Le vendredi 22 mars 2022, l’Assemblée nationale a examiné et adopté le Projet de texte modifiant et complétant l’axe I de la Déclaration de politique générale du Gouvernement, sans surprise avec 131 voix pour et 31 contre. Ce texte, aux yeux du Gouvernement, s’inscrit dans le cadre du défit sécuritaire, et dont l’adoption par les élus de la Nation lui permettrait de signer des accords ou des traités de défense avec des puissances étrangères pour combattre le terrorisme qui sévit dans le pays. « Un des défis majeurs auxquels fait face le Niger, à l’instar des autres Nations du monde, est la recherche de la sécurité et de la quiétude sociale qui constitue fort justement le premier axe de la Déclaration de politique du Gouvernement ». Et du moment où la Communauté internationale est disposée à, repenser son appui aux Etats du Sahel qui va au-delà de l’appui traditionnel vers un appui opérationnel, un engagement des troupes étrangères sur le terrain, « les forces spéciales des pays amis seront déployées et installées sur les territoires des pays membres de la CEDEA0 affectés par les menaces », précise le Premier ministre Ouhoumoudou Mahamadou, dans l’Exposé des motifs.
Dès l’entame des discussions générales, avant même les explications de vote par les présidents des groupes parlementaires, deux camps radicalement opposés, conformément à la configuration du paysage politique, se sont dégagés. D’un côté les députés de la majorité parlementaire, renforcée par la récente adhésion du MPNKiishin Kasa et ses 6 députés à la Renaissance. De l’autre les 31 députés de l’opposition. Pendant que les premiers, quand ils ne dormaient pas paisiblement, essayaient de détourner le débat en s’adonnant à des insultes et des calomnies, allant jusqu’à accuser les députés de l’opposition d’être des partisans de Nathalie Yamb et de Kémi Seba, ou bien tout simplement de partisans de coups d’Etat ; les députés de l’opposition, eux, s’évertuer à relever le caractère inédit et illégal du fameux Texte modifiant la Déclaration de politique générale du Gouvernement (DPG). Pour tous les Nigériens, la question sécuritaire est terriblement préoccupante, sauf bien sûr pour ceux qui utilisent cette insécurité pour restreindre les libertés des citoyens ou pour s’enrichir sur les cadavres de leurs concitoyens.
Mais « même quand on a faim, on appelle la marmite maman », dit-on. La présence de bases militaires étrangères dans un pays obéit à des règles. Et c’est le Gouvernement qui doit les respecter en premier. Mais, ce qui s’est passé le vendredi à l’Assemblée nationale est inédit. C’est du reste ce que le Président du Groupe parlementaire Zam-Zam Lumana Africa, Soumana Hassane, dans l’Explication de vote, souligne : « C’est un fait inédit que la modification d’une Déclaration de politique générale qui ne peut se passer que dans notre pays, et nulle autre par ailleurs ». Là réside justement toute l’incohérence du Texte présenté à l’assemblée nationale, une incohérence que les députés de la majorité, obnubilés à soutenir coûte que coûte "leur Gouvernement"même dans le faux ont, refusé de percevoir. La DPG n’est pas un texte de loi qu’il faut adapter à un contexte. « Une Déclaration de politique générale n’est qu’un simple discours dans lequel sont déclinées les grandes orientations de la politique qu’entend conduire le Gouvernement. Elle n’a aucune valeur juridique », a relevé Soumana Hassane. Le Gouvernement, bien que fort de sa majorité godillot, commettrai une faute, la faute capitale, en considérant que la DPG est un blanc-seing. Pour autoriser l’installation de bases militaires étrangères au Niger, en vertu de la Constitution, en son article 169, il faut plus qu’une banale modification de la DPG. Car, pour les accords de défense et de paix, les traités et accords relatifs aux organisations internationales, il faut nécessairement une loi de ratification. Donc le Gouvernement est très loin du compte. Malgré tout l’égosillement ridicule de bien de députés de la majorité, dont certains seraient à la base de la situation difficile dans laquelle se trouve notre armée.
Il s’agit de ceux-là qui sont abondamment cités dans les différents scandales de détournements de deniers publics, en particulier les fonds destinés à la défense et à la sécurité. Ceux-là mêmes qui ont payé des lance-pierre à nos soldats au lieu d’armes de guerre adéquates. C’est la raison pour laquelle l’opposition parlementaire a averti le Gouvernement sur le danger de « croire que l’approbation de la modification par la majorité parlementaire, pour le moins instrumentalisée….vaut autorisation pour permettre à des forces étrangères de s’implanter au Niger ». Le Gouvernement est tenu de se conformer à la loi, notamment en se respectant scrupuleusement à l’article 169 de la Constitution. Les évènements tragiques de Téra sont une leçon douloureuse dont nous devons nous inspirer pour l’opposition politique.
En vérité, c’est justement ce genre d’événements que craignent les Nigériens. Ce qu’ils redoutent par-dessus tout, ce sont des accords frauduleux et cachés dans lesquels une immunité totale serait accordée aux militaires étrangers sur notre sol sous prétexte qu’ils sont venus nous prêter main forte. Pour qu’ils ne puissent pas être poursuivis et jugés pour les pires crimes, massacres et viols, qu’ils commettraient au Niger et contre des Nigériens. Voilà le problème. Les débats du vendredi 22 avril 2022 ont révélé aux Nigériens deux catégories de députés. D’un côté les députés de la majorité qui défendent leur Gouvernement, alors qu’en vérité c’est le Gouvernement de la République, et leurs intérêts de clan. Aucun d’eux n’a fait référence à la Constitution et à la loi au cours de ces discussions. De l’autre côté, les députés de l’opposition qui se sont révélé les porte-voix du peuple nigérien, soucieux de la loi et de la Constitution. Ceux qui ont suivi les débats ont vu et désormais fait la différence. Les députés de l’opposition, ont assuré, c’est certain. Devant l’histoire et devant les hommes, ils ont dégagé leur position qui correspond si heureusement à celle de la majorité des Nigériens, et non à celle des acheteurs de « lance-pierres ».
Bisso