L'affaire secoue actuellement le monde diplomatique nigérien, mais Hassoumi Massoudou, le ministre d’État, des Affaires étrangères et de la Coopération depuis avril 2021, veille à faire taire tout remous qui pourrait l’éclabousser. Le syndicat de la maison est particulièrement tenu en joue pour empêcher tout déballage préjudiciable, lui que l’on dit aspirant à la présidence du Pnds Tarayya. Il y a de quoi. Le 16 novembre dernier, il signe un arrêté portant rappel, affectation et mutation de certains agents. Un arrêté dont le Courrier a obtenu copie. Quoi de plus normal. Certains, en poste depuis les cinq ans règlementaires qu’un agent des Affaires étrangères est autorisé à faire dans un poste, doivent revenir à l’administration centrale. Hassoumi Massoudou a, donc, procédé à un vaste mouvement d’ensemble où les uns ont été maintenus à leurs postes initiaux, les autres, mutés ou remplacés. Seulement, dans le lot des nouveaux promus à ces postes convoités par les personnels des Affaires étrangères, il y a des cas qui suscitent mécontentement et forte désapprobation. Selon une source ayant requis l’anonymat, Hassoumi Massoudou n’a pas pu s’empêcher de caser quelques contractuels. Autrement dit, des individus n’ayant pas encore intégré les effectifs de la Fonction publique. Certainement la clientèle politique rose, composée déjà de 98% d’ambassadeurs et consuls du Niger à l’étranger, malgré la présence, aux côtés du Pnds Tarayya, d’alliés politiques avec lesquels il a gagné et gère le pouvoir.

Sur l’arrêté incriminé, Hassoumi Massoudou a glissé quelques cinq contractuels identifiés grâce à un numéro matricule «maison» qui leur a été affecté. Est-ce pour camoufler l’acte ? C’est possible. Même si un indice, assez subtil, lève toute équivoque sur le statut des «intrus ». Ils sont nommés, non pas «en qualité de», mais plutôt «avec rang de». Autant dire des compléments d’effectifs hissés à un grade appréciable dans la hiérarchie du personnel diplomatique pour leur permettre d’avoir accès à des indemnités et avantages assez intéressants. Sur les cinq relevés par le Courrier, deux sont nommés «avec rang» de deuxième secrétaire et trois, «avec rang» de premier secrétaire ». Le Niger, note un diplomate ayant requis l’anonymat, ne manque pas pourtant de personnels diplomatiques suffisants pour élever au rang de premier et de deuxième secrétaire des contractuels. Selon notre source, « la diplomatie nigérienne n’a jamais été aussi banalisée que sous ce régime ».

C’est toujours Hassoumi Massoudou dans les scandales de l’achat de l’avion présidentiel et de l’uraniumgate.

Poids lourd des affaires fumeuses qui ont gangrené la 7e République, Hassoumi Massoudou n’est pas à son premier coup d’éclat du genre. Déjà en 2013, alors directeur de Cabinet d’Issoufou Mahamadou, l’actuel ministre des Affaires étrangères a piloté l’achat de l’avion présidentiel. Un scandale financier de grosse ampleur, le gouvernement, sous les auspices de Hassoumi Massoudou, ayant acheté un appareil d’occasion qui a plus de 15 ans de vols commerciaux à son actif. Malgré tout, non seulement il a coûté plus cher que le neuf, mais il a été acheté à crédit alors qu’une inscription budgétaire de 21 milliards et un don d’Areva (actuelle Orano) de 35 millions d’euros, soit un peu plus de 23 milliards de francs CFA, étaient disponibles pour couvrir cette dépense. Une affaire jamais élucidée à ce jour. Entre-temps, le même Hassoumi, toujours à ce poste, a été découvert en tant que maître d’ouvrage dans la non moins nébuleuse uraniumgate. Un tour de passe-passe dans lequel l’actuel ministre des Affaires étrangères a transféré, à partir d’un compte bancaire qu’il a créé pour le besoin de la cause au nom de Sopamin (Société de patrimoine des mines du Niger), 200 milliards de francs CFA à Dubaï, vers un compte appartenant à Optima Energy. La société en question appartient, entre autres, à Georges Hawa, un escroc international poursuivi pour faits d’escroquerie portant sur plusieurs millions de dollars. Pour mémoire, Bazoum Mohamed, alors membre du gouvernement d’Issoufou Mahamadou, a notamment déclaré que Hassoumi ne démissionnera pas et qu’il ne sera pas démis de ses fonctions. L’intéressé est, donc, un abonné aux affaires fumeuses. Des affaires pour lesquelles il n’a jamais été inquiété et qui rendent celle des nominations et affectations de contractuels à des postes de diplomates d’une banalité frappante.

Laboukoye