Le journal l’Eclosion a tout dit en un mot. Vous êtes en face d’une unique équation : sauver votre pays ou continuer à contenter la France. J’espère et souhaite, pour vous-même mais surtout pour le Niger, que vous optiez plutôt de sauver votre pays que de continuer dans cette logique totalement absurde où vous faites un pas en avant, deux pas en arrière. Je regrette de vous le dire, vous n’avancez pas au rythme des défis à relever, notamment en matière de sécurité et de défense du territoire national. Savez-vous pourquoi ? Parce que le ver, je vous l’ai déjà relevé dans une de mes correspondances, est dans le fruit. Selon de nombreux experts et esprits analytiques, vous ne pouvez rien construire en matière de sécurité intérieure avec la France actuelle. Vous avez certainement su que, récemment, France 24, une télévision que l’État français détient et contrôle en majorité, a réalisé et diffusé une grande interview du chef terroriste qui a plongé les populations nigériennes dans le désarroi et l’angoisse morbide, avec son lot de milliers de morts, de déplacés forcés et d’économie démembrée. C’est le même chef terroriste que la France prétend traquer sur nos terres et c’est au nom du combat contre ce sinistre individu que vous prétendez également que la présence militaire française est plus qu’utile pour le Niger. La France, je suis tenté de vous le demander, peut-elle être à la fois amie au Niger et aux terroristes qui massacrent les populations nigériennes ? Ailleurs où on a pris conscience du jeu véritable de la France parce que prise en défaut à maintes reprises, au minimum pour inutilité de sa présence militaire, le pays de De Gaule a été non seulement bouté dehors, mais ses instruments de propagande aussi ont été fermés. Je sais que vous avez lu et relu cette lettre, notamment grâce aux réseaux sociaux. Mais, permettez-moi de vous la reprendre de bout en bout afin qu’elle vous donne des ailes pour aller vers ces pays qui ont pris leurs destins en main. Le Niger en sortirait grandi, croyez-moi. Voici ce que l’État burkinabè, sous la houlette patriotique du jeune capitaine Ibrahim Traoré, a rendu public en fermant la grande gueule de France 24 : « C’est avec regret que le gouvernement a découvert il y a de cela deux semaines, une interview du chef d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) sur les antennes de France 24 du groupe France médias monde. Sans contester la liberté des choix éditoriaux de la chaîne, le gouvernement s’interroge cependant sur l’éthique qui gouverne la pratique professionnelle du journalisme à France 24.
Le gouvernement se désole de voir que le chef d’une organisation terroriste comme AQMI et reconnue comme telle par l’ensemble de la communauté internationale puisse bénéficier des largesses éditoriales de France 24 pour s’exprimer longuement sur les antennes de la chaîne. Cette organisation, est-il besoin de le rappeler, adepte d’un terrorisme djihadiste est l’auteur de crimes odieux qui choquent la conscience humaine et qui ont fait des milliers de victimes à travers le monde.
Dans la bande sahélo-saharienne et particulièrement au Burkina Faso, la violence aveugle et la barbarie contre les paisibles populations est principalement alimentée par cette organisation qui nourrit les desseins funestes pour notre pays et notre peuple que le gouvernement a la responsabilité de protéger.
En ouvrant ses antennes au premier responsable d’AQMI, France 24 ne fait pas seulement office d’agence de communication pour ces terroristes, pire il offre un espace de légitimation des actions terroristes et des discours de haine véhiculés pour assouvir les visées maléfiques sur le Burkina Faso.
Le gouvernement a don décidé, en toute responsabilité, et au nom de l’intérêt supérieur de la nation, de la suspension sine die des programmes de France 24 sur l’ensemble du territoire nationale.
Le gouvernement, tout en réaffirmant son attachement à la liberté de presse et d’opinion, renvoie France 24 et l’ensemble des professionnels des médias à leurs responsabilités quant aux choix éditoriaux qu’ils opèrent dans le traitement de l’information sur le terrorisme. Dans le noble combat engagé pour libérer notre pays de la barbarie des hordes terroristes et des bandits armés, il prévient qu’il demeurera intransigeant dans la défense des intérêts vitaux de notre peuple contre ceux qui joueraient les mégaphones dans l’amplification des actions terroristes et des discours de haine et de division véhiculés par ces groupes armés ».
N’est-ce pas simplement fabuleux ? Comment un État souverain, jaloux de la sécurité, de la liberté, de la quiétude sociale et de la paix de ses citoyens peut-elle s’accommoder avec une telle France qui nous poignarde dans le dos, en assumant ouvertement son acte ? Est-ce ça un patriotisme frelaté ou l’attitude du gouvernant qui feint d’agir dans l’intérêt de son peuple mais qui fait tout autre chose ?
Monsieur le “Président”
La nuit a beau duré, le jour finit par poindre. Vous connaissez l’adage et il est plus que vrai, au sens figuré comme au sens propre. Le Niger ne saurait demeurer dans l’obscurité. Il sortira un jour des ténèbres dans lesquelles la cupidité humaine, la boulimie et le patriotisme galvaudé — j’allais dire frelaté comme votre ministre des Affaires étrangères, à la différence qu’il s’est trompé de cibles — de certains de nos frères l’ont plongé. Ne soyez pas du camp des perdants. Vous avez là une chance inouïe de figurer en bonne place dans l’Histoire de votre pays. Tout comme vous avez tout pour faire ce qui est contraire aux intérêts de votre peuple. Le Mali et le Burkina Faso ont pris le large en larguant le colis encombrant. Or, le Niger forme avec ces pays frères et voisins une même et seule réalité sur bien des questions. Avec le Mali en particulier, le Niger partage plus de 800 km de frontière. Vous ne pouvez pas garantir la sécurité du Niger à l’exclusion de ce pays et vous l’avez fort bien compris en envoyant le chef d’État-major général des Forces armées nigériennes, le général Salifou Modi, à Bamako auprès de votre homologue du Mali, le colonel Assimi Goïta.
Ah, c’est un acte de garçon, croyez-moi. Seulement, vous n’avez pas tenu longtemps. Vos compatriotes regrettent amèrement de constater qu’aussitôt, les patrons de cette armée française qui ne sert à rien au Niger vous ont isolé, probablement pour vous menacer. Avez-vous des explications et des justifications à fournir aux autorités françaises lorsque vous devez décidé de ce qui est bon pour mieux assurer la sécurité de vos compatriotes ? Pourquoi cette visite militaire française de haut rang au lendemain du séjour du général Modi au Mali ? La France veut-elle vous empêcher de coopérer avec ce pays ?
Monsieur le “Président”
Où sont les avions, hélicoptères, drones et blindés que vous avez dit avoir commandés auprès de la Turquie ? Lors de votre discours de voeux de nouvel an, vous avez déclaré que 2023 sera l’année du déploiement de nos équipements aériens commandés en 2021. Nous sommes en fin mars et vos compatriotes attendent toujours. Commandés en 2021, la réception de ce matériel de guerre dont on n’a pas besoin d’épiloguer sur l’urgence, tarde encore. À croire qu’il s’agit plus de chimères visant à tromper et à endormir que de commandes réelles pour en finir avec ces bandes armées. Vos compatriotes attendent pour être convaincus. La lutte contre la corruption les a suffisamment édifiés sur ce que vous pouvez faire.
Mallami Boucar