Pendant les dix ans qu’il a présidé aux destinées du Niger, l’ancien Président de la République Mahamadou Issoufou a excellé dans deux choses les voyages à l’extérieur et les interviews aux médias occidentaux, particulièrement français. Il n’y avait presque pas une rencontre impliquant des chefs d’Etat à laquelle l’homme n’avait pas assisté au niveau sous-régional, régional et international. Les sorties de l’ancien Président étaient devenues tellement fréquentes que certains citoyens le comparaient à célèbre compagnie de transport dont les bus quittent Niamey tous les jours en direction des villes nigériennes et de la sousrégion. Presque à chacune de ses sorties aussi Mahamadou Issoufou accordait des interviews à des médias, notamment occidentaux et particulièrement français.

Alors que ses homologues des autres pays peuvent passer des longs mois sans accorder une interview à un média, lui aimait beaucoup parler. Visiblement, le Président Mohamed Bazoum est sur les traces de Mahamadou Issoufou dans cette tendance à trop voyager à l’extérieur et à trop donner des interviews à des médias occidentaux, surtout lorsqu’il s’agit des médias français. En moins de deux ans seulement qu’il est au pouvoir, le successeur de Mahamadou Issoufou à son actif, plusieurs voyages à l’extérieur et de nombreuses interviews accordées aux médias occidentaux. Tout comme son prédécesseur, Mohamed Bazoum ne rate presque aucun rendez-vous sous-régional, continental ou international auquel il est convié. Si pour les interviews Mahamadou Issoufou savait éviter certains sujets qui fâchent, surtout lorsqu’ils concernent d’autres pays, Mohamed Bazoum, lui, se prononce sur tous les sujets par rapport auxquels la presse occidentale l’aborde. Il y a quelques jours encore, en marge de sa participation au sommet USA-Afrique, il s’est encore exprimé sur la situation du Mali. Or, beaucoup de Nigériens ont pensé que leur Président allait cesser de s’intéresser à la situation de ce pays voisin, depuis l’attaque dont il a été l’objet de la part du Premier ministre par intérim du Mali Abdoulaye Maïga, réagissant à ses propos antérieurs sur son pays. Ils sont de plus en plus nombreux les Nigériens qui ont la main sur le coeur chaque fois qu’ils apprennent que leur Président est en déplacement à l’extérieur du pays, craignant qu’il ne prononce sur des sujets très sensibles. Le Président nigérien manque-t-il des experts en communication, dignes de ce nom, capables de lui dire qu’un Président de la République ne parle pas à tout vent et qu’il faut toute une gymnastique pour lui arracher une interview ? Oui bien ces conseillers existent, mais qu’il ne prend pas en compte leurs avis ? Quoi qu’il en soit, Mohamed Bazoum n’a même pas besoin d’être conseillé par qui que ce soit pour comprendre qu’un Président de la République ne doit pas répondre à n’importe quelle sollicitation d’un média et que toute interview qu’il doit accorder doit être minutieusement préparée. Il lui suffit juste de voir comment ses collègues des autres pays, dont certains sont au pouvoir, depuis plus d’une décennie, mettent beaucoup de temps avant de parler à des médias. Et tout le monde constate que lorsque ces Chefs d’Etat parlent, ils créent un évènement et leurs propos intéressent même les médias à qui ils n’ont pas accordé l’interview. Mais lorsqu’un Président se met à parler pour un oui ou pour un non, l’opinion finit par être agacée par ses sorties médiatiques et n’aura plus envie de leur accorder la moindre attention.

Amadou Madougou