Autant, quand la Cour des Comptes s’illustre de façon brillante, les bons esprits ne faillissent pas dans leur honnêteté intellectuelle de le relever sans aucun complexe particulier, autant, lorsque cette institution semble manquer à l’un de ses devoirs, à savoir la transparence publique, ces mêmes observateurs s’accordent à reconnaître une telle défaillance inadmissible. De quoi s’agissait-il au fait ? En effet, vous l’aurez sans doute constaté, depuis un certain temps, la déclaration officielle des biens des membres du Gouvernement, transmise par les intéressés à la Cour des Comptes, n’est plus publiée officiellement par ladite Cour. Pourtant, la Constitution, la loi fondamentale, exige, pour une catégorie de responsables (Président de la république, Premier ministre et Ministres), avant leur prise de fonctions, de bien transmettre à qui de droit l’état complet de leur patrimoine. La philosophie générale ayant présidé à l’édiction de cette loi visait à protéger les deniers publics contre une éventuelle confusion avec le patrimoine privé de ces hauts responsables. C’est une déclaration faite sur l’honneur et qui engage pleinement la responsabilité du déclarant ! Car, cette déclaration doit être sincère au cours d’un certain temps pour que chacun des actifs du patrimoine en question puisse trouver sa juste justification quant à sa provenance ou à son mode d’acquisition, afin d’éviter tout amalgame entre les fonctions occupées et les biens possédés à titre personnel. Cette déclaration protège également le serviteur public des accusations ou autres soupçons d’enrichissement illicite au cours de l’exercice de ses fonctions officielles, puisqu’il pourra aisément faire la preuve du contraire par le biais de cette déclaration préalable. Et pour les citoyens, la publication permettra de savoir qui a quoi et comment au sein de cette catégorie de responsables assujettis à cette obligation légale. Si, par exemple, un citoyen avait connaissance d’un bien appartenant à un de ces responsables et qui ne figurait pas dans sa déclaration officielle publiée, eh bien, le citoyen en question pourrait, à cette occasion, alerter la HALCIA qui pourrait mener des investigations approfondies à ce sujet afin de tirer au clair cette affaire. Voilà, entre autres, une des utilités pratiques de la publication de cette déclaration! Alors, pourquoi la Cour des Comptes a-t-elle pu manquer à cette exigence élémentaire de transparence publique ? Il semblerait que des raisons d’ordre budgétaire se trouveraient à l’origine de cette situation. Franchement, entre nous, serait-ce vraiment sérieux ? Combien coûterait, en pratique, une telle publication dans le journal gouvernemental ‘’Le Sahel’’ pour une institution comme la Cour des Comptes dont le budget de fonctionnement pourrait supporter, sans coup férir, ces modestes frais de publication ? Nenni, cela ne fait guère sérieux et pourrait, à terme, nuire à la crédibilité d’une institution de cette importance ! Et à défaut d’une publication matérielle, pourquoi ne pas rendre, tout simplement, disponibles, sur le site web de ladite Cour, toutes les informations contenues dans les différentes déclarations des biens des membres du Gouvernement afin que les citoyens puissent les consulter en toute tranquillité ? Du côté du Gouvernement, les citoyens attendraient très rapidement de voir la Cour des Comptes être dotée de moyens conséquents lui permettant de remplir pleinement la mission délicate de contrôler la reddition des comptes publics de la nation. Mais paradoxe kafkaïen, le hic, c’est que ces moyens se trouvent entre les mains de ceux justement dont la Cour des Comptes a reçu mission de contrôler la gestion ! Autrement dit, le contrôlé fournit au contrôleur l’outil du contrôle, exactement comme le candidat à un examen établirait le barème de la notation !
Maiga I.