La hausse du prix du gasoil semble réveiller le front social avec, depuis des jours, une levée de boucliers qu’attise par une incompréhension autour des raisons invoquées par le gouvernement pour justifier sa décision, qui reste, malgré les rencontres et les accords signés à l’arrachée, controversée, incomprise, et ce quand, malgré les engagements à maintenir des prix de certains services et produits, le consommateur, ne peut à son corps défendant, que subir la loi du marché, avec chaque matin, la découverte surprenante de nouveaux tarifs affichés qui trahissent justement les clauses contenues dans les accords signés en grande pompe. C’est à juste titre que certains observateurs parlent de dialogue de sourds quand, en réalité, ce que propose le gouvernement n’est pas un dialogue ouvert mais juste des rencontres voulues pour la forme afin de s’expliquer et montrer que la décision étant prise, celleci est irrévocable. Dès lors qu’il ne peut venir à de tels pourparlers avec d’autres propositions qui peuvent montrer qu’il est prêt à consentir des marges aux négociations et entrevoir d’autres perspectives possibles qui arrangent tous, du moins le grand nombre, l’on a compris que le consensus est impossible et surtout que ce gouvernement n’est pas décidé à avancer dans le dossier. Dès à la sortie de la rencontre avec les acteurs sociaux, certains en étaient d’autant sceptiques qu’ils ne pouvaient pas attendre de faire un compte-rendu à leurs bases qu’ils peuvent déjà exprimer leur insatisfaction face au discours qu’on leur a tenu pour les amadouer, misant sur une probable inflation envisagée si jamais la mesure prise ne devrait pas être appliquée.
Explications légères….
Les raisons données ne peuvent que faire sourire. Comment un pays qui, heureux en principe de ce que par ses prix incitatifs, il s’attire beaucoup de clients, celui-ci puisse imaginer que l’attitude qu’il devrait avoir est d’aligner le prix de son produit au même que dans cet autre pays, oubliant le produit doit d’abord profiter aux Nigériens ? Déjà sous Pierre Foumakoye Gado à la tête du ministère du pétrole l’on avait appris, à l’occasion d’une interpellation à l’Assemblée Nationale, que le choix clairvoyant du gouvernement était de le vendre plus cher aux Nigériens pour que les autres viennent le chercher chez nous à moindre coût. Raisonnement insensé que celuilà ! Quel drôle de socialisme que celui-là qui se soucie plus d’un autre que de son peuple ? Pourtant, peutil se souvenir qu’en d’autres temps, pour des raisons qui lui sont personnels, le Bénin refusait que les vivres de son pays entrent au Niger. Quelle belle charité que celle de nos prétendus socialistes ! C’est incohérent. D’autant plus que l’on ne peut jamais imaginer que les mêmes Béninois chez qui nous partons pour acheter certains produits, notamment alimentaires, ne peuvent, ni pour nos beaux yeux ni pour les raisons tordues brandies par les nôtres, décider de vendre aux leurs au même prix au Niger de leurs maïs, leurs fruits, leur igname sous le fallacieux prétexte qu’ainsi, ils peuvent éviter certains spéculations sur leur marché.
Pourquoi devenons exploiter des ressources si elles ne doivent pas servir aux Nigériens, si elles ne doivent pas impacter la qualité de leur vie et les aider à vivre moins difficilement ? Les hommes politiques d’aujourd’hui n’ont plus les mêmes peuples que ceux des années 60 à 90. Voudra-t-on que même avec tant de ressources, le Niger continue à être, ad vitam aeternam, le dernier de la planète parce que certains de ses enfants peuvent en faire ce qu’ils veulent sans en rendre compte au peuple ? Ces Nigériens ne peuvent d’ailleurs pas comprendre cette décision unilatéralement quand on ne demande rien aux hommes et aux femmes qui dilapident les ressources publiques et gèrent mal.
Mais on sait que le Pnds-Tarayya a cru, jusqu’ici, et en 11 années, pour avoir fait tout ce qu’il veut, dans le mépris royal des mécontentements et des protestations de populations boudant sa politique socialiste conçue plus pour faire souffrir les populations , il peut toujours adopter la même posture pour malmener le peuple, ne pouvant pas comprendre que celui-ci, a enfin ouvert les yeux. Et on peut voir le régime misé sur les mêmes «armes» pour contenir les colères naissantes, et étouffer les révoltes qui viennent à grands pas.
Répression….
On voit bien que, fidèle à ses principes, le Pnds n’a aucune intention de poser le vrai débat pour aller à un dialogue franc pouvant, lorsque les hommes mettront l’intérêt général au devant de tout, permettre d’aller à un consensus salutaire et en même temps de préserver la paix sociale et la quiétude politique si nécessaires à ce pays si fragile. Depuis que le régime a initié des rencontres et manigancé un accord-trompe-l’oeil, et qu’il se rend compte que ses initiatives ne dissipent pas pour autant les malaises dans un pays grouillant de colères et de rancunes, il semble renouer avec ses vieilles amours en faisant comme sous Issoufou Mahamadou pour jouer sur l’intimidation et la répression, et justifier, demain, sans doute, que ceux qui s’agitent, où ne seraient qu’une «minorité » méprisable ou manipulés pour un agenda politique inavouable. La chanson sera la même, maussade. Sans goût. Un tel regard trop étriqué sur les problèmes du pays ne peut permettre de les régler durablement sinon que de maintenir, forte, la tension dans le pays avec des rancunes qui vont continuer à se renforcer.
L’on a appris, depuis quelques jours que certains acteurs – leaders de la société civile frondeuse - ont été interpellés. C’est à croire que le Pnds a définitivement cru que les Nigériens sont un peuple peureux qu’il peut indéfiniment tout faire contre un tel peuple, tout lui imposer sans qu’il ne puisse oser relever la tête pour accepter de subir lâchement.
Veille des consciences citoyennes…
Quand on entend ce qui se dit sur les médias et notamment sur les réseaux sociaux, l’on ne peut que comprendre que les Nigériens ont mûri politiquement. Les critiques ne viennent plus d’un camp et cela est un signe fort pour indiquer que le «fruit est mur», et qu’un geste maladroit suffirait à le faire tomber. Comme quoi, il ne faut jamais minimiser des colères dans un pays, sous-estimer des hommes qui se battent et qui, plus, pourraient avoir tiré les leçons des combats qu’ils avaient menés jusqu’ici pour savoir aujourd’hui à quoi s’en tenir pour mener, avec plus d’intelligence, un combat qui est surtout celui du peuple, une lutte existentielle. Le Nigérien d’aujourd’hui n’est plus celui de 1960, encore moins celui de 1990 qu’on peut manipuler à sa guise sur un certain nombre de considérations dont on a fini par découvrir les limites. Sans oublier qu’entre temps, en trois décennies où chacun, a pu «passer au volant», l’on a pu apprécier chacun pour savoir dans le pays qui est qui en matière de gouvernance et la déception est immense, dévastatrice. Ceux qui avaient fait croire qu’ils seraient les meilleurs et qu’ils pouvaient mieux gérer se sont révélés comme les piètres. Depuis 1990 où ils nous forçaient à aller à une conférence nationale, et après plus de trente ans, le Niger, dans leurs mains prétendues expertes, n’en est fait que la lanterne rouge du monde en matière d’IDH. Alors qu’ils critiquaient et dénonçaient avec véhémence toutes les gestions antérieures, proscrivant l’injustice, la corruption, le clanisme, les détournements, l’enrichissement illicite, le favoritisme, ils firent pire : plus voleurs qu’eux, clament bien de Nigériens déçus, on meurt. C’est à croire qu’ils n’ont pas d’orgueil pour entrer dans l’Histoire et dans la légende par le comportement que l’on reconnaît aux grands hommes : humilité et austérité, don de soi et sacrifice pour la cause commune. Les Nigériens découvrent que la politique n’est que raccourcis pour ceux de se bâtir rapidement des fortunes que rien, autour d’eux et de leurs parcours, autour d’eux et de leurs origines, ne saurait justifier.
Après plus de deux semaines, la discorde reste intacte…
En vérité, à propos du dossier rien n’a bougé et l’accord que l’on exhibe pour justifier une avancée n’en est pas une pour dissiper les malentendus. Au contraire, les colères s’amplifient quand, au lieu de l’écoute et de l’attention face aux colères populaires et au malaise, les gouvernants affichent plutôt un mépris, allant en vacances dans le douillet confort de leur insouciance. On imagine qu’ils comptent encore sur Oumarou Dogari pour interdire la marche pacifique projetée et s’éviter de faire face à un peuple en colère. Peut-il ne pas savoir que ces hommes décidés à se battre pourraient avoir mûri leur nouvelle lutte pour imposer qu’on respecte leur action pour enfin les écouter et les entendre ? On entend ici et là qu’il ne s’agit plus d’une question politique mais de survie pour un peuple et l’argument sur lequel ils se fondent au-delà de cet aspect, c’est l’injustice qui sous-tend la nouvelle mesure. Ayant mal géré le pétrole pendant dix ans, et en difficulté avec les Chinois, le régime ne trouve mieux qu’à faire payer sa mauvaise gestion au contribuable nigérien pour recouvrer par une telle ruse le manque à gagner causé par les fantaisies de commis indélicats, et investi dans le béton de leurs projets immobiliers ostentatoires, souvent dans les mondanités dispendieuses. C’est du moins l’analyse que l’on entend ces derniers temps de la part de ceux qui, nombreux il va sans dire, s’opposent à la hausse. D’ailleurs, comment voudrait ce gouvernement que les Nigériens se comportent pour faire face à une telle situation quand malgré son fameux accord, les Nigériens, assistent, impuissants, à des hausses sur les marchés et dans les transports ? Toutes choses qui montrent qu’il n’a aucune autorité à réguler le marché, et surtout quand même socialiste, il prône un libéralisme qui contrefait son socialisme devenu finalement pour les Nigériens un de pacotille.
Aussi, un des indices nouveaux qui oblige à prendre au sérieux les nouvelles tournures que prend le front social c’est que désormais des syndicats y sont engagés pour la même cause pour la même survie. Et selon des acteurs politiques, le front politique, ainsi que l’annonçait Omar Hamidou dit Ladan Tchana, devra aussi s’allumer. Il faut lire le temps. Et attention aux dérapages !
Gobandy