Plus les Nigériens espèrent, plus les hommes politiques leur donnent des raisons de désespérer, des raisons de ne pas croire en leur sermon habituel. Pire, les actes les plus répréhensibles proviennent de ceux qui appartiennent à une classe d’âge, plutôt jeune, qui prétend avoir de meilleurs atouts que la vieille garde et qu’ils sont plus disposés pour servir. Ibrahim Yacoubou, pour parler précisément de lui, vient de fournir la preuve ultime que …a pleinement raison lorsqu’il dit que « Le renouvellement de la classe politique ne consiste pas à remplacer des vieux par des jeunes, mais à renverser l’échelle des valeurs afin de remplacer l’immoralité par la moralité, la malhonnêteté par l’intégrité, la traîtrise par le patriotisme ». La jeunesse n’a pas forcément l’apanage des valeurs, celles qui font et construisent une nation et Ibrahim Yacoubou vient d’en administrer la preuve éclatante. Il ne s’agit pas plus, ici, de juger un homme pour son inconstance et ses inconséquences que de s’alarmer pour le Niger. En réussissant le pari de retourner sur ses pas, avec le beau monde qui tenait, après août 2015, à lui donner la chance de prendre sa revanche sur Foumakoye Gado et le Pnds Tarayya, le président du Mpr Kishin Kassa nous offre, grandeur nature, l’image, désolante d’un Niger qui s’en va à vau-l’eau. Ibrahim Yacoubou n’a trahi personne, il s’est trahi lui-même. Il s’est tiré, en toute responsabilité, une balle dans le pied alors qu’il a un si long chemin à faire ; un chemin escarpé, jalonné d’épreuves difficiles que seules les valeurs permettent d’affronter et de surmonter. À moins qu’il se soit rendu déjà compte que le parcours de combattant est trop dur et que, tous calculs faits, il est préférable pour lui de faire comme tous ces petits gars qui ont créé un parti politique, juste, pour avoir de quoi manger.

Ibrahim Yacoubou n’a pas fait du tort à l’opposition, il s’est fait du tort. Certainement qu’il a déçu tous ceux qui ont cru en lui en le portant à bouts de bras pour le remettre en selle un mois d’août 2015, dans un sursaut de «kishin». Entre eux, militants du parti, ils vont vivre le sacerdoce de ce choix politique. Et ce sera un autre parcours de combattant, certainement plus facile pour ceux qui seront cooptés pour occuper tel ou tel poste, mais laborieux, voire infernal pour ceux qui seront laissés en rade. En tout état de cause, rester à l’opposition pourrait s’avérer plus tranquille et de toute façon plus prometteuse pour le Mpr Kishin Kassa que de s’acoquiner avec un pouvoir qu’il a régulièrement décrit comme un pouvoir corrompu aux antipodes des préoccupations des Nigériens.

Que cherchent, donc, Ibrahim Yacoubou et son parti, sinon à s’abriter sous es lambris du pouvoir, quitte à admettre qu’il n’y ait une autre façon de gouverner le Niger que de la façon dont le Pnds Tarayya le fait ? Ibrahim Yacoubou doit faire attention. Car, derrière cet unanimisme claironné et brandi tel un trophée, il y a des amertumes, des incompréhensions et des déceptions qui risquent de plomber son affaire. Et, connaissant les moeurs du régime, il est presque certain que les dinosaures roses ne lui donneront plus une autre chance de les gêner au point de les menacer. Il risque, s’il ne fait attention, de faire les frais de ses calculs politiques. On ne piétine pas, deux fois, les t…d’un aveugle. Ibrahim Yacoubou, selon toute vraisemblance, l’ignore.

BONKANO