particulièrement le quartier Koira Tégui, avec tous tre- ville à la recherche de l'aumône. Ces guides mendiants constituent de véritables sources de revenus à leurs parents, comme le cas de Nana Miriam une jeune fille que nous avons rencontrée à Niamey " ça fait deux ans que j'ai été déscolarisée, par mes parents et confiée à cette femme non voyante pour la guider à raison de 1000 à 1500 FCFA par jour, qu'elle verse à mes parents pour entretenir ma famille ", nous dit la petite fille. Certains guides mendiants travaillent pour leur propre compte, à l'insu des parents et exigent plus d'argent, à l'exemple de Badara, un petit garçon d'une dizaine d'années servant de guide à un non voyant que nous avons rencontré au quartier Koira Tégui " Depuis que ce non voyant m'a proposé de le guider en échange de 2000 FCFA jour, j'ai cessé d'aller à l'école et cela à l'insu de mes parents, parce que je peux payer tout ce dont j'ai besoin. Chaque matin, je dépose mon sac chez lui et nous contournons mes parents pour nous rendre au centre-ville ", nous explique -t-il. Pour certains parents, le protocole s'étend au partage équitable de la recette journalière. C'est la condition siné quanon pour livrer leurs enfants. Ce type d'accord, Bozari le père d'un guide que nous avons rencontré à Koira Tégui l'a bien compris : " moi, j'exige la moitié des revenus et c'est à prendre ou à laisser parce que mon enfant peut tomber malade ou avoir un accident, c'est moi qui doit le traiter", affirme ce dernier. Cet état de fait se retrouve aussi dans d'autres pays africains comme l'Algérie, le Nigéria, la Côte d'Ivoire et le Bénin pour ne citer que ceux-là. Il y a des parents qui sont aptes à donner leurs enfants à des non-voyants pour les accompagner dans d'autres pays. Et cela malgré tous les risques auxquels ces enfants feront face au cours du voyage et même dans leurs pays d'accueil. Selon Sidikou Moussa président de la Coalition des organisations Nigériennes des Droits des enfants, plus de 50% des mendiants que vous voyez dans les pays limitrophes, viennent du Niger.

Il arrive même que des guides mendiants se retrouvent dans un pays comme le Gabon avec le consentement des parents, sur la base d'un contrat qui lie les parents des guides aux mendiants. Des fois ces guides sont expatriés par des structures en charge des questions de l'enfance. C'est dans ce sens que le cas d'un guide mendiant trouvé à Port-Gentil, la deuxième ville du Gabon, géré par le responsable de CONIDE- Niger est illustratif à plus d'un titre : " L'enfant vivait à Tahoua, il a été déscolarisé et a été sous-traité par son père qui est un commerçant au marché de Katako. Cet enfant a été retrouvé à Port-Gentil, par l'Agence de Lutte Contre la Traite des Personnes gabonaise à travers l'UNICEF Niger. Ils ont pu mettre l'enfant à notre disposition quand nous avons convoqué son père dans nos locaux, sa première attente était d'avoir l'argent du contrat signé entre lui et le mendiant. Nous lui avons dit que nous n'avons pas reçu l'argent qui est de 50000FCFA par mois. Après, l'affaire a été transmise au niveau du commissariat central de Niamey. L'enfant a été ramené dans son village et scolarisé. ", Nous a expliqué Sidikou Moussa.

L'islam, la religion dominante dans notre pays condamne l'exploitation économique des enfants. Selon Oustaz Moustapha responsable de l'Association Islamique Foziya " notre religion est contre la mendicité. De même l'enfant est un don de Dieu, nous devons lui garantir une éducation de qualité et une vie décente. "

Le phénomène de guide mendiant a atteint aujourd'hui le point culminant. Cette question nécessite que les responsables qui ont en charge le dossier des enfants s'y attardent. Pour mettre fin à ce fléau, Oustaz Moustapha propose aux autorités de s'inspirer de l'exemple du Nigéria où les mendiants sont logés dans des centres, où ils vivent en secret et dans la plus grande dignité et ceux qui veulent faire de l'aumône doivent se déplacer pour les trouver. Les forces de défense et de sécurité doivent multiplier d'efforts en vue de mettre fin à la mobilité des guides mendiants surtout de freiner leur passage au niveau des frontières. Les auteurs de ces actes ne doivent pas rester impunis. Pour le responsable de CONIDE - Niger " nos autorités ne doivent plus accepter que sous la bannière de la mendicité des personnes porteuses d'handicap puissent sacrifier les enfants dont la place est à l'école ou à la formation professionnelle. ", il va plus loin en disant que " les autorités doivent mettre l'accent sur cette question pour améliorer l'indice de développement humain ".

Balkissa Hamidou

27 mars 2017
Source : La Nation