En avançant plus loin sur le site, on appréhende la réalité de cette fameuse ruée vers l’or. En effet, des hommes se sont introduits dans des trous de plusieurs mètres de profondeur, prenant des bains de sueur, se relayant sous un soleil de plomb et une température de 45°C, pioches à la main pour certains, et des pelles pour d’autres. Ils ne cessent de creuser des trous dont la profondeur varie de 1 à 3 mètres. Le sable extrait est soigneusement versé dans des sacs de riz usagés. Certains groupes ont érigé leurs sites de recherche d’or un peu plus haut sur le plateau. Là-bas, les trous creusés pour extraire l’or sont encore plus profonds.  

Dès que nous avons tendu notre micro à un des orpailleurs, en moins de quelques minutes, nous avons été entourés par plusieurs dizaines d’hommes et de femmes prêts à témoigner. Pas de crainte ni de panique, car les Forces de l’ordre ont été déployées sur les lieux. En plus, une ambulance est stationnée en permanence dans l’éventualité de secourir les individus sujets à des malaises dans cet environnement aride et hostile. Tout le monde veut parler. Chacun veut savoir. Dans le brouhaha de la foule, certains nous confient que l’engouement et l’espoir de trouver de l’or à Tanda-Boundou a radicalement baissé, et que plusieurs centaines d’aventuriers sont déjà repartis vaquer à d’autres occupations. D’ailleurs, quelques dizaines de personnes ont évoqué la possibilité de quitter les lieux dans les heures qui suivent, après avoir déjà passé trois nuits à la belle étoile.

‘’Moi, je creuse. Et je vois des signes qui me montrent qu’il y a de l’or enfoui dans les profondeurs. Les gens sont en train de nous décourager. Qu’ils nous laissent tranquilles!... Si Dieu nous donne la chance, on va trouver de l’or ici’’, lance un jeune homme de 25 ans, venu du quartier Aéroport, et qui s'adonnait auparavant à la conduite de ‘’mototaxis’’.

La veuve sexagénaire, Mme Aïssa Oumarou, venue du village de Kiki dans la commune de Torodi, exprime, quant à elle, son doute sur une éventuelle présence d’un gisement d’or en ces lieux. Elle indique que si quelqu’un avait vu de l’or à Tanda-Boundou, il allait sans nul doute le montrer à une personne qu’il connait, qui à son tour le dira à une autre. Malheureusement, tel n’est pas le cas, ajoute-t-elle. ‘’Il y a quelques jours de cela, vers chez moi, un enfant de Makalondi est venu dire qu’il a trouvé de l’or. Cette rumeur a circulé, et la population a souffert, creusant pendant environ quatre jours, avant de se rendre compte que c’était une fausse information’’, explique la sexagénaire.

La ruée de ces milliers d’hommes et de femmes vers le village de Tanda-Boundou démontre l’espoir des fils et des filles du pays, et leur courage à travailler dignement pour combattre la pauvreté. Pour le cas précis de Mme Aïssa Oumarou, qui se débrouille dans la vente de repas, ses enfants ont été obligés d’aller en exode au Ghana pour gagner leur pain. Elle précise être venue à Tanda-Boundou en espérant vendre des repas aux orpailleurs, mais qu’elle reste à présent amère et désenchantée.

En effet, aucun des orpailleurs présents sur les lieux ne nous a montré le métal précieux. A la question de savoir si les jours et les heures précédant notre arrivée, l’un d’entre eux a réellement vu une pépite d’or extraite du sol de Tanda-Boundou, tous ont répondu non. Mais ils affirment avoir entendu qu’un ou deux individus ont trouvé des pépites tout en affirmant n’avoir jamais vu ces personnes.

Une bonne affaire pour les locateurs d’appareils de détection de métaux

Pour Mme Hadi Maïdagi, il est temps que le Gouvernement prenne des dispositions pour sécuriser ses citoyens en analysant le sous-sol pour savoir s’il y a or ou pas. Car, actuellement, des individus disposant d’accessoires de recherche d’or exploitent la misère des pauvres. Les détecteurs de métaux sont loués à cinq mille (5 000) Francs CFA, voire dix mille (10 000) Francs CFA. ‘’Ces jeunes sont venus tenter leur chance et gagner dignement leur vie. Sur ce site, ils s’investissent corps et âme pour travailler. Ils sont prêts à creuser des trous de 500 mètres’’.

D’autres sont venus de Zinder, d’Agadez, de Doutchi, de Tahoua, et même de certains pays de la sous-région. ‘’Si certains ont abandonné leurs petites activités génératrices de revenus pour devenir orpailleurs, d’autres ne cherchent qu’un travail pour subvenir à leurs besoins, autrement dit, ils sont confrontés au chômage. Ici, démontrent qu’ils peuvent travailler, qu’ils ont l’espoir de gagner honnêtement leur vie au Niger et contribuer à la construction de leur pays. Aussi, s’il n’y a pas d’or ici, le Gouvernement doit nous le dire. On veut également que ces jeunes, qui ont souffert pour rien ici, puissent trouver un emploi’’, a-t-elle ajouté.

Aujourd’hui, la question qui se pose est celle de savoir ce qui est à la base de ce phénomène de ruée vers l’or. Il y à peine deux (2) semaines de cela, il y a eu un précédent dans la région de Zinder, et qui a finalement été démenti. Si certains croient mordicus à la richesse du sous-sol nigérien en abandonnant travail régulier et activités domestiques pour rapidement se diriger sur tous les sites où on annonce prétendument une quelconque présence d’or, d’autres y voient une occasion pour vendre des accessoires d’orpaillage. Un de nos interlocuteurs pense que c’est une naïveté des populations de vouloir s’enrichir rapidement, sans fournir un effort régulier, sur la base d’un travail. Mais d’autres voient là le signe du désœuvrement d’une population en quête d’emploi.

Samira Sabou (ONEP)

28 avril 2017
Source : http://lesahel.org/