Outil de référence en matière de lutte contre la corruption au Niger, le document de Stratégie Nationale de Lutte contre la Corruption et son Plan d’Action adoptés voilà deux ans, visent selon le gouvernement à enraciner de manière durable la culture de la recevabilité, de la transparence et de l’intégrité à tous les niveaux de la gestion des affaires publiques. Le document sonne comme un nouveau signal fort des autorités en place à mettre fin à ce fléau qui gangrène tous les aspects de la vie sociopolitique et économique de notre pays. Il vient, comme on l’avait pensé, renforcer l’arsenal institutionnel et organisationnel déjà existant dans le cadre de la lutte contre ce phénomène qui prend des proportions inquiétantes au Niger ces dernières années, altérant au passage le dynamisme des autorités pour l’essor et le progrès socio économique du pays.
En plus de ce document, le Niger s’était déjà doté, depuis 2011, d’une institution nationale de lutte contre la corruption et les infractions assimilées, la HALCIA, puis d’un gendarme financier, sans qu’en réalité la corruption, le détournement des deniers publics et l’enrichissement illicite connaissent véritablement de recul significatif. Au point où certains observateurs se sont interrogés sur l’opportunité de l’élaboration et l’efficacité de ce document cadre et de la création de la HALCIA. En cause, le manque, selon beaucoup de nos compatriotes, de volonté politique, occupée toujours à nous servir des discours pompeux, confinés dans une politique du chiffre pour satisfaire à un certain conformisme mondial à travers un appareillage d’instruments qui résonne bien à l’oreille mais dont l’efficacité laisse à désirer.
Pour Zakari Omar, expert en suivi-évaluation, la lutte contre la corruption au Niger n’est que de forme. Pour lui, des institutions de lutte existent certes, mais malheureusement ce sont des instruments politiques, institués, pour montrer à la face du monde que le Niger mène un combat contre la corruption. « Hey mon frère, lutte contre la corruption fa », ironise ce concitoyen, boutiquier de son état, qui dit ne pas croire du tout à un combat contre la corruption au Niger.
Même si l’adage dit comparaison n’est pas raison, on ne peut pas faire la symétrie entre la lutte contre ce phénomène, il ya de cela deux, voir, trois décennies, qui, avec de maigres moyens et outils a donné des résultats probants alors qu’aujourd’hui tous les instruments institutionnels et organisationnels existants pour mieux lutter contre ce fléau ont montré leurs limites. La corruption persiste et prend même de l’ampleur. Si les autorités des années avant la démocratie ont réussi un tant soit peu dans ce combat, c’est parce que leur volonté politique n’a jamais fait défaut d’une part et d’autre part la société nigérienne était encline à des valeurs comme la probité et l’intégrité.
Selon un autre compatriote, cadre de l’administration publique qui a voulu garder l’anonymat, il faut rendre systématiques les dénonciations des actes de corruption, des mauvaises prestations, ainsi que la valorisation des bonnes pratiques en matière de lutte contre la corruption et de rédévabilité sur la gestion publique.
« Hey jeune homme, les Nigériens attendent de voir que, tous les corrompus, quelque soit leur bord politique, leur accointance avec qui que ça soit, rendre gorge et le Niger rentrer dans ses droits. C’est ça la lutte contre la corruption pour moi », estime un vieux qui m’entendait discuter avec le boutiquier.
Ces documents et institutions seront-t-ils le tremplin pour voir la lumière faite autour de plusieurs scandales financiers et/ou politico financiers, notamment sous l’ère de la Renaissance sur lesquels bizarrement la justice reste muette ou moins engagée ? Aussi, quelque soit la qualité des textes, ils ne vaudront pas mieux que les autres instruments, tant que les hommes et femmes chargés de leur application ne seront pas animés d’une volonté ferme, d’une conviction à toute épreuve et n’auront pas les coudées franches pour accomplir convenablement leur mission.
En d’autres termes, tant que l’impunité et l’interventionnisme politique seront de mise, les textes, quel que soit leur contenu, seraient de la poudre de perlimpinpin.
Aujourd’hui, la corruption, le détournement des deniers publics, les passe-droits, la concussion, sont devenus les sports favoris de beaucoup de nigériens qui ont fini par normaliser la corruption. Des documents et/ou institutions, aussi stratégiques qu’ils soient, ne peuvent donner des résultats probants sans une volonté farouche des plus hautes autorités du pays qui doivent se départir de tous les indélicats économiques logés dans les sérails du pouvoir à la Présidence, dans le Gouvernement et bien d’autres hautes fonctions de l’Etat, que ces derniers utilisent comme boucliers.
Des gros bonnets, corrompus jusqu’à la moelle, ou impliqués dans des scandales et trafics de tous genres, doivent rendre des comptes pour donner le bon exemple et Dieu seul sait combien ils sont aujourd’hui.
NDLR : Cet article a été réalisé dans le cadre d’une résidence d’écriture organisée par le HALCIA sur le journalisme d’investigation.
M.D