La mendicité est un fléau qui sévit au Niger depuis des années. Ce phénomène a atteint son pic ces derniers temps au point de devenir transfrontalier. La mendicité est un des labels du Niger, un de ses produits d’exportation. C’est l’une des images que l’étranger ayant séjourné au Niger retient. Les pays de chute de ces mendiants ne restent pas les bras croisés devant ce phénomène d’invasion de leurs territoires par des gueux et des gueuses pendant que leurs citoyens s’échinent à gagner leur vie par la seule force de leur travail. Intolérable, ont-ils jugé. C’est pourquoi des pays comme l’Algérie, le Bénin et tout dernièrement le Sénégal, expulsent des milliers de mendiants nigériens. La mendicité intervient quand une personne est si impotente qu’elle ne peut pas travailler pour se prendre en charge. Ou bien quand cette personne s’est tellement déshumanisée au point de renoncer à sa dignité et son humanité pour tendre la main alors qu’elle est des fois mieux portante que ceux auprès desquels elle cherche une obole. Mais, parfois, en raison de la mauvaise foi et d’un esprit partisan, les gouvernants envisagent des mauvaises décisions pour penser venir à bout de problèmes réels. Le souci est alors de ne perturber la bonne société dont la constance est de se faire bonne conscience en face de la misère de ceux dont il a la charge. En réaction à l’expulsion d’environ mille (1000) mendiants nigériens par le Sénégal, rapatriés par deux vols, le Gouvernement nigérien a tout de suite privilégié et uniquement la thèse des réseaux de traite des personnes, à travers un communiqué publié le 31 mars 2022.
Mauvais diagnostic d’un problème réel
Dans son communiqué, le Gouvernement semble privilégier les réseaux de traite de personnes comme la seule explication à la mendicité. Aussi, il décide de poursuivre les responsables de ces réseaux mafieux et criminels de mendicité. Ils répondront ainsi devant les juridictions compétentes. « Ce phénomène de mendicité dégrade l’image du pays et la dignité humaine et hypothèque l’avenir des enfants innocents tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays », reconnait le Gouvernement dans son communiqué. Avant de d’ajouter que « le gouvernement prévoit de poursuivre les responsables de ce réseau criminel devant les juridictions compétentes, conformément aux lois et règlements en vigueur ». Après l’Algérie et le Sénégal, le Bénin s’est mis dans la danse en organisant des rafles pour ramasser les mendiants nigériens dans le but de les ramener chez eux au Niger. Les centaines de mendiants nigériens sont rapatriés. Ceux qui seraient derrière ledit trafic dont parle le Gouvernement, seraient surement en train d’être recherchés. Mais pour l’instant, des milliers de mendiants écument toutes les régions du Niger. A chaque coin de rue, à chaque stand, boutique, restaurant, des mendiants, au vu et au su de tout le monde, harcèlent les passants. Le plus choquant c’est qu’on y trouve des mineurs, filles et garçons, en guenilles, pieds nus des fois, des femmes portant un enfant au dos et tenant dans les mains un ou deux autres, tout aussi voués à l’ignoble besogne. Non content de mendier, des adultes se permettent d’utiliser des mineurs pour mendier. Alors que la place de ces jeunes et adolescents se trouve dans les écoles et les centres de formation. Tout le monde voit, personne ne dit rien et ça ne choque personne. Il a fallu l’annonce des autorités sénégalaises pour réveiller la bonne société qui a toujours fait semblant de ne pas voir. Parce que quelque part, ceux-là qui veulent se faire bonne conscience en condamnant avec véhémence la mendicité y ont une part de responsabilité. Depuis que les rapatriés du Sénégal sont rentrés, est-ce que le gouvernement ou une autre structure étatique ou privée s’est ému du cas des milliers de mendiants à l’intérieur du pays ? S’il est vrai qu’il y a des trafiquants de personnes qui s’adonnent à la traite des personnes et des mineurs en plus, il est tout aussi vrai que les rasions de la mendicité sont à rechercher ailleurs. Ces raisons sont d’ailleurs les conditions qui jettent ces mineurs dans les bras de ces ignobles personnes. Donc la traite de pauvres personnes n’est qu’un symptôme. Et on ne baisse pas la fièvre en cassant la température, comme on dit. Il ne suffit pas de se limiter, par complaisance pour soi-même, à un traitement symptomatique. Pour enrayer le fléau de la mendicité, la seule répression, y compris de ceux qui s’adonnent à la traite des personnes, ne suffit. Il faut commencer par éradiquer les agents causaux qui sont la pauvreté, la mauvaise gouvernance, la mauvaise répartition des richesses nationales, l’ignorance qui conduisent au dénuement. Quand la pauvreté frappe à la porte, elle fait loi et conduit à certains comportements, surtout si elle est adossée à l’ignorance et l’analphabétisme. Par la mauvaise gouvernance de ces deux dernières décennies, il y a une fracture sociale sans précédent entre les citoyens nigériens. Une caste constituée d’une petite minorité de personnes s’est accaparée des ressources nationales par des voies illicites, pendant que la majorité écrasante végète dans la misère. L’école, le lieu d’apprentissage des valeurs de dignité, de fierté, de patriotisme et d’amour du travail est à terre. De sorte que les enfants, au lieu d’être à l’école et les ateliers se retrouvent dans la rue, victimes de toutes les tentations : la drogue, la prostitution, la pédophilie, l’exploitation par les adultes. Le désengagement de l’Etat et des parents dans l’éducation des enfants est tout aussi condamnable que la traite de ces mineurs par des individus criminels et vicieux. Les sociologues peuvent beaucoup aider à analyser ce fléau et en proposer des solutions. Car le rôle de l’intellectuel n’est pas de courir derrière des décrets ou des avantages, mais bien au contraire de se pencher sur les problèmes sociétaux et dégager des pistes pour les résorber.
L’élite politique donne le mauvais exemple
Le poisson pourrit par la tête, diton. Ce dicton se vérifie plus souvent qu’on le pense. Il est vrai que la mendicité au Niger n’est pas un phénomène récent. Mais les proportions qu’elle a prises ces dernières années sont inquiétantes. Et certains nigériens n’ont pas attendu l’expulsion des mendiants nigériens du territoire sénégalais pour tirer la sonnette d’alarme. Ce sont les gouvernants qui donnent le bon ou le mauvais exemple. Avec la Renaissance instaurée par Mahamadou Issoufou et ses camarades marxistes léninistes, des politiciens ont renoncé à leurs principes, aux valeurs auxquelles ils croyaient pour se consacrer à une politique du ventre. S’il y a un domaine où la gouvernance de Mahamadou Issoufou a réussi c’est la normalisation du scandale et la culture des contrevaleurs. Les valeurs sociétales et les principes qui constituent lesocle de toutes communautés ont été pervertis. Contrairement aux régimes soucieux de bâtir une société digne de ce nom, le régime de Mahamadou Issoufou s’est évertué à valoriser les menteurs, les voleurs et les délateurs. Le mérite et la compétence sont au contraire combattus avec hargne pour ne mettre en valeur que les minables qui sont de connivence. Ainsi plusieurs hommes politiques et autres leaders d’opinion, y compris des religieux, se sont prostitués à l’instar des filles de la Fada ‘Dallo bon’. Que va faire le reste de la communauté, spoliée, exploitée et clochardisée par les mêmes politiciens véreux ? Mendier, se déshumaniser à l’instar de leurs leaders d’opinion puisque désormais ce n’est plus répréhensible. Chacun vend ce qu’il a.
Un des grands piliers de la galaxie rose, Hassoumi Massoudou en l’occurrence, en maitre du Trading, ne disait-il pas que l’on peut gagner de l’argent sans rien faire ? Pourquoi, bon dieu, d’autres font fournir d’effort ? Telles sont les vraies raisons de la mendicité au Niger. Ce sont elles qui font que certaines couches sont vulnérables et deviennent les victimes des trafiquants. La traite dans ce cas n’est qu’un symptôme de la vulnérabilité des citoyens dont les ressources sont concentrées dans les mains des voleurs, détourneurs et autres prédateurs. On résout les problèmes à la racine.
Bisso