Le Niger et le Tchad, gendarmes de l’Europe commis pour le « fucken job » ?
Ayant pillé l’Afrique, après avoir assassiné ses élites et esclavagisé son peuple à travers la traite négrière et la colonisation, l’Europe demande aujourd’hui aux pays africains, en particulier le Niger et le Tchad qui figurent parmi les plus pauvres du monde, d’assurer leur sécurité. C’est le monde à l’envers où le riche, après avoir spolié le pauvre, demande à sa victime de le protéger, d’assurer sa sécurité pendant qu’il jouit tranquillement des fruits de l’exploitation du pauvre. Le Niger et le Tchad, gendarmes de l’Europe ? C’est nouveau et fantasque. En vérité, la France et les autres pays européens, qui accueillent des migrants, veulent tout simplement délocaliser au Niger et au Tchad les campements de migrants et d’autres refugiés qu’ils ont implantés dans leurs pays. Ces campements sont jugés indignes de l’Occident civilisé et repu. Ainsi, les hotspots, s’ils deviennent une réalité, vont constituer un réservoir de main d’oeuvre à bon marché pour les européens. Ils y viendront comme dans les anciens comptoirs d’esclaves au temps de la traite négrière, pour continuer leur sélection. En lieu et place de la belle dentition, une carrure forte, la jeunesse, la vigueur, on vérifiera plutôt le profil et les compétences acquises. Les plus chanceux seront les diplômés des écoles professionnelles, formés à grands frais par leurs pays d’origine, à qui sera probablement décerné le précieux papier de réfugié. Pour le reste, le Niger et le Tchad feront ce que les anglais appellent le « fucken job », le sale boulot. Ils vont gérer le reste sur leurs territoires, exposant les populations locales et même leurs pays à tous les risques éventuels. Heureusement que les fameux centres de réfugiés n’ont pas eu d’écho favorable au cours de cette rencontre, puisque les pays africains concernés ont d’abord demandé un financement pour la gestion et l’entretien de ces camps. Un financement que les européens ne sont pas prêts de donner directement à ceux qui en ont fait la demande. On peut aisément imaginer les raisons.

L’Afrique dans le rôle de mère porteuse et de gardien du troupeau
Pour Idris Déby du Tchad, cette idée de centre d’enregistrement des demandeurs d’asile installés en Afrique n’est pas la bienvenue. « Nous sommes contre ce projet qui risque de créer un appel d’air. Des milliers de candidats à l’immigration viendront chez nous », soutient son ministre des Affaires étrangères, Hissein Ibrahim. C’est, on ne peut plus clair. Pour des pays qui ont déjà du mal à assurer la sécurité de leurs frontières, abriter de tels centres est un très grand risque. La politique migratoire de Macron n’est pas plus différente de celle que préconisait Marine Le Pen. C’est la même politique de gestion excentrée de l’immigration que la candidate frontiste soutient. Pendant que l’Europe va contrôler sa démocratie, avec une population qui a du mal à se renouveler d’ailleurs, les africains, traités de prolifiques, produiront la main d’oeuvre qualifiée pour son économie. Le droit d’asile politique ou économique se fera en fonction de ses propres besoins. L’Afrique va ainsi jouer le rôle de mère porteuse et de gardien du troupeau. Et dans des cas pareils, c’est toujours le propriétaire qui jouira du lait et du beurre. Compte tenu de la vague de résistances que l’idée a suscitées en Afrique, au sein des populations, des ONG et de la société civile, on se demande si ces hotspots verront le jour. D’ores et déjà, les pays africains engagés aux côtés des occidentaux dans la lutte contre l’immigration en Europe sont fortement critiqués par les Africains qui leur reprochent de ne pas respecter les règlements des organisations africaines, notamment l’UA et la CEDEAO, qui consacrent la libre circulation des personnes et des biens dans l’espace commun.

La migration est un phénomène humain, nul ne peut y mettre fin. Peut-on même le maîtriser ? L’homme a toujours cherché des horizons meilleurs, en fuyant la pression climatique, la guerre, la famine, la tyrannie des gouvernants. C’est toujours la recherche d’un mieux vivre. Il en est ainsi depuis la sortie de l’homme de l’Afrique, il y a 40 000 ans. Enfin, parmi les responsables présents à ce sommet, nul n’a évoqué les causes du flux migratoire. Car il faut bien examiner les raisons des déplacements des hommes pour traiter le mal à la source. Les raisons des flux migratoires de ces dernières années résultent de l’appropriation par les puissances étrangères des ressources des pays pauvres, des guerres provoquées et menées par certaines puissances dans d’autres pays pour leurs propres intérêts et la mauvaise gouvernance par bien de dirigeants des pays pauvres. Jean Luc Mélenchon l’a maintes fois suggéré aux occidentaux. « Si vous ne voulez pas de migrants qui en réalité sont des réfugiés politiques et économiques, cessez de bombarder leurs pays ». Quant aux africains, surtout les dirigeants, ils doivent s’assumer en mettant en place de bonnes politiques d’emploi pour les jeunes et en respectant les règles de la bonne gouvernance politique et économique. Tout le reste, c’est de la théorie.

K.M

07 septembre 2017
Source : Le Courrier