mallah était à l’époque Directeur de cabinet du Premier ministre et Saidou Bakary Coordinateur de la Cellule crises alimentaires et gestion des catastrophes (CCA/GC). A la suite d’un appel du gouvernement, les donateurs et les partenaires techniques et financiers (PTFs) ont répondu favorablement en acceptant de mettre à la disposition des populations victimes de la famine une aide de 35 000 tonnes de céréales, évaluée à cinq(5) milliards FCFA. L’opération s’est bien déroulée, si l’on se fie à l’audit commandité par les donateurs euxmêmes. Au demeurant, sur toute la ligne de cette opération, étaient présents les représentants des pays et organismes donateurs qui ont certifié son déroulement dans le strict respect des procédures. De l’avis d’appel d’offres jusqu’au au payement des fournisseurs, en passant par la réception et le placement des vivres, rien d’anormal n’a été détecté. Entre 2005 et 2016, beaucoup d’eau a coulé sous le pont. Saidou Bakary est, entre temps, élu député national, président du groupe parlementaire Lumana Africa, sous la première législature de la 7eme République (2011- 2016). Voilà que curieusement, en 2016, l’affaire de 2005 est dépoussiérée, mise sur la table, et la justice saisie. Bakary et ses compagnons d’infortune sont mis sous mandat dépôt et maintenus en prison pendant presque cinq (5) ans. Malgré les conclusions de l’audit commandité par les PTFs eux-mêmes, en 2005. Malgré l’enquête préliminaire de la gendarmerie, diligentée au début de l’affaire, qui conclut à ce que les hommes de droit appellent « une infraction impossible ». Et enfin, malgré que les services de l’Office national des produits vivriers du Niger (OPVN) aient attesté, suite à une sommation de dire adressée à eux par le Conseil des avocats des inculpés, avoir reçu, en quantité et en qualité, les 35 000 tonnes de vivres en question. Aujourd’hui, ils sont tous libres. Ils retrouvent, innocentés et le coeur léger, leurs proches. Vivement que la Cour de Cassation confirme la décision de la Chambre de Contrôle du Pôle Spécialisé en matière économique et financière de la Cour d’appel. Afin que Bakary et ses compagnons soient complètement et définitivement blanchis et qu’ils puissent tourner la page pour se reconstruire. Ceci est valable pour tous ceux qui ont été jetés en prison sous l’ère Issoufou et qui attendent, des années durant pour certains d’entre eux, Ali Tera et Seyni Ayorou entre autres, derrière les barreaux, en raison d’accusations que beaucoup pensent motivées par des raisons politiques. C’est aussi valable pour tous ceux qui sont cités dans plusieurs affaires de détournement de deniers publics, affaires qui pourrissent l’atmosphère du vivre-ensemble. Car, bien de citoyens ont le sentiment d’une justice à double vitesse, non pas forcément par la faute des magistrats, mais celle des politiques. Ces dossiers doivent être jugés par les juridictions compétentes, pour que les concernés eux-mêmes soient fixés sur leur sort, innocents ou coupables. Car, « la justice est l’honneur d’un pays », comme le dit Amadou Ousmane.C’est pourquoi, il est du devoir du président de la République, non pas d’intervenir dans les dossiers pendants devant la justice puisqu’il est tenu de respecter le sacrosaint principe de la séparation des pouvoirs consacré par la loi fondamentale, mais de garantir l’indépendance de la justice, en tant que « Garant de l’indépendance nationale, de l’unité nationale, de l’intégrité du territoire, du respect de la Constitution, des traités et accords internationaux » (Article 46 de la Constitution).
Bisso