D’abord, parce qu’il a réussi un hold-up électoral sans jamais faire face à une opposition véritable, ni au Niger ni à l’extérieur.
Ensuite, parce qu’il pense qu’avec le soutien ferme de Paris, notamment, il peut violer les lois de son pays, triturer les textes et imposer un processus électoral et une commission électorale qui feraient gagner l’homme de son choix.
Enfin, il est convaincu qu’en proclamant sa volonté de partir en 2021, conformément à l’obligation que lui en fait la constitution nigérienne, la France, notamment, lui laisserait carte blanche pour organiser les élections selon ses desiderata.
LE Niger et les Nigériens ? Ils n’ont jamais représenté grand-chose pour Mahamadou Issoufou. Il ne se préoccupe pas de penser à la façon dont ils pourraient réagir à une seconde usurpation de leurs suffrages. Il a pour cela la police, la garde nationale et la gendarmerie qui savent que tuer un manifestant désarmé n’est pas une source d’inquiétude puisque son auteur est couvert de l’onction politique. Autant dire que la police, la garde nationale et la gendarmerie ont eu, à ce propos, une prime d’encouragement à persévérer dans cette voie depuis qu’un gendarme a froidement tué l’étudiant Malla Bagalé sans jamais rendre gorge.
Le mois de Ramadan est une période de cessation des hostilités. Il est prévisible, avec la révélation des activités clandestines de la commission électorale de maître Souna qui a procédé à une commande d’actes d’État-civil, y compris des registres d’actes de décès, dans la plus grande discrétion, que l’on assistera à une levée de boucliers au lendemain de la fête. Les déclarations et les manifestations se succéderont et bien malin sera celui qui peut dire, aujourd’hui, de quoi demain sera fait. Mais une chose est sûre, les Nigériens ont acquis la certitude qu’il leur revient de se battre pour leur liberté et leur souveraineté.
Si Mahamadou Issoufou n’est pas prêt à finir comme Mamadou Tanja, il est toutefois déterminé à faire en sorte que son successeur soit un «gardien de la maison» ; un homme lié à son destin, c’est-à-dire qu’il aura à répondre de ses actes en cas d’alternance à la tête de l’Etat. Lorsqu’un homme est trempé dans une affaire de 200 milliards, il ne peut que partager l’idée de rester indéfiniment au pouvoir ou de le garder d’une façon ou d’une autre.
Lorsqu’un homme est impliqué dans la braderie des ressources pétrolières ou dans le gâchis de Gorou Banda, il ne peut qu’adhérer à l’idée de trouver un moyen d’empêcher l’alternance à la tête de l’État. Lorsqu’un homme a usé comme bon lui semble des ressources financières de l’ARTP, de la BAGRI, de la BIA, de la CAIMA, de la SOPAMIN ou encore des 1000 milliards d’Eximbank, des 50 milliards du Congo, de ces surfacturations aussi scandaleuses que méprisables, il ne peut que chercher à exposer le peuple à des périls en pensant pouvoir se tirer ainsi d’affaire. Mahamadou Issoufou n’est pas un démocrate. Il ne l’a pas été hier, il ne le sera sans doute jamais.
17 juin 2018
Source : Le Canard en Furie