Personne ne peut arrêter le train de Bazoum dans sa course pour la présidentielle de 2020-2021, rassuré qu’est l’intéressé, ainsi qu’il l’a dit et ce malgré toute l’indignation que sa campagne électorale avant l’heure a provoquée au sein de l’opinion, que rien et personne ne peut l’empêcher de la poursuivre. Comme beaucoup de gens s’en doutent, le sieur Bazoum serait au-dessus des lois du pays qui ne peuvent s’imposer qu’aux seuls Nigériens de seconde zone. Comme si le destin le surprenait, le président du Pnds-Tarayya, depuis que le président sortant lui fit la faveur d’être le candidat du parti, non sans provoquer des frictions au sein du parti, s’agite, incontrôlable, allant dans tous les sens, et ne pouvant garder son calme pour aller dans la lutte politique, plus sereinement. Comme quoi, le pouvoir affole surtout que de loin l’on peut percevoir ses mirages. Alors qu’il pouvait croire que la faveur qu’il avait lui donnait plus qu’un autre des chances et une assurance pour occuper le fauteuil présidentiel, le voilà depuis quelques jours qui voit ses rêves se briser, ses espoirs fondre, comme beurre au soleil.

Tout le monde savait que les choses ne pouvaient pas être faciles pour le candidat Bazoum même si aujourd’hui cette histoire de l’article 47 soulevée au sein de son parti, se dissipe quelque peu, mais sans que rien ne puisse rassurer que la question ne rebondira pas. Mais il y a des raisons plus objectives qui militent en défaveur de son sacre. Il y a d’abord l’image que l’homme a laissée de sa personnalité depuis des années qu’il agit sur la scène politique avec d’abord une parole politique, un discours public qui manque de finesse au point où, chaque fois qu’il intervient, il ne manque pas de faire des gaffes qui ont gravement galvauder son image d’homme public. Mais il y a davantage. En effet, c’est déjà dans le parti que sa candidature divise depuis qu’avec Hassoumi Massaoudou, la rivalité avait été tranchée dans la passion et une émotivité mal maitrisée pour brutaliser un homme, et avec lui, tous ceux qui sont avec lui est ils sont nombreux – dans le parti, qui se retrouvaient à travers son leadership, mais surtout reconnaissant pour avoir beaucoup mouillé le maillot, même si ce n’est pas toujours par le bien. Depuis l’incident, le parti est traversé par quelques douleurs, quelques rancoeurs, quelques incompréhensions qui ne sont pas prêtes de s’estomper, tant elles restent vives et graves.

Pire, dans un pays où, sans alliance, aucun parti ne peut seul gagner des élections, il se trouve que le candidat du pouvoir, n’est pas en bon terme avec les leaders politiques en présence car, jamais il n’a su ménager ses relations avec les autres pour lesquels, il n’a jamais rien exprimé que du mépris. Il n’y a pas un seul parti politique qui soit en bon terme avec lui. On se rappelle que, gobant mal qu’un pôle du pouvoir ait manoeuvré par-dessus de sa tête, lui président du parti, à faire venir certains partis politiques dans le pouvoir pour rassurer un président qui avait conscience des fragilité de son pouvoir, Bazoum n’a jamais su cacher à Seïni Oumarou et aux autres son dépit, leur expliquant que s’ils sont venus avec eux, eux ne seraient jamais partis pour les chercher. Leur ralliement au pouvoir, pouvait-il se moquer, n’est que la preuve de leur incapacité à assumer l’opposition et à pouvoir résister à la tentation du pouvoir et à supporter des années de traversée du désert, toute chose qu’ils auraient, eux, pu faire, sans jamais renoncer à l’opposition et ce malgré le fait que maintes fois, Tandja leur tendait une main pour rentrer dans son gouvernement. Alors que l’heure est venue pour lui de fédérer des forces politiques autour de sa candidature handicapée, le voilà qui ne peut compter que sur quelques microscopiques partis politiques qui n’ont aucune envergure nationale et ce à un moment où son monde s’effondre avec un empire rose qui s’écroule sous ses pieds, incapable d’arrêter l’hémorragie. Comme on peut l’imaginer, le candidat Bazoum, depuis des jours, comme s’il devrait être au coeur d’un complot, a du souci à se faire. Comment peut-il s’en sortir quand il ne peut même pas compter sur son propre parti aujourd’hui déchiré ? Et la situation ne fait que se compliquer de jour en jour avec de nouvelles défections qui témoignent de ce que sa candidature ne fait pas l’unanimité et que peut-être, Hassoumi Massaoudou n’avait pas tort de se poser en alternative pour le parti.

La guerre fratricide a laissé de graves séquelles dans le parti, même jouant sur une réconciliation de façade, pour vouloir faire croire que le parti retrouvait sa sérénité et que «tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles». Le mal était profond, insondable. On se rappelle d’ailleurs que Tahoua surtout – seul fief d’ailleurs du parti – se démarquait de cette candidature avec une désapprobation que le président Issoufou tentait de contenir en s’impliquant dans la dispute. Ainsi, il préféra l’un pour l’autre, et refuse qu’une démocratie interne règle le différend pour que le parti n’en soit pas trop affecté. Comment un candidat qui n’a aucun ancrage électoral même dans ce qui serait sa région natale, peut-il porter un projet présidentiel surtout lorsque le fief reconnu du parti en vient à bouder sa candidature ? On voit bien que la médiation du président sortant ne lui aura été d’aucun secours quand on voit la cascade de démission du parti depuis des jours et cela n’a pas l’air de s’arrêter. Les prochains jours pourraient révéler toute l’ampleur du séisme qui prend racine sous ses pieds pour faire sombrer tout le projet pour lequel, selon certaines indiscrétions, il aura déjà mobilisé de gros sous. Peut-il oublier qu’il est dans une entreprise dans laquelle l’argent a peu de mystères à produire parce qu’il s’agit, quand même, de conquérir les coeurs des hommes ?

Des départs qui intriguent…

Pourquoi donc certains militants, et non des moindres, ont-ils choisi de quitter le parti, pour refuser implicitement, de soutenir le candidat officiel du parti ? Est-ce parce que, comme à l’endroit des autres candidats, le candidat en question, n’aura exprimé pour ses camarades aussi que du mépris ? Lorsque le bal commence avec Tahoua, bien d’observateurs se posent mille et une questions quant aux motivations profondes de cette débandade dans le parti avec de grands militants qui choisissent ce moment pour abandonner le candidat du parti ? Le départ de Idi Ango Ousmane, l’ancien DG de la SONIDEP, du président du Conseil de ville de Tahoua, Abdoul-Raouf Dodo, de Djabiri Hassimi, ancien député national et ancien gouverneur de Tillabéri n’a rien de rassurant surtout quand on sait la proximité de certains et notamment de l’ancien DG qui, même en quittant le parti, prétend qu’il serait toujours avec le président Issoufou auquel il serait redevable et reconnaissant. Qu’est-ce que cela peut-il cacher ? Quand on lit bien ces événements, l’on peut bien comprendre que d’autres dans les prochains semaines, voire dans les prochaines jours finiront par sortir de l’ombre pour annoncer, eux aussi, leur départ du parti. Mais, au stade actuel, il est difficile d’avoir une lecture précise de ce qui se passe au Pnds et dans le pouvoir. On sait seulement que ça ne va pas et que le candidat engagé dans la course ne rassure pas et ne rassemble pas. C’est tragique.

Énigme…

Jusqu’ici, ceux qui partent, ne se sont pas encore prononcé pour dire le choix politique pour lequel ils quittaient le PNDS et son candidat. Le font-ils pour un parti en gestation et pour quel candidat ?

Le font-ils pour Salou Djibo dont on disait qu’un deal le lierait avec Issoufou Mahamadou, et ce même si le leader de Malbaza dément la rumeur qui le donnait partant pour le compte du parti Doubara ? Le font-ils pour une éventuelle continuation, un Tazartché quand on sait que depuis des semaines, la mode du troisième mandat revient dans la sous-région et surtout que pour le cas du Niger, avec l’insécurité, les incertitudes sur les élections, quelques malins esprits pourraient faire cet appel du pied pour demander à un président sortant de rester afin de consolider les acquis et sauver un pays au bord de l’éclatement ? Peuvent-ils le faire pour un autre leader tapis dans l’ombre par la volonté de partenaires qui pourraient juger des fragilités du pays qui fait face à de multiples défis pour vouloir qu’un choix de raison soit fait pour sauver le pays d’une probable débâcle ? Time will tel…

En tout cas, quand on écoute les discours politiques de ces derniers jours, et même dans l’intervention de Hassoumi Massaoudou au congrès de MPR Jamhuriya, l’on peut entendre une parole mûre qui interpelle les consciences pour montrer d’une part que le combat actuel n’est pas que celui d’une opposition et qu’il s’agit désormais de sauver un pays non un système ou un héritier imposé surtout que celui-ci qui est appelé à le perpétuer est aussi malhabile en politique. Rater le bon choix pourrait conduire loin ce pays qui a perdu confiance en une classe politique qui a encore à convaincre quant à ses capacités à transcender ses divergences et les clivages pour s’atteler à rebâtir un pays qui va mal, très mal. Ces échangeurs et ces hôtels de luxe ne doivent tromper personne. Ce ne sont pas des priorités pour le pays. Ils sont loin de donner une image vraie de ce pays. Quand on peut voir la mobilisation autour de partis de l’opposition, avec Amen- Amine, avec Kiishin Kassa, avec RDR Tchanji, avec le Moden Fa Lumana, il est clair qu’on peut comprendre la profondeur et la réalité des malaises qui traversent le pays. Qui n’a pas été frappé par cette vivre approbation des congressistes du MPR du samedi dernier quand, intervenant, Ibrahim Yacoubou disait : «Les femmes sont marginalisées, les jeunes n’ont pas d’emploi» ? Ils étaient nombreux à se retrouver dans ces propos et cela, en principe, pouvait aider le régime à comprendre le peu de crédit dont il peut jouir aujourd’hui au sein d’une opinion nationale dégoûtée d’un socialisme qui n’a fait qu’enrichir une clinque au détriment d’un peuple laissé sur les bords de a route, misérable.

Ce regard critique sur l’aventure du candidat du Pnds montre à quel point les choses s’annoncent difficiles pour Bazoum et la situation ne peut se dégrader pour lui, surtout quand on sait la détermination d’une opposition condamnée à jouer son va-tout pour sa survie politique et surtout le fait que, par des élections qui ne rassurent pas, demain, d’autres formations politiques pourraient regagner l’opposition. Pourquoi, devraient-ils rester quand des pans entiers du parti sont en train de quitter le parti et son candidat ? Cette situation, comme on peut le comprendre, ne peut que pousser d’autres partis politiques, à abandonner un navire qui prend de l’eau de toute part, condamné au naufrage.

C’est un crash tragique d’une ambition politique en déphasage avec les aspirations du peuple.

A.I