Décidément, les choses s’accélèrent au niveau des deux (2) principales régies financières que sont la Direction Générale des Impôts (DGI) et la Douane Nationale, avec les arrestations qui se poursuivent à un rythme rapide. En effet, après les arrestations opérées au sein de la Douane ayant conduit en prison plusieurs hauts responsables de cette institution, d’autres interviennent au niveau de la DGI, précisément à la Direction Régionale des Impôts de Dosso pour les mêmes chefs que pour les douaniers.

Evidemment, dans la lutte contre la corruption et les détournements de deniers publics, ces deux institutions se retrouvent en première ligne de la Justice, car ce sont elles qui collectent pour l’Etat la majeure partie ses recettes fiscales. Malheureusement, depuis plusieurs années, le constat se dégageait que ces deux administrations étaient profondément gangrenées par la corruption et l’enrichissement illicite. En réalité, si l’on en était arrivé-là, c’est que l’impunité aura été érigée en règle d’or de gouvernance une décennie durant, le tout procédant de la politisation rampante de l’administration publique installée dans les nominations des responsables de ces deux leviers importants de collecte de ressources fiscales. L’on aura ainsi tourné le dos aux principes et règles établis pour placer à la tête de ces deux institutions de personnes choisies, souvent, sur des bases nonobjectives, à qui l’on demande de financer également le parti. L’on connaît, de notoriété publique, comment certains hauts responsables de la Douane cachaient à peine leur obédience au régime en place, en favorisant les opérateurs économiques de leur bord politique et en finançant la campagne du parti à l’occasion d’élections générales. Ce n’était plus alors un tabou que la Douane était dépravée, que la corruption s’y étant développée et l’enrichissement illicite constaté. Les autorités politiques aux affaires étaient souvent bienveillantes à ces pratiques peu orthodoxes, au sein de ces administrations fiscales, l’essentiel étant qu’elles y trouvent leur compte. Il est vrai, cette politisation des administrations des douanes et des impôts ne date pas du régime de la renaissance, mais procède bien du système politique installé à la tête, un système de prédation des ressources publiques dans un esprit de partage de postes de responsabilité entre alliés politiques au pouvoir.

Voilà d’où serait venu, peut-être, tout le problème actuel qui touche, aujourd’hui, ces deux régies financières du pays, devenues à la fois les symptômes d’une maladie sociale et les causes d’une dégénérescence morale ! Mais, à y regarder de près, l’on ne peut que constater que ce ne sont point les seules institutions publiques minées par ce fléau de corruption et de détournements de deniers publics, tant la mal-gouvernance aura semblé être la règle, en lieu et place de l’exception.

Que deviennent alors tous les dossiers de la HALCIA bouclés et transmis depuis ?

Si la HALCIA n’avait pas existé, il eût fallu l’inventer, serait-on tenté de se dire ! C’est probablement l’une des plus belles réussites politiques du régime d’Issoufou Mahamadou. Cependant, créer une institution est une chose, en respecter l’esprit et l’exigence en est une autre. Certes, Issoufou Mahamadou avait eu l’ingénieuse idée de créer la HALCIA, mais avait-il, réellement, la volonté politique nécessaire de tirer toutes les conséquences possibles qui en découleraient ? Pas sûr, sans doute au regard de la méthode de gouvernance que fut la sienne durant ses deux mandats présidentiels ; une méthode basée plus sur l’achat des consciences que sur la conviction de cellesci. Ainsi, sous son règne peu glorieux, la HALCIA était apparue plus un instrument de chantage politique contre de récalcitrants au ‘’Gurisme’’ qu’un levier de bonne gouvernance politique et administrative. Naturellement, elle avait fini par craquer sous le poids de tonnes de rapports relégués au fond des tiroirs (On parlerait de plusieurs centaines de dossiers en souffrance au niveau de la suite à donner à ces rapports).

Aujourd’hui, les Nigériens se demandent légitimement le sort advenu à tous ces dossiers de corruption et de détournements de deniers flagrants bouclés par la HALCIA. On évoque à ce sujet une multitude de dossiers ficelés et transmis, mais qui moisissent toujours au niveau de la décision finale, c’est-à-dire la transmission à la Justice. Pourquoi ces dossiers n’ont-ils pas abouti à l’ouverture d’une procédure judiciaire comme c’est le cas, aujourd’hui ? Pourquoi le rapport d’inspection concernant l’Autorité de Régulation de la Communication Electronique et de la Poste (ARCEP) n’ait pas connu un traitement judiciaire ? Que sont devenues les inspections au Ministère de l’Education Nationale, de la Défense Nationale, de la Santé ? En outre, que deviennent tous ces cas de fautes de gestion relevées par la Cour des Comptes dans son Rapport général 2022 et transmis aux services compétents pour traitement ? Cela concerne des ministres actuellement en poste, sans que la moindre information judiciaire soit ouverte à leur encontre ! Pourquoi, alors, ces deux poids, deux mesures dans le traitement des dossiers ? Rien que le dossier du Ministère de la Défense Nationale, devenu le symbole de la prévarication politique à son stade le plus achevé, au Niger, suffirait à semer le doute et le scepticisme dans les esprits quant à l’effectivité et surtout la crédibilité de cette opération d’assainissement entreprise par le régime de Mohamed Bazoum. L’on aimerait tant croire et espérer dans cette louable et salvatrice oeuvre de salubrité publique, mais, l’on ne saurait, d’un autre côté, d’émettre quelque doute dans le déroulement de la chose. Il serait, peut-être, temps de commencer par épingler des ministres, qui doivent être les plus exemplaires possibles dans une administration publique et dans un système politique, afin que les cadres de conception et autres agents d’exécution puissent s’en inspirer. On objectera à cela l’arrestation de Hama Zada, alors Ministre de la Communication, mais ce que l’on semblait perdre de vue dans ce dossier précis, c’est que le concerné a été plus été rattrapé par son passé de Directeur Général de la Société de Patrimoine Minier du Niger (SOPAMIN) que celui de Ministre.

Assez donc de lampistes, il faudrait passer à la vitesse supérieure, en allant en eaux profondes pour pêcher de gros poissons, genre baleines ! Pour cela, il faudrait montrer la même célérité et la même détermination observées au niveau de la Douane et des Impôts !

Amadou Madougou