Dans un poignant message de condoléances, intitulé « Mon hommage à Sasi, Saïdou Sidibé », notre soeur la Ministre Guimbiya a souligné, à juste raison que tu étais un « homme ouvert, affable, généreux, serviable, dévoué, loyal…un rassembleur » dont l’amitié « transcende le parti, les clans quels qu’ils soient ». On ne saurait mieux dire.
Ta rigueur, ton sérieux, ton expérience, que dis-je ? ton expertise, tes compétences étaient reconnus et unanimement appréciés. Mais aussi, ton humilité, ta modestie, ton élégance : ta camarade, ta collaboratrice la DIRCABA/PR, Hadizatou Yacouba, «Mme OG», l’illustre dans son message de condoléances en rapportant que, le 29 août 2018, à l’aéroport Diori Hamani, au départ du Président de la République pour la Chine, tu t’étais levé pour la saluer en disant « iiko, iko ! on ne salue pas le pouvoir assis ! ».
Une gouvernance exemplaire à la Cour des comptes
Monsieur le Premier Président, tes collaborateurs de la Cour des Comptes (qui, à ma connaissance, n’ont pas été mentionnés dans l’oraison funèbre), te pleurent. Ta gouvernance de l’institution les a impressionnés : ta simplicité, ton ouverture, tes sollicitudes à leur égard, ton allergie aux missions extérieures les a marqués. Les chantiers que tu as lancés –et qui faisaient l’objet de toutes tes préoccupations : réforme des textes de la Cour pour davantage sécuriser son personnel, règlement définitif de la question du nouveau siège de la Cour à la future cité judiciaire- seront assurément les priorités de ton successeur. Mais, rassures-toi, s’agissant des textes, pour concrétiser ton volontarisme à cet égard, le Ministre de la Justice, Garde des Sceaux, a pris l’engagement de mener très rapidement à terme cette réforme, conformément à tes vœux.
SASI, nous aussi, nous continuons à te pleurer : nous tes compagnons de l’Université de Dakar, tes camarades du parti, ceux de ta « fada », tes prédécesseurs et successeurs au Premier Ministère, au Ministère des Finances et à la Cour des comptes. A la morgue, au cimetière, ou à la fatihâ à ton domicile, ils étaient tous là, le banquier Gado Mahamadou, le philosophe Hama A. Souley, le Doyen Alkache Alhada, la Présidente Eliane Allagbada Jacob, les Ministres de toutes nos Républiques et de nos transitions : Wassalké Boukari, Badamassi Annou, Abdallah Boureïma, Moudi Mohamed, Ali Mahamane Lamine Zeine, Gilles Baillet, Massaoudou Hassoumi, etc. Ils étaient aussi présents tous les jours, tes amis de la « fada » du vendredi : le Haut-Commissaire Omar Saley, ton fidèle compagnon qui te promenait régulièrement dans Niamey et avec qui tu étais la veille de ta disparition, jusqu’à 23h30 ; Sa Majesté Alzouma, Chef du Canton de Liboré, le Président Omar Yayé, Dr Abdoulaye Barkiré, etc. et aussi le Recteur Habibou Abarchi, le Professeur Tidjani Alou, Dr Moha. Ils étaient enfin là, tes cousins, les frères Barkiré Halidou, tes « complices » de Niamey et de Dakar (en ce qui concerne Halidou « le grand »), aux côtés de ta veuve pour partager son immense, notre immense douleur
Un « sage » à l’Université de Dakar
SASI, tu es un ancien de Dakar, des promotions des années 1970. Tu étais arrivé à l’Université de Dakar –devenue Cheikh Anta Diop en février 1986- en octobre 1973, au nombre des tout premiers bacheliers du Collège Issa Béri, une année après nous.
Depuis lors, notre compagnonnage a commencé et s’est poursuivi jusqu’à la fin de nos études universitaires (et au-delà). Alors –pour nous limiter uniquement à l’ancienne Faculté des Sciences Juridiques & Economiques-, nous (les Oumaria dit Kalala l’industriel, Issakou Abdou Texas, Abdourahamane Hama Chancelier, Rabiou Nafiou, Oumarou Diambeidou, Youba Diallo, Maître Oumara Mamadou, Aïssa Abdoulaye Alfari, Zeïnabou Moussa Moudi, les soeurs Ramatou et Ouma Amadou Kountché, etc.) en droit et vous (les Mamane Gaoh, Francis Mody, Ousmane Oumarou Rousseau, Mamane Amadou Namadi, Halidou Barkiré, Saidou Mamane Mister Baker, etc.) en économie & gestion, avions cheminé dans le cadre convivial de l’USND (Union des Scolaires Nigériens, Section de Dakar). Tu avais, à l’époque, toujours amené ta pondération dans nos débats passionnés de révolutionnaires désireux de changer le monde. C’était la période de la guerre en Angola, où mon ami l’Ambassadeur Alat Mogaskia, sans doute le plus révolutionnaires d’entre nous, animait véritablement nos débats. Dans le contexte tourmenté et survolté d’alors, marqué par notre impatience, notre intransigeance et notre fougue d’étudiants sinon radicaux, à tout le moins progressistes, tu apportais toujours ta touche de sagesse, à l’image de notre doyen Youba Mamadou Diallo.
Depuis notre entrée dans la production, comme l’on disait à l’époque, nous ne nous voyions pas beaucoup, mais l’amitié, la confiance mutuelle et la considération réciproque étaient restées intactes et solides, transcendant nos affiliations partisanes au MNSD-Nassara (dont je suis un membre fondateur) et au PNDS-Tarayya (dont tu étais également un membre fondateur). Nous nous rencontrions généralement aux cérémonies de baptêmes, mariages et décès, où nous nous demandions mutuellement les nouvelles de notre ami commun, le Professeur Amadou Tankoano, un de tes amis d’enfance, que tu ne voyais pas souvent, à cause de ses déplacements à l’extérieur.
Un grand expert dans les domaines de l’économie et des finances
SASI, tu as toujours été au service des autres, avec un extraordinaire sens de l’écoute, constamment disponible. Je me souviens, quand j’étais Ministre de la Justice en 2007-2008, t’avoir sollicité à deux reprises, pour m’abreuver aux sources inépuisables de ton expertise avérée en matière économique et financière :
- d’abord, pour animer une conférence aux étudiants du Département d’histoire de la Faculté des Lettres & Sciences Humaines de l’Université Abdou Moumouni, à la demande du Professeur Idrissa Kimba ;
- ensuite, pour m’éclairer sur les mécanismes de la constitution du capital d’une banque donnée.
SASI, tu laisses, dans nos rangs et au niveau de l’Etat, le même vide que notre frère, ami et camarade Badroum Mouddour Zakara, quand il nous a quittés prématurément, lui aussi.
Que la terre africaine du Sahel nigérien te soit légère et que Dieu t’accueille dans Son Paradis éternel, où, selon ton expression favorite, tu vas déblayer le terrain pour nous!
AMEN !
Par Mamadou Dagra, enseignant-chercheur à l’Université Abdou Moumouni
07 septembre 2018
Source : http://lesahel.org/