En contrepartie, ces derniers ont demandé plus de moyens financiers pour exécuter le travail qui est attendu d’eux sur le chantier de la lutte contre la migration ‘’irrégulière’’. Il convient de noter au passage que le président Ibrahim Boubacar Keïta du Mali, un pays dont le développement est en bonne partie boosté par cette forme de migration dans laquelle excellent nombreux de ses fils, n’a pas pris part à la rencontre. Ce qui n’est guère surprenant. Il n’a pas osé ramer à contre-courant de la volonté de ses compatriotes, hostiles à toute forme de rétention des migrants sur le territoire malien. Aux toutes premières heures du lancement du débat sur la question, les populations maliennes avaient ouvertement mis en garde leur président contre toute forme de mesures visant à retenir sur place les candidats à la migration. Professeur Alpha Condé n’a pas non plus participé au conclave alors même que la Guinée figure parmi les pays subsahariens réputés de départ massif. A l’évidence des faits, on réalise que seuls le Niger et le Tchad et dans une moindre mesure la Libye, qui constituent des couloirs de transit pour les migrants subsahariens, sont engagés sur le chantier. Dans une moindre mesure la Libye, parce que le sud de ce pays n’est pas encore pacifié pour permettre de créer un centre de rétention et de tri des migrants qui seront autorisés à fouler le sol européen. D’après le plan d’action retenu lors du mini-sommet de Paris, les centres de rétention travailleront sous la houlette du Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR). Il est question de listes ouvertes et de listes fermées. On ne sait pas à quoi ces concepts correspondent exactement, mais ce qui semble évident c’est que les migrants économiques ont peu de chance de parvenir à traverser les mailles des filets des centres de rétention et de tri. Tout laisse croire en tout cas dans la démarche que les réfugiés politiques et de guerre seront privilégiés. Les migrants considérés non éligibles seront laissés à la charge du Niger et du Tchad qui ont accepté l’implantation des centres de rétention et de tri sur leur sol. Et quand on sait que les dirigeants des deux pays ne parviennent pas à créer aujourd’hui des emplois à leurs propres jeunes, on voit mal comment leurs populations accepteront la création de projets d’insertion socioéconomique au profit de ressortissants d’autres nationalités africaines, avec les appuis financiers qui seront mis à disposition par l’Europe. Puisque c’est la principale requête formulée par le pré- sident Issoufou et son homologue tchadien Idriss Deby à l’occasion du mini-sommet de Paris. Les deux chefs d’État ont tous insisté sur le financement du développement des pays africains par l’Europe, comme principal gage de succès dans la lutte contre la migration irrégulière. il s’agit d’une véritable aberration de la part de présidents de deux pays africains qui disposent d’importantes potentialités en matière de ressources extractives exploitées par les mêmes pays occidentaux et asiatiques auprès desquels ils qué- mandent des appuis budgétaires pour financer leur développement. Que d’adopter cette posture humiliante qui n’a que trop duré, nos dirigeants africains feraient mieux de créer les conditions pour tirer un meilleur profit de l’exploitation de leurs ressources. D’autant que personne ne viendra financer le développement de l’Afrique. Que cela soit entendu une fois pour toute.

Tawèye

1er septembre 2017
Source : Le Monde d'Aujourd'hui