Prenant la parole lors de la cérémonie d’ouverture du sommet extraordinaire de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest, le président de la commission de la CEDEAO, M Jean-Claude kassi Brou a eu une pensée spéciale aux victimes ouest africaines du terrorisme, victimes auxquelles il a rendu hommage tout en adressant les condoléances de la communauté à leurs familles. Au président de la République, président en exercice de la CEDEAO, hôte dudit sommet extraordinaire et au gouvernement du Niger, M Kassi Brou a adressé les respectueuses salutations et sa gratitude pour les dispositions prises afin d’assurer une bonne organisation de ce sommet en un temps très court. Il a surtout salué la promptitude avec laquelle les dirigeants ouest africains ont répondu à l’invitation en prenant part à cette rencontre de haut niveau pour analyser la situation en Guinée Bissau et envisager, d’un commun accord, les voies et moyens d’aider ce pays frère à sortir de cet engrenage de crise préjudiciable non seulement aux populations guinéennes mais aussi à toute la communauté ouest africaine.

Pour M Kassi Brou, cette présence massive et prompte des chefs d’Etat et de gouvernement au rendez-vous de Niamey démontre sans doute leur ferme volonté à prendre les dispositions nécessaires pour mettre fin à la crise politique qui secoue la Guinée Bissau. Elle est également la preuve de leur engagement et de leur détermination pour la paix, la stabilité et la démocratie en Guinée Bissau dans l’intérêt du peuple. Parlant de la situation, qu’il a qualifiée d’explosive en Guinée Bissau, le président de la Commission de la CEDEAO est revenu sur les efforts que déploie l’organisation sous régionale depuis le déclenchement de la crise pour éviter un autre scénario éprouvant à ce pays. Et pour cause, lors de son 55ème sommet ordinaire du 29 juin dernier, face au vide institutionnel né de l’arrivée à terme du mandat du Président guinéen, la communauté a pris les dispositions pour permettre la poursuite du processus jusqu’à l’élection présidentielle du 24 novembre 2019, en maintenant le président en poste, confiant la gestion des affaires courantes du pays au Premier ministre issu des législatives de mars 2019.

La CEDEAO s’est pleinement investie dans le processus électoral qu’elle souhaite faire aboutir à son terme a dit M Kassi Brou. Et c’est dans ce cadre que des missions ministérielles et techniques ont été dépêchées ayant permis d’enregistrer des progrès notables comme l’utilisation du fichier ayant servi à l’organisation des législatives, l’élaboration d’un bulletin de vote unique, la publication par la cour suprême des listes des candidats à l’élection présidentielle. « Mieux, les chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO ont décidé d’apporter une aide financière de 1,5millions USD en faveur de l’organisation de l’élection présidentielle » a dit le président de la Commission de la CEDEAO. C’est dans ce contexte et contre toute attente que le Président guinéen a décidé de limoger le Premier ministre et son gouvernement pour le remplacer par un autre Premier ministre issu de la minorité parlementaire. Le Président de la commission a laissé entendre que la décision du 28 octobre était aussi surprenante qu’incompréhensible parce que non seulement, elle ramenait le pays à la situation de 2015, compromettait l’élection présidentielle mais aussi « créait les conditions d’une instabilité, avec une menace sur la paix dans ce pays » a-t-il déclaré.

La situation dans laquelle la décision du président plonge le pays est inacceptable tant pour la majorité parlementaire   guinéenne que pour la CEDEAO qui s’est beaucoup investie et depuis longtemps pour restaurer la paix et la stabilité dans ce pays, a souligné M Kassi Brou. Il a déploré la volonté manifeste d’utiliser la force pour faire prévaloir des décisions controversées avec le risque d’affrontements armés pouvant aboutir à une possible intervention de la force de la CEDEAO dont on pourrait tout à fait faire l’économie. Le président de la Commission a indiqué qu’il s’agit de tout faire « pour éviter une guerre civile tout en assurant la poursuite du processus électorale déjà entamé pour combler le vide institutionnel ». M Jean-Claude kassi Brou a indiqué qu’une issue heureuse de la crise contribuerait nécessairement à la préservation de la paix et de la stabilité dans la région.

A l’issue de ce sommet extraordinaire, les Chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO ont dans un communiqué final envoyé un message clair aux protagonistes en Guinée Bissau tout notifiant que l’institution régionale ne saurait tolérer une action qui pourrait menacer la paix et la stabilité d’un Etat membre. Ils ont convenu du renforcement du mandat de la Force ECOMIB en Guinée Bissau et réaffirmé leur soutien au Premier ministre Aristides Gomes et son gouvernement afin de parachever le processus électoral en cours dans ce pays. Les Chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO ont marqué leur accord par rapport au chronogramme établi par la Commission Nationale des Elections pour la tenue le 24 Novembre 2019 du scrutin présidentiel.

Du reste, le président de la République, SE. Issoufou Mahamadou, président en exercice de la Conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement avait dans son discours d’ouverture du Sommet, souligné clairement que la Cedeao ne peut tolérer, pour quelque raison que ce soit, ladéstabilisation d’un État membre.

Lire, ci-dessous, l’intégralité des discours prononcés par SE. Issoufou Mahamadou, à l’ouverture et à la clôture du Sommet ainsi que le Communiqué final ayant sanctionné les travaux du Sommet.

Hassane Daouda et Zabeirou Moussa (onep)

 

Discours d’ouverture du Sommet extraordinaire sur la Guinée-Bissau : {xtypo_quote}« Si nous avons pris la décision de convoquer ce Sommet extraordinaire, c’est parce que la Guinée-Bissau, un État membre de notre Communauté, vit actuellement une situation de crise politique et institutionnelle grave » déclare SE. Issoufou Mahamadou, président en exercice de la Conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement de la Cedeao{/xtypo_quote}

« Excellences Messieurs les Chefs d’État et de Gouvernement,

Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale

Mesdames et Messieurs les Présidents des Institutions,

Mesdames et Messieurs les membres du gouvernement,

Monsieur le Président de la Commission de la CEDEAO,

Monsieur le Représentant Spécial du Secrétaire Général des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel,

Monsieur le Représentant du Président de la Commission de l’Union Africaine,

Excellences, Mesdames et Messieurs,

Permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue à Niamey et de vous remercier pour avoir accepté de prendre part à ce Sommet Extraordinaire sur la Guinée-Bissau malgré un délai de convocation très court. Votre présence est le signe manifeste de votre engagement à assurer la paix et la stabilité de notre sous-région et de votre attachement aux valeurs communes et normes adoptées par notre organisation notamment celles définies à travers les dispositions pertinentes du Traité Révisé et du Protocole relatif aux mécanismes de prévention, de gestion, de règlement des conflits, de maintien de la paix, et de la sécurité du 10 Décembre 1999 ainsi que du Protocole additionnel sur la démocratie et la bonne gouvernance du 21 Décembre 2001. Sans le respect de ces valeurs et normes communes, il est illusoire de penser que nous pourrons atteindre nos objectifs d’intégration.

Excellences, Mesdames, Messieurs,

Notre sommet extraordinaire se tient dans un contexte sécuritaire difficile avec des victimes civiles et militaires dans certains pays de notre espace. Je vous prie de bien vouloir observer une minute de silence en leur mémoire.

Excellences, Mesdames et Messieurs,

Si nous avons pris la décision de convoquer ce Sommet extraordinaire, c’est parce que la Guinée-Bissau, un État membre de notre Communauté, vit actuellement une situation de crise politique et institutionnelle grave, avec des conséquences désastreuses pour ce pays et pour notre sous-région. Cette situation constitue un écart grave par rapport aux valeurs et normes définies dans les protocoles que je viens de citer.

La crise politique que la Guinée Bissau traverse n’est pas nouvelle. Je voudrais rappeler que la CEDEAO s’est déjà beaucoup investie depuis 2015 pour y soutenir la normalisation sociopolitique et garantir la paix et la sécurité.

Dans le cadre de ces efforts, notre conférence a procédé à de nombreuses médiations et pris plusieurs décisions conformément à la Feuille de Route de l’Accord de Conakry d’octobre 2016. La mise en œuvre de ces différentes décisions et le soutien technique et financier de la CEDEAO et des autres partenaires régionaux et internationaux ont permis d’aboutir aux élections législatives du 10 mars 2019.

La tenue de ces élections législatives revêtait une importance cruciale pour remettre le pays sur la voie de la stabilité, dès lors que ces élections avaient été jugées transparentes, crédibles et acceptées par tous les acteurs.

Sur la base du résultat de ces élections législatives et d’un consensus obtenu au niveau de toutes les parties en conflit et en conformité avec les décisions prises par notre conférence, au sommet tenu le 29 juin 2019 à Abuja, un Premier Ministre a été nommé, un gouvernement mis en place et la date des élections présidentielles fixée au 24 novembre 2019. Dans le cadre de ce consensus le président de la république dont le mandat était arrivé à terme depuis le 23 juin 2019, a été maintenu en poste jusqu’à la fin du processus électoral.

Or à notre grande surprise, par un décret en date du 28 octobre 2019,le Président, limoge le Premier

Ministre et son gouvernement et nomme un nouveau Premier Ministre, et un nouveau gouvernement, et ce à trois semaines du premier tour de l’élection présidentielle.

Une telle décision est de nature à remettre en cause le calendrier électoral cité plus haut, à créer un blocage politique des Institutions, et surtout, à accroître les risques de confrontation entre les différentes forces de défense et de sécurité nationales, sans oublier la Force d’appui à la paix de la CEDEAO (ECOMIB).

Nous sommes donc devant une situation de déstabilisation du pays avec des risques réels de guerre civile dans la mesure où le gouvernement mis en place par la majorité parlementaire et dont le programme a été adopté par l’assemblée nationale le 15 Octobre 2019, est demi par un Président de la République dont le mandat est arrivé à terme mais maintenu en poste suite au consensus de la classe politique validé par notre organisation.

Le Comité Ministériel de suivi de la CEDEAO, dépêché sur place, a réagi avec fermeté en dénonçant ce dérapage et a demandé, au nom de notre organisation, de poursuivre le processus électoral suivant le calendrier consensuellement arrêté.

Je voudrais à ce propos, saluer les organisations internationales et les pays qui ont soutenu la position de la CEDEAO.

Le Comité Ministériel de suivi nous fera rapport de son évaluation de la situation, ce qui va nous permettre d’en débattre, d’apprécier les différentes recommandations et de prendre les décisions idoines en vue d’une sortie rapide de cette crise. En tout état de cause notre sommet doit envoyer aux protagonistes un message clair : la CEDEAO ne peut tolérer, pour quelque raison que ce soit, la déstabilisation d’un État membre.

En souhaitant pleins succès à nos travaux, je déclare ouvert le Sommet Extraordinaire sur la Guinée-Bissau.

Je vous remercie ».

 

Discours de clôture de S.E.M. Issoufou Mahamadou, Président de la République du NIGER, Président en Exercice de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO : {xtypo_quote}«Les recommandations issues de nos délibérations (…) réaffirment, entre autres, notre soutien total au processus de sortie de crise déjà en cours devant aboutir à l’organisation de l’élection présidentielle le 24 novembre 2019 ».{/xtypo_quote}

Excellences Mesdames et Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO

- Monsieur le Président de la Commission de la CEDEAO

- Monsieur le Représentant Spécial du Secrétaire Général Nations Unies et Chef du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS)

- Mesdames et Messieurs les Ministres

- Monsieur le représentant du Président de la Commission de l’Union Africaine

- Monsieur le représentant du Président de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine UEMOA

- Mesdames et Messieurs les Représentants des organisations internationales et missions diplomatiques accréditées auprès de la République Togolaise

- Excellence Mesdames et Messieurs les Chefs d’Institutions régionales et internationales,

- Mesdames et Messieurs de la Presse

- Distingués Invités, Mesdames et Messieurs,

C’est avec plaisir que je reprends aujourd’hui la parole pourla clôture de cette session Extraordinaire de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).

ExcellencesMesdames et Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement, chers collègues,

Je voudrais vous renouveler mes remerciements pour avoir fait le déplacement de Niamey en vue de prendre part à ce sommet extraordinaire malgré le court délai dans lequel il a été organisé.

Je voudrais également en votre nom, saluer à nouveau tous les distinguésinvités qui sont venus nous soutenir dans nos travaux.Je me félicite de la qualité des rapports que nous avons entendus et de la sagesse avec laquelle nous avons examiné la situation actuelle difficile de la Guinée Bissau.

En effet, en nous penchant sur la situation difficile du peuple frère de la Guinée Bissau, nous rendons service non seulement à ce pays mais à la Région toute entière,conformémentà l’esprit de solidarité et d’assistance mutuelle qui fondent l’existence de notre communauté.

Les recommandations issues de nos délibérations viennent de vous être présentées dans le Communiqué final de notre Session. Elles réaffirment, entre autres, notre soutien total au processus de sortie de crise déjà encours devant aboutir à l’organisation de l’électionprésidentielle le 24 novembre 2019, sous la conduite du Premier Ministre Mr Aristide Gomes et son gouvernement.

La Conférence en appelle à la collaboration de tous les acteurs politiques, administratifs, judiciaires et militaires de Guinée Bissau.La Conférenceréitère ses remerciements aux Nations Unies et à l’Union africaine ainsi qu’à tous les partenaires financiers et techniques.

A quelques jours des élections présidentielles, la Conférence veut s’assurer de la bonne compréhension de ses décisions et de l’engagement de tous. C’est pour cela qu’une mission de Chefs d’Etat se rendra incessamment à Bissau pour rencontrer le Président Jose Mario Vaz.

Je ne doute pas un seul instant que notre action permettra de réconcilier les acteurs politiques Bissau guinéens et permettra des élections paisibles et crédibles à la date convenue.

Excellences Mesdames et Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement,

Distingués Invités,

En vous souhaitant un bon retour dans vos pays respectifs, je déclare clos les travaux du Sommet Extraordinaire de notre organisation.

Merci de votre aimable attention.».


ONEP

11 novembre 2019
Source : http://www.lesahel.org/