Un autre pan de ce dossier, « Des End-User (Ndlr : certificat de l’utilisateur final) ont été délivrés pêle-mêle et cela présente un risque énorme en ce sens que du matériel pourrait être livré à un autre destinataire en dehors de l’Etat du Niger », s’inquiètent les enquêteurs. En guise d’illustrations, un End-User N°0032/EMAA/CAB, en date du 19 février 2018 (voir fac-similé), pour l’acquisition des canons d’aviation, d’armes collectives et calibres 12,7mn et de 916 missiles S8 non guidés a été octroyé. L’importateur du matériel est la société ARMEXIM TECHNOLOGIES LIMITED, Limassol Chypre, une société en zone franche n’ayant jamais contractéavecl’ÉtatduNiger. Ilenestdemême du End-User N°0159/EMAA/CAB du 19 décembre 2017.
La fuite en avant de quelques personnalités centrales de l’affaire
Selon les informations en notre possession, la création de ces sociétés fictives en zone franche serait l’œuvre de plusieurs acteurs clé du pouvoir à Niamey. Parmi ceux-ci, l’on cite notamment l’ancien ministre de la Défense Karidjo Mahamadou, qui serait passé par Abdourahaman Manzo, un militant du parti au pouvoir domicilié à Bruxelles ; le Directeur de Cabinet du président de la République Ouhoumoudou Mahamadou ; le Général Ibrahim Wally Karingama ; et Aboubacar Hima Massi dit « petit Boubé ».
Contacté par nos soins, Abdourahaman Manzo révèle que « l’armée nigérienne manque de matériel adéquat et que le budget de la Défense est utilisé pour enrichir les gens du système ». Il soutient « n’avoir jamais bénéficié » d’une quelconque « forme de favoritisme du système ». Sollicité par ICIJ [Consortium international des journalistes d’investigation], le ministre Karidjo Mahamadou, répondant lui-même au téléphone, dit : « Non, ce n’est pas Karidjo qui est au bout du fil. Je suis un de ses amis et je lui transmettrai les préoccupations de ICIJ ».
Quant à Ouhoumoudou Mahamadou, il a déclaré ne pas être en mesure de se prononcer sur ce dossier avant de nous raccrocher au nez. Pour sa part, le général Karingama a prétexté « s’amuser avec ses enfants » pour ne pas répondre aux sollicitations de ICIJ. Nous avons également durant toute l’enquête, essayé de contacter au téléphone Aboubacar Hima Massi dit «petit Boubé» en appelant sur ses six (6) numéros, mais il n’a jamais daigné décrocher nos appels.
Source : Journal Évènement