De rebondissement en rebondissement, la désormais tristement célèbre affaire, ‘’Ibou Karadjé’’, le tube de cet été très mouvementé, aussi bien du point de vue météorologique que judiciaire (les pluies diluviennes actuelles et les inspections d’Etat), n’aura justement pas livré tous ses secrets au public nigérien. Au départ, d’une banale affaire d’escroquerie, comme on en voit tous les jours, nous voici, aujourd’hui, en présence d’un scandale politico-financier dont les tentacules s’étendent jusqu’aux entrailles du régime de la renaissance du Niger d’Issoufou Mahamadou. Après les monstruosités découvertes suite aux inspections d’Etat menées au Ministère de la Défense Nationale sous le régime d’Issoufou Mahamadou, portant sur plusieurs dizaines de milliards de nos francs, le dossier ‘’Ibou Karadjé’’ vient clore, aujourd’hui, cet intermède politique durant lequel la bonne gouvernance, tant claironnée à tue-tête sur tous les toits, aura été soumise à rude épreuve par des pratiques aux antipodes des règles élémentaires de gestion des finances publiques.
Parti de rien, après une aventure infructueuse à Cotonou (Bénin), Ibrahim Amadou Moussa, alias ‘’Ibou Karadjé’’, s’est retrouvé, du jour au lendemain, au coeur d’un savant système de prédation de deniers publics, niché dans les hautes sphères du pouvoir sortant. Il était arrivé à la présidence sur une moto, il en était reparti avec un parc automobile démentiel, sans que cela eût attiré, à l’époque, le moindre soupçon de la part de sa hiérarchie sur son train de vite dont la transformation subite ressemblerait à la découverte de la célèbre caverne d’Ali Baba ! Ibou Karadjé n’avait point peur d’étaler cette réussite, car, il se savait protégé de la part de ceux pour le compte de qui il agissait secrètement. En effet, comment un simple chef de service de la catégorie ‘’B’’ peut-il être émetteur de LAP pour faire sortir de l’argent du trésor public, si, quelque part, il ne bénéficie pas de grandes complicités dans toute la chaîne de dépenses publiques ? Si l’on se trouvait sous d’autres cieux, où les gens marchent sur les pieds et non sur la tête, toute la chaîne de dépenses publiques, c’est-à-dire du Ministère des Finances, au Trésor public en passant par les services financiers de la présidence, serait concernée par l’affaire. Cuisiné par les enquêteurs, l’homme par qui le scandale a éclaté, ‘’Ibou Karadjé’’, aurait décidé de lâcher le morceau en donnant des preuves documentées et des noms de gros ‘’poissons politiques’’ encore présents dans l’aquarium du régime actuel. Si l’on en croit les informations circulant à ce sujet, les accusations actuelles d’Ibou Karadjé auraient de quoi donner le tournis au pouvoir actuel, dont certains de ses grands animateurs sont mêlés de près ou de loin à cette scabreuse affaire. Se sentant sans doute abandonné par ceux pour le compte de qui il agissait, Ibou Karadjé aurait, visiblement, opté pour la stratégie de la balance, ‘’ A taru, alalaché’’, (‘’Périssons ensemble !’’), comme disent les hausas, c’est-à-dire la stratégie de la terre brûlée ! Tête baissée, n’ayant plus d’autres choix possibles, il aurait refusé de se sacrifier pour la ‘’cause’’, en axant, désormais, sa ligne de défense sur l’implication de gros bonnets politiques dans l’espoir de voir le dossier buter sur l’impossibilité pour les enquêteurs d’entendre certains protagonistes cités dans l’affaire, à cause des positions politiques occupées actuellement. C’est à ce périlleux exercice qu’Ibou Karadjé aurait décidé de se livrer, en se disant que le régime actuel n’est que le continuum de celui sous lequel le crime avait eu lieu, car n’est pas le président actuel de la Mauritanie, Mohamed Ould El Gazaouani, qui le veut, c’est-à-dire prêt à envoyer son ancien mentor politique derrière les barreaux pour détournements de fonds !
Cependant, le régime de Mohamed Bazoum semble décidé à aller jusqu’au bout dans ce dossier sur lequel beaucoup de nos compatriotes l’attendent de pied ferme, lui qui n’a cessé, depuis son investiture, de promettre de gérer le Niger dans la justice sociale, en menant une lutte sans merci contre la corruption et les détournements de deniers publics. L’affaire ‘’Ibou Karadjé’’ est donc un test grandeur-nature pour éprouver sa détermination farouche dans ce noble et juste combat citoyen. Toute la crédibilité ultérieure de son pouvoir dépendra largement de sa résolution à aller jusqu’au bout de l’affaire, même si cela eût dû passer par l’épreuve masochique de se mordre le doigt soi-même, c’est-à-ne dire en n’hésitant pas à sévir contre son clan politique, au cas où toutes les preuves nécessaires auraient été réunies dans ce sens.
Pendant ce temps, Ibou Karadjé pourrait continuer à jacasser, à fournir de preuves accablantes supplémentaires, à donner des noms pour chercher sa tête, il n’empêchera que, selon certaines indiscrétions, le régime du président Bazoum serait décidé à aller jusqu’au terme de cette affaire, advienne que pourra ! Affaire à suivre !
Dan Malam