La situation au Mali semble être devenue une importante source de motivation pour certains dirigeants africains. Confrontés aux dures réalités de l’exercice du pouvoir car pas préparés et incapables de soutenir un projet viable de société pour leurs concitoyens, ils surfent sur les problèmes que rencontrent les colonels du Mali, un pays voisin. Ils ne ratent aucune occasion pour conseiller, réprimander, sanctionner et insulter les actuels dirigeants maliens. Comme si le Mali est un département de leur pays. Cette situation est aussi une question existentielle pour les voisins de ce pays. Ils donnent l’impression de devoir leur situation du moment à la France. C’est pourquoi, depuis le divorce entre les deux pays, ils sont devenus des avocats de la France et des bourreaux pour le Mali. Le président Bazoum du Niger, pays voisin du Mali et lié par une longue histoire et des échanges bénéfiques, détient la palme de critiques en l’endroit du Mali. Et cela au mépris de la bienséance diplomatique, des prescriptions de notre religion qui recommande compassion pour un voisin en difficulté et de nos valeurs traditionnelles qui enseignent solidarité et aide aux voisins. A l’occasion de la 77ème session de l’Assemblée générale des Nations Unies, au détour d’une interview avec la presse française, il récidive au point d’amener le Premier ministre Abdoulaye Maiga à l’égratigner au passage dans son adresse à l’Assemblée générale. On se rappelle que son prédécesseur, Choguel Maiga, au cours de la précédente Assemblée générale de l’ONU, a, dans son discours, heurté la sensibilité des Français en parlant d’‘’abandon en plein vol’’. C’était un crime de lèse majesté qui lui a valu une guerre sans merci de la France et de ses porte voix africains. Son retrait de l’activité politique pour cause de maladie- probablement diplomatique- et l’occupation de ses charges par le colonel Abdoulaye Maiga furent considérés comme une victoire.
Mais la France et ses amis ne purent la savourer trop longtemps. Le Premier ministre par intérim semble être plus virulent et plus incisif que Choguel Maiga. Il en donnera la preuve lors de son discours à la 77ème session de l’Assemblée générale des Nations Unis. Guterres, Ouattara et Bazoum en pendront pour leur grade. Si l’on peut raisonnablement penser que la position du secrétaire général des Nations Unis s’explique par la solidarité socialiste- il membre comme le président Ibrahim Boubacar Keita de la moribonde International socialiste les positions de Ouattara et Bazoum ne s’expliqueraient que par leur obligeance visà- vis de la France. La réponse du Premier ministre malien ressemble bien à un « rendu pour un prêté ». Même si Maiga est allé très fort au risque de chatouiller le patriotisme- frelaté sûrement de certains Nigériens, son annonce sur Bazoum ne sort pas ex-nihilo. On sait le débat qui y a eu au Niger au cours des dernières élections. En dépit des décisions de justice qui obligent au respect, le doute ainsi créé subsiste. Et aucune décision de justice ne peut et ne pourra effacer un doute qui reste et demeure personnel. Cette surenchère ne doit en principe pas conduire à l’irréparable. Tous ceux qui hier encore doutaient de la nationalité d’origine du président doivent oeuvrer pour une décrispation. D’autant qu’un conflit ouvert entre le Niger et le Mali ne fera l’affaire de personne. Si ce n’est celui de nos ennemis. Si la lutte contre le terrorisme est une affaire de tous, la mutualisation des efforts doit primer sur toute autre attitude. Que les boutefeux et autres opportunistes en quête de réhabilitation et de positionnement arrêtent. A moins qu’il n y ait un autre agenda. Nos dirigeants ont-ils pris des engagements auprès de la France pour mettre les colonels maliens dans les rangs ? Avec un calendrier précis qui prend du retard ? L’inversion des rapports des forces y est-elle pour quelque chose dans cette inutile surenchère ? Toutes ces situations créent des frustrations. Plausible.
Au début du conflit, les forces armées françaises, au lieu de l’Armées régulière malienne, utilisaient des milices. Il y avait Gatia et MSA. Les deux milices avaient chefs le général Gamou et Moussa Ag Acharatoumar, un Daousak. Elles ont été en grande partie responsables de la dégradation du vivre en commun entre les Peuls et les Touaregs de cette zone. Des autorités nigériennes auraient été suspectées d’aider ces milices. Aujourd’hui, ces deux milices sont en perte de vitesse. Certains miliciens de Gatia seraient reconvertis en convoyeurs pour les trafiquants qui pullulent la zone. MSA a été supplanté par l’EIGS. En ces moments, c’est surtout la rivalité entre deux groupes terroristes qui attire l’attention. Un affilié à l’Etat Islamique et l’autre à ALQAIDA. Une guerre entre Bergers et Talibés serait en préparation. C’est une situation frustrante pour nos dirigeants. Certains responsables nigériens avaient caressé le voeu de regrouper les bergers pour en faire une milice qui pourrait porter des revendications. Des Peuls, intellectuels, de cette zone auraient été mis à contribution. Ce fut chou blanc. C’est certainement la deuxième frustration. La disparition d’un jeune peul surnommé Tchiro entrerait elle dans ce cadre ? Membre fondateur de JUMI (Jeunes Unis pour Mahamadou Issoufou) en 2010, il est porté disparu depuis quelques années. Auraitil voulu s’ériger en négociateur pour la libération des otages ? D’autant que c’est un business qui rapporte. Preuve que ce qui est vrai et possible dans certains groupes ethniques est difficile voire impossible chez les Peuls. Si le président Issoufou a pu libérer les otages d’Areva, c’est grâce aux talents de négociateur de Mohamed Akotey. La dernière libération d’otage pourrait être mis au compte de Moustapha Chaffi. Toutes ces frustrations pourraient être à l’origine du courroux du président Bazoum.
Modibo