selon un journal de la place. L’avion présidentiel a été in extremis récupéré par Niamey grâce un accord amiable partiel signé entre les deux parties, courant 2016 ; accord à l’issue duquel le Niger a même renoncé à toute immunité judiciaire sur tous ses biens. Il faut souligner que ce contentieux est né de la rupture unilatérale par le Niger, en 2012, du contrat qu’il a dûment signé avec cette société spécialisée dans la production de documents biométriques et électroniques. L’affaire a fait le tour du monde, a passé devant plusieurs tribunaux où le Niger est sommé de verser des milliards à Africard. Récemment, le Niger a obtenu la mise en sursis de la vente programmée, le 25 juillet passé, de l’immeuble de New York, acquis depuis 1977 sous Kountché et saisi par Africard. L’affaire n’a donc pas fini de faire parler d’elle, et notre pays a déjà perdu beaucoup de plumes. Le Niger a évoqué des cas de corruption dans la chaine, et versé des pièces au dossier. Pour l’instant, les Nigériens attendent l’issue de ce contentieux onéreux pour le Niger. Le Courrier a largement fait écho de ces démêlées judiciaires entre Africard et le Niger dans plusieurs parutions, relayé par d’autres journaux de la place et sur les réseaux sociaux. Il a également traité, en exclusivité, de plusieurs scandales dans lesquels sont impliqués de hauts responsables de l’Etat : l’Uraniumgate, les fraudes aux concours où plusieurs personnalités ont envoyé de listes de parents aux fins de recrutement, le riz pakistanais, etc. Ali Soumana est-il en train de payer pour tout ça ? Toujours est-il qu’après plusieurs jours de garde à vue, il est présenté au juge le 3 juillet 2017 et placé sous mandat de dépôt à la prison civile de Filingué. Faute de moyens, il est interné d’abord à la prison civile de Niamey où il a rejoint, entre autres, Ibrahim Bana du groupe Agir pour Hama Amadou en 2016 et Gamatié Yansambou du Syncotaxi. Finalement, c’est hier, mercredi 12 juillet, après neuf (9) jours passés à la prison civile de Niamey, qu’il est embarqué pour la prison civile de Filingué, et là aussi dans le véhicule d’un ami qui a tenu à lui éviter les véhicules de transport en commun proposés par l’administration pénitentiaire. Cette incarcération d’Ali Soumana, qui intervient après celle d’opposants politiques, de membres de la société civile et d’autres journalistes, a suscité beaucoup de réactions, au Niger comme à l’extérieur, dont celles de la Maison de la Presse, des journalistes indépendants du Niger, de Reporters sans frontières (RSF) et d’Amnesty International, tous inquiets des entorses graves faites à la liberté de la presse dans notre pays. Il faut souligner, au demeurant, qu’en matière de délit de presse, la loi 2010-035 portant régime de la presse au Niger, dit clairement en son article 67 : « En matière de délit de presse, la détention préventive est interdite. Le juge ne peut décerner ni un mandat de dépôt ni un mandat d’arrêt ».
C’est d’ailleurs pourquoi, pour beaucoup d’observateurs, le régime de la Renaissance est en train de se transformer de plus en plus en ogre prédateur des libertés individuelles et collectives, qui vise à réduire toutes les voix discordantes au silence. Or, une démocratie sans contrepouvoir réel se sclérose et se transforme en son contraire. L’arrestation des journalistes, des opposants politiques et des membres de la société civile qui dénoncent la mauvaise gouvernance n’est en rien productive.
Elle est même contreproductive car elle occulte les vrais problèmes et ne permet nullement d’améliorer le quotidien des nigériens, encore moins inverser la courbe de l’indice du développement humain (Idh) du Niger, régulièrement classé à la queue du peloton. Les défis du Niger sont ailleurs. Soit on peut ; soit, on ne peut pas et on démissionne.
Bisso
14 juillet 2017
Source : Le Courrier