La violence terrorisme, depuis des jours, prend de l’ampleur dans la région de Tillabéri. Faut-il croire que le nouveau pouvoir est impuissants face au regain d’intensité de la violence ? Le président, depuis des jours, vit des jours difficiles, un début de mandat aux allures infernales, et les choses n’ont pas l’air de s’arranger pour lui. Peut-il d’ailleurs être fier de l’héritage que lui laisse Issoufou, son compagnon politique qui l’a aidé, par les moyens que l’on sait, à accéder au pouvoir dans un contexte fait de contestations et d’irréconciliables contradictions.
Lourd héritage…
Bazoum Mohamed a hérité d’une gouvernance désastreuse, d’un pays gravement divisé, d’une économie saccagée, exsangue, d’une administration vandalisée et paresseuse, d’une unité nationale fragilisée, d’une nation menacée dans son existence. D’abord, en arrivant au pouvoir, par la boulimie insatiable d’Issoufou et de son sérail, il ne trouve que des caisses vidées, des comptes raflés, des budgets consommés avant terme. Comment gouverner quand on n’a pas les moyens de sa politique et que tout est urgence dans le pays ? Avec quelle sérénité peut-on diriger un pays quand tous les jours, on tue ? Il va sans dire que dans de telles conditions, imposer une conduite à l’homme qu’on a dépourvu de tout moyen, c’est le condamner à échouer à tenir ses engagements vis-à-vis du peuple. Et cette question tragique est pertinente : le PNDS, souhaite-t-il vraiment que Bazoum réussisse ? Pire, alors qu’en 2011 quand il prenait le pouvoir, le Niger n’était attaqué de nulle part, voilà qu’après dix ans, le pays qu’il laisse à son successeur est menacée de toute part : Diffa, Maradi, Tahoua, Tillabéri, et, à Agadez où une manifestation pacifique qui devrait être organisée par la société civile locale a été interdite avec pour motif, des problèmes d’insécurité. Pour tout dire, il n’y a pas une seule partie du pays qui soit aujourd’hui sûre. On peut aller à Kouré à quelques encablures de la capitale, tuer et rentrer penaud quelque part dans Niamey. Il y a quelques jours, c’est en pleine ville, et en plein jour, qu’un braquage a été perpétré, et les gangs qui ont emporté le butin courent toujours, introuvable.
« L’enquête se poursuit ». On est habitué à la vieille chanson… Après dix années de priorité pour l’école dans le programme d’Issoufou, les enfants qui entraient à l’école à son arrivée au pouvoir, au BEPC de cette année qui consacre la fin de son règne, ont le taux d’échec le plus retentissant de l’histoire de l’école nigérienne. Le produit de sa politique éducative. Qui dit mieux ? Voici la grande réussite du grand socialiste. Voici le résultat pour lequel, on s’échine à le présenter au monde et à l’Histoire comme la star politique de la planète, le plus incomparable, adulé par la France, heureuse sans doute des services qu’il lui a rendus en dix années de larbinisme cocasse. Bazoum, a eu la malchance de succéder à son ami. Comme le Niger, et la région de Tillabéri, il est comme disent les Ivoiriens, « dans drap ». Rien ne marche dans le pays : le Niger est en panne. Son école, son économie, son armée, son administration aussi. Même l’opposition est en panne. Même les syndicats. Même la société civile. Le football est en panne. Même le soleil. Même le vent. Tout le monde s’est rangé, gagné peut-être par la fatalité, attendant que nos prières mal faites, lorsque nous manquons de foi, nous sauvent. Dieu ne regarde plus ce pays ?
Mais alors qui peut aider Bazoum à sortir de l’impasse ?
L’entourage de l’ancien président ne pourra rien. Son combat ce n’est pas le Niger, mais il est d’assurer ses arrières, de se servir du pouvoir de celui qu’il estime avoir installé pour son job afin de continuer à bénéficier de la même impunité et être intouchable. Comment ne pas s’inquiéter pour ce pays, quand, détourné de ses intentions somme toute bienveillantes, Bazoum s’embourbe dans l’inertie, bloqué à ne pas pouvoir démarrer pour « avancer », se contentant de timides nominations complaisantes qui ne sauraient donner des chances à avoir des résultats pour les promesses faites aux Nigériens. On ne peut que rappeler opportunément les propos graves du Président de Kiishin Kasa, lors d’un débat à l’assemblée nationale, où comme beaucoup de Nigériens, il ne peut voir dans ce qui se fait aujourd’hui, aucune perspective pour le pays et sa nouvelle renaissance. C’était dans l’indignation qu’il se demandait « Comment est-ce que des petits commis détournent des milliards dans le pays le plus pauvre de la planète », et peut-on ajouter, qu’un tel pays puisse enrichir son président plus que ne peuvent le faire des pays aux économies plus enviables ? De quel socialisme peut donc se flatter Issoufou Mahamadou, pour expliquer aux Nigériens et à l’International socialiste, les milliards qu’il dit avoir eus et engrangés en dix années de gestion de la plus fragile des économies du monde ? Diori Hamani, Seyni Kountché, Ali Chaibou, Mahamane Ousmane, Ibrahim Baré Mainassara, Wanké, Tandja Mamadou, Salou Djibo avant lui, n’ont jamais accumulé des milliards, sans qu’ils ne se proclament pour autant socialistes. Ils aiment le pays et ils étaient humbles à vivre leur vie sobre. Pourquoi, depuis dix ans, l’on ne parle plus que de milliards même en termes de vol, et de détournement ? Bazoum a franchement du pain sur la planche car, il ne faut pas se leurrer, tôt ou tard, ceux qui dorment avec les milliards volés au peuple, finiront par rendre compte : l’histoire, forcément, reste à écrire. Les voleurs n’échapperont pas. El Béchir du Soudan, Ben Ali, Alpha Condé, IBK, en savent quelque chose. Un jour on est le chasseur, un jour on est la biche », aimait dire, Feu Bonkano. Mais il y a encore pire.
La poudrière de l’Ouest du pays…
Tillabéri est en passe de devenir le Far-West nigérien. Seul les armes parlent dans cette partie du pays. Alors que les populations sont angoissées par une campagne agricole décevante, redoutant la pire insécurité alimentaire, voilà que la violence terroriste redouble d’intensité, avec son cortège de morts parmi les populations civiles et les FDS. En quelque cinq jours c’est près de la centaine que l’on compte et la psychose devient prégnante dans les villages des zones attaquées. Et les populations disent ne rien comprendre de ce qui leur arrive. Partout, l’on n’entend que des colères, de l’indignation, de l’incompréhension. On sentait cela arriver. Et Ibrahim Yacoubou alertait devant la représentation nationale. Aussi dira-t-il, « Je n’ai pas entendu prendre la mesure de la grave situation sécuritaire de notre pays, je n’ai pas entendu que le Niger a perdu une grande partie de son territoire » déplorant au passage « qu’il y a des zones où ce sont les terroristes qui font la loi, c’est eux qui prélèvent l’impôt » et « dans des zones où personne ne peut aller ». C’est cela le résultat de dix années de socialisme sous Issoufou. Les Nigériens ne sauraient l’applaudir n’en déplaise à Kassoum Moctar, le laudateur officiel de Zaki. Les Nigériens ne peuvent pas célébrer ce qui est faux. Et ils n’entendent pas les éloges intéressés de Macron. Aujourd’hui, avec ce que l’on voit sur le terrain, il y a à s’inquiéter vraiment.
Les populations sur le front de guerre…
La constitution informelle de milices de guerre ; d’auto-défense, peut-elle être le signe de la déliquescence de l’Etat et de l’armée que les socialistes, depuis 2011, quand ils arrivaient au pouvoir, s’étaient engagés à déstructurer au-delà de la valeur militaire qui devrait, seule, servir de critère à la promotion des hommes ? En tout cas, les populations ont pris leur destin en main, pour se défendre au prix de leur vie. Pour une République normale, avouons que c’est la solution extrême. Et sans doute qu’il aurait fallu ne pas en arriver là. Des hommes trahis dans leur combat noble, en allant traquer les bandits, avaient été poussés dans une embuscade et le bilan est effroyable. Mais ils sont morts dignes, l’arme à la main. La tragédie, peut-on l’entendre, n’a pas émoussé les ardeurs guerrières, et on peut entendre qu’une jeunesse est désormais galvanisée pour aller au front, n’écoutant plus un Etat dont ils ont l’impression qu’il n’existe plus autour d’eux. Lorsqu’un homme, sans être militaire, peut s’engager à aller au front, sachant qu’il peut ne pas survivre à ses audaces, c’est que la situation doit être suffisamment grave et sérieuse pour ne pas avoir d’autres choix.
Mais il y a à faire attention…
Déjà, aller au front suppose qu’on a des armes. Et ceux qui sont partis, et peut-être qui partiront demain, un autre jour, devront s’armer. S’ils en trouvent alors qu‘ils ne sont pas dans l’armée, il y a problème. L’Etat, peut-il gérer cette situation ? Il y a d’autant plus à s’en inquiéter que cela veut dire que les armes circulent et que n’importe qui pourrait s’en procurer. A la longue, si l’on ne fait pas attention, avec les relents communautaires des crises qu’on a en broderie autour de la question terroriste, l’on risque d’aller à des situations ingérables, trop qu’extrêmes. A terme, la région sera le « bordel au carré » que décrit l’enfant-héros d’Allah n’est pas obligé d’Ahmadou Kourouma.
L’Etat doit donc rapidement prendre ses responsabilités.
Il est vrai que le déplacement, presque sur le chaud de Bazoum Mohamed sur les lieux de drame pour apporter réconfort aux populations de Banibangou est à saluer car, jamais, en dix ans de gouvernance, son prédécesseur n’a eu un tel courage, oublieux de ses responsabilités de Chef suprême des armées. Le symbole est assez fort mais il doit vite décider de ce qu’il devra faire : gérer le pays en tant que Bazoum, un homme que d’aucuns disent intègre et pertinemment socialiste ou gouverner comme l’avatar de l’autre, pour souffrir de ne pas avancer et finalement, pour réveiller les colères qui couvent. Le calme précaire ne doit pas tromper. C’est un fait.
Par Waz-Za