La situation de Moussa Moumouni Djermakoye est pathétique. Ancien officier de l’armée nigérienne crédité – manifestement à tort – d’une réputation d’homme intègre, l’homme a tellement déçu qu’il est l’objet d’attaques frontales de la part de militants en vue de l’Andp Zaman-Lahiya. La critique acerbe de Salifou Mayaki contre sa présidence, réduite à un vulgaire marchandage de poste contre argent, en témoigne suffisamment. N’ayant jamais, dit-on, fait la moindre tournée à l’intérieur du pays, y compris dans la région considérée jadis comme le bastion du parti, Moussa a pratiquement transformé l’Andp Zaman Lahiyaen machin pour le PndsTarayya, poussant le zèle à servir Mahamadou Issoufou jusqu’à refuser, à la demande de celui-ci, de présenter sa candidature à l’élection présidentielle de 2016 et de battre plutôt campagne pour celui-ci. Une première dans la vie du parti. Pire, il est devenu, dit-on, le chaussepied des maîtres de Niamey, incapable de hausser le ton même lorsqu’il lui est manqué de respect. Aurait-il quelque chose aussi à se reprocher ? Rien ne l’exclue. Avec la pléthore de conseillers qu’il a nommés au CESOC [ndlr : Conseil économique, social et culturel], avec, parfois des dépassements budgétaires, il y a de quoi se tenir à carreauLe cas de Ladan Hamidou Tchiana est tout simplement dramatique. Militant bien placé dans les instances d’un parti [ndlr : Moden Fa Lumana Africa] où il était presque adulé, il a cru pouvoir construire son avenir politique, non pas à l’ombre d’un homme [ndlr : Hama Amadou] dont il a tout à gagner, mais dans une entreprise de sape au profit de l’adversaire. Mal lui en a pris. Il se retrouve dans une position et un rôle de faire-valoir où, entre les minutes de discussions signées par Hassoumi Massoudou pendant qu’il se promenait, au même moment, dans les rues de Paris, et la révocation d’Assane Saïdou, ancien président du Conseil de ville de Niamey, Tchiana ne sait plus à quel saint se vouer. Faut-il dire M… et se retrouver dans la M… ou faut-il continuer à subir, la tête basse, le dos courbé, exténué par les conséquences de ses actes irréfléchis ? Le 9 août 2017 encore, à l’occasion du deuxième anniversaire de la création d’Amin-Amen, son parti, l’homme a laissé transparaître le drame intérieur qui le ronge. Il a dénoncé l’antijeu dont lui et son parti sont l’objet de la part du PndsTarayya sans toutefois avoir le courage de dire clairement l’origine de la tragédie de son parti. Aujourd’hui, l’essentiel n’est plus pour lui de faire prospérer son parti dont les conseillers les plus en vue [ndlr : ceux de Kollo]l’ont quitté pour le Pnds-Tarayya, mais d’éviter la prison pour certains de ses lieutenants tel que Assane Saïdou ; un Assane Saïdou que des voix officielles ont accusé d’avoir fait main basse sur plus de trois milliards de francs CFA. Une perspective sombre qui est synonyme de naufrage politique pour lui et pour son parti.
Si la préoccupation du moment de Seïni Oumarou est de manger, celle de Ladan Tchiana, d’éviter le naufrage total, Abdou Labo, lui, n’a d’autre objectif que de regagner sa liberté. Emprisonné dans une sordide affaire où ils ont été condamnés sans la moindre preuve étayant les accusations portées contre eux, Abdou Labo s’est âprement battu pour confisquer la Cds Rahama, son parti, à Mahamane Ousmane. Avec l’appui de certains présidents régionaux du parti, il a gagné son bras de fer avec Mahamane Ousmane, mais s’est retrouvé dépourvu des réelles capacités qu’il faut à un leader politique. Non seulement il a ruiné le bel héritage politique des verts, mais il est devenu un simple pantin entre les mains de Mahamadou Issoufou qui lui a d’abord fait miroiter des vessies avant de l’assommer. S’il ressort de prison, il n’aura plus, ni la crédibilité politique pour entraîner du monde derrière lui, ni le soutien de ses anciens lieutenants dans la guerre contre Mahamane Ousmane, certains, comme Ary Ibrahim, l’ayant simplement abandonné pour adhérer au PndsTarayya et sauver leur pain.
Quant à Cheffou Amadou, il a été victime d’un vieux jeu duquel il n’a tiré, jusqu’ici, que du bonheur. Il souffre de ses inconséquences politiques, son parti, le Rsd Gaskiya, n’étant plus que l’ombre de son nom. Premier ministre de la Transition d’après la Conférence nationale souveraine, Cheffou Amadou est aujourd’hui député à l’Assemblée nationale, noyé dans un flot rose où il fait de la figuration. Malgré son passé glorieux, qu’il soit présent ou absent, ça ne se remarque pas et ceux qui sont à la tête de l’Assemblée nationale ont plutôt la tête ailleurs que de se préoccuper de son cas. Car, lorsqu’on a déjà pris goût à prendre indûment de l’argent des caisses de l’État [ndlr : les indemnités de départ illégales de Ousseïni Tinni et d’Iro Sani], on ne peut avoir de la considération pour l’expertise et l’expérience dans la gestion des affaires publiques. Si Cheffou a fait preuve de courage, le seul d’ailleurs, en posant sa candidature là où d’anciens soldats devenus leaders politiques se sont effacés comme de vulgaires porteurs de serviettes, il reste qu’il demeure aussi prisonnier de son alliance avec Mahamadou Issoufou. Aurait-il touché à ce qui ne lui appartient pas ou a-t-il juste besoin de manger ?
Que dire d’un Mahamane Hamissou qui a fait tant de boucans autour de lui, suscitant même beaucoup d’espoir chez les jeunes, avant de sombrer, pris aussi dans la nasse de l’appétit inconsidéré. Depuis lors, il rase les murs, complètement malade d’avoir cédé aux sirènes de la facilité et du gain immédiat. Il est bien conseiller à la Présidence mais il n’en est pas fier. Et s’il fait la gueule de temps à autre, c’est juste pour rappeler qu’il vit toujours, dans le secret espoir de regagner ce qu’il sait parfaitement avoir perdu depuis longtemps. Définitivement !
C’est ce comportement, peu honorable, des leaders politiques, qui explique le drame actuel du Niger. Leur alliance avec Mahamadou Issoufou ne repose que sur des intérêts pécuniaires pour eux-mêmes. Autrement, un SeIni Oumarou ne le soutiendrait pas dans la mesure où aucun fait ou acte positif n’est venu entre-temps changer le cours des choses qu’il a régulièrement dénoncées et critiquées avec véhémence. Et ceux qui étaient avec Mahamadou Issoufoudepuis longtemps l’auraient sans doute quitté. Car, si l’objectif était de concourir au bien du Niger et des Nigériens, Mahamadou Issoufou ne pourrait se prévaloir d’un bilan qui explique et justifie ce soutien. La vérité est amère, mais elle est là : ils ne le font pas pour le Niger mais pour eux-mêmes.
Malami Boucar
23 août 2017
Source : Le Monde d'Aujourd'hui