La manifestation pacifique de rue n’est pas la seule forme de lutte citoyenne pour contraindre un pouvoir à revenir à de meilleurs sentiments. Les commerçants de Niamey l’ont démontré, mercredi 2 mars dernier, à travers la journée ‘’marché fermé’’ que leurs syndicats ont organisé pour marquer leur rejet de la facture certifié, du rehaussement de la taxe professionnelle et de patente synthétique ainsi que le problème de passavant auquel ils sont confrontés. Le gouvernement a désespérément tenté de faire échouer l’action, en dépêchant la veille de la journée ‘’marché fermé’’, soit le mardi 1er mars, le ministre du Commerce sur le terrain pour demander aux commerçants de boycotter le mot d’ordre. Le ministre Alkache Alhada accompagné pour la circonstance d’un groupe d’opérateurs économiques, militants du parti rose, a sillonné les principaux marchés de la capitale pour entretenir les commerçants sur le caractère infondé et inopportun du mouvement. Dans tous les marchés qu’il a eu à visiter, les gens l’ont écouté religieusement mais son message est entré dans une oreille pour en ressortir aussitôt dans l’autre. Le fiasco de l’action auquel ses accompagnants et lui s’attendaient n’a pas été au rendez- vous. Aucune fausse note dans le mouvement d’ensemble. Les commerçants de tous les marchés de Niamey et même ceux qui exercent leurs activités commerciales hors des marchés ont maintenu fermés leurs commerces toute la journée. De nombreux grands magasins implantés autour des marchés, des boutiques de quartiers, des étalagistes officiant aux alentours des centres de commerce, etc., ont répondu favorablement à l’appel de leurs syndicats. Au grand dam du ministre Alkache et les opérateurs économiques du PNDS Tarayya qui croyaient encore avoir une influence certaine sur les bases. C’est perdre de vue que lesdites bases ont compris leur jeu trouble. Ils ont compris qu’ils roulent pour leur parti au pouvoir au lieu de défendre les intérêts des commerçants qui croulent sous le poids des impôts et taxes divers ainsi que certaines nouvelles réformes à l’instar de cette affaire de facture certifié en application depuis septembre 2021. Pendant des mois, le gouvernement ne voulait même pas écouter leurs complaintes, à fortiori s’asseoir autour d’une table avec eux pour discuter. Devant le succès éclatant de la journée ‘’marché fermé’’ du mercredi 2 mars, la posture méprisante du pouvoir à leur égard a subitement changé. Le Premier ministre, Ouhoumoudou Mahamadou, s’est empressé d’appeler les responsables syndicaux du secteur pour une séance de discussions autour de leurs doléances, jeudi 4 mars, dans la salle des banquets de son cabinet. A l’issue des échanges, le PM a promis un examen minutieux par un comité technique, de tous les points débattus afin d’aplanir les divergences. Si le gouvernement est revenu à de meilleurs sentiments, ce n’est certainement pas de gaîté de coeur. Il a dû prendre la mesure de la grave crise financière à laquelle il s’exposerait en continuant de s’agripper à sa position. Lors de la seule journée sans marché à Niamey, Dieu seul sait combien l’Etat a perdu en termes de recettes fiscales. Si d’aventure les syndicats décidaient de reconduire mouvement en l’élargissant aux autres régions du pays, ça serait une catastrophe énorme pour les caisses de l’Etat. Il convient de noter que cette brouille entre les opérateurs économiques et l’Etat par rapport à l’instauration de la facture certifiée et la hausse de la taxe professionnelle et la patente synthétique intervient dans le contexte d’une flambée débridée de prix des produits alimentaires et non alimentaires.
Entre le marteau et l’enclume
Le gouvernement cherche à améliorer substantiellement ses recettes fiscales en exerçant une forte pression fiscale sur les opérateurs économiques pour parvenir à ses fins. Une activité commerciale s’exerce pour être rentabilisée. Avec la pandémie du Covid 19 qui a considérablement impacté de manière négative les échanges commerciales (augmentation des coûts de transport des marchandises), les mauvaises récoltes enregistrées à l’issue de la précédente campagne agricole, l’interdiction par certains pays voisins de l’exportation de vivres en direction de chez nous, etc., l’approvisionnement réguliers de nos marchés en produits alimentaires est devenu plus compliqué et onéreux. Conséquemment, les prix des denrées sont revus à la hausse par les commerçants. Le ministre du Commerce a récemment brandi ces arguments pour justifier cette situation difficile que les consommateurs endurent. Le phénomène a commencé à s’observer depuis l’apparition de la pandémie du Covid 19 pour prendre de l’ampleur progressivement. Présentement, très peu de denrées alimentaires sont épargnées, même parmi celles produites localement. Mais ce qui est surtout déroutant dans l’affaire, c’est cette augmentation quasi hebdomadaire des prix en détail. Le prix du litre d’huile végétale, par exemple, est passé de 900 francs il y a quelques semaines, à plus de 1300 francs aujourd’hui. La baguette de pain qui coûtait 200 francs pendant longtemps a grimpé à 250 voire 300 francs par endroits. Les prix du lait, du sucre, du riz importé, du mil, du maïs, du niébé, etc., connaissent le même renchérissement, alors même que le pouvoir d’achat des consommateurs n’a pas connu une quelconque amélioration. C’est bientôt le mois de jeûne de Ramadan, dans moins de quatre semaines. A l’allure où les prix grimpent, ça va être un mois très durs pour les populations. A moins évidemment que le gouvernement ne mettent en place un mécanisme de régulation des prix des produits de grande consommation d’ici là.
Tawèye