Réponses à Mohamed Bazoum :  Le toit sous lequel vous vous êtes si confortablement installés à partir de 2011 a été construit avec abnégation par Hama Amadou

En 2017, le Sahel Dimanche a publié une interview de Mohamed Bazoum. Truffée de mauvaise foi et de contrevérités manifestes sur les réalités et les performances des régimes de la 5e et de la 7e Républiques, l’interview de Mohamed Bazoum a appelé de la part de Modi Alzouma, militant du Moden Fa Lumana Africa, des réponses percutantes, l’intéressé s’étant appuyé sur la sagesse populaire bien nigérienne qui enseigne que même les fous méritent parfois des réponses. Le Canard propose, à nouveau, à votre lecture, ces réponses cinglantes qui se passent de commentaire. Lisez plutôt.

À propos d’Amadou Ali Djibo dit Max dont vous avez rappelé le passé de président de COSIMBA, je dois rappeler à votre bon souvenir que l’homme a servi Ibrahim Maïnassara Baré avec loyauté et sincérité et que c’est la raison pour laquelle on ne l’a pas retrouvé parmi ceux qui ont accompagné un brin le Général-Président en pensant qu’il va leur faire un boulevard comme cela s’est passé en 2010. Et si même l’on admet que Max est de ceux qui ont trompé le Président Baré avec le COSIMBA, il ne fait pas toutefois partie de ceux qui l’ont fait tuer.

Venons-en aux aspects sur lesquels Bazoum s’est étendu, croyant avoir des arguments à brandir. D’abord une mise au point : personne n’instrumentalise qui que ce soit. Ce qui se passe sur le terrain social est la résultante d’une politique irresponsable dont vous êtes les auteurs. Pour preuve ? Au lieu de vous remettre en cause et de prendre des mesures qui vous permettent de dire « Voilà, nous avons donné l’exemple ! À vous à présent de serrer la ceinture », vous passez votre temps à ergoter, à chercher des boucs émissaires qui n’existent pas et enfin de compte, à énerver davantage les Nigériens. Comment peut-on être aussi nul en politique ? Monsieur Bazoum ne voit pas ainsi la grosse poutre qui se trouve plantée dans leurs yeux, mais plutôt la misérable petite brindille qu’il y a dans l’oeil de l’autre. Et encore ! Ça, c’est de la mauvaise foi et personne ne lui en tient rigueur. Par contre, oser comparer les performances de la 5e République à celles de la 7e République dont ils sont les chantres, c’est vraiment manquer de respect total aux Nigériens et je vais vous dire pourquoi.

Commençons par la fin : Mohamed Bazoum en convient, les finances publiques sont au rouge, les comptes de l’Etat sont asséchés, bref, l’Etat est actuellement en banqueroute car ils n’arrivent pas à assurer les charges minimales de souveraineté. Une petite parenthèse avant de continuer : cela ne vous a pas empêché à mettre tant de millions pour organiser une manifestation qui ne rime à rien, connaissant l’étendue des scandales dans lesquels baigne votre gouvernance. L’Etat est donc en faillite. Et pourtant, lorsqu’ils ont pris les rênes du pouvoir en 2011, ils avaient hérité d’un Etat qui disposait de toutes les chances, et c’est reconnu au plan mondial, pour amorcer un développement. Des chances réelles qui ont conduit Christine Lagarde chez nous, rien que pour vous mettre garde contre la folie des grandeurs, mais que vous avez rapidement hypothéquées dans un populisme de mauvais aloi, caractéristique des trompeurs de grand acabit. Ne nous perdons pas trop en conjecture mais prêtons la voix à Abdou Gado Maliki, économiste, qui nous dit ceci : « En fin 1999-début 2000, quand le Président Tandja et le PM Hama Amadou s’installaient à la tête de l’Exécutif nigérien, les caisses de l’Etat ne comptaient qu’environ 600 millions de FCFA, l’endettement représentait 90% du PIB, selon le rapport du Fond Monétaire International (FMI). Et les salaires accusaient des arriérés. En 2004, soit 4 ans après, l’endettement était, toujours selon le FMI, seulement de 17% du PIB. Soit une réduction de 73%, grâce aux efforts mis en place par le gouvernement de l’époque. En 2010, les comptes publics étaient excédentaires avec des arriérés intérieurs quasi nuls, le solde du compte Niger à la BCEAO était créditeur. Il n’y avait pas encore de pétrole, la raffinerie étant en construction ». Tel est le pays dont vous avez hérité. Monsieur Maliki n’a pas fini et il serait mal indiqué de ne pas le lire jusqu’au bout : « …en 2011, poursuit-il, quand le PNDS et Issoufou arrivaient au pouvoir, les bases d’une économie saine étaient là du fait des autres : la dette publique de l’Etat ne représentait que 19% du PIB, soit une augmentation de 2% seulement en 7 ans. Mais deux ans après, en 2013, la dette passait à 27,1% du PIB et elle sera d’environ 51% en 2016. Oui, 51% du PIB, soit une augmentation de 34% en 5 années ». Et voici la meilleure : « Le compte dépôt du Niger à la BCEAO qui était largement excédentaire avant l’arrivée au pouvoir de Guri s’est effondré à la mesure des marchés surfacturés et autres gaspillages des ressources publiques. En 2009, ce compte présentait un solde créditeur de 113 milliards de FCFA. À la fin 2011, la première année du Président Issoufou au pouvoir, il n’était qu’à 20 milliards de FCFA à la fin de l’année. Aujourd’hui, malgré les maquillages qu’ils veulent faire passer, ce compte est en débit réel. En juin 2015, ce compte n’était créditeur que de 8,4 milliards de FCFA grâce au reliquat des prêts auprès des banques régionales. La rapidité avec laquelle l’emprunt de 40 milliards de janvier a été émis, montre l’état catastrophique des comptes réels dans la banque centrale, et au trésor, ainsi que la prudence des partenaires à investir au Niger ».

Ce tableau brossé par notre compatriote Abdou Gado Maliki renseigne à suffisance sur la nature de votre gouvernance. Avec vos recours systématiques à des emprunts obligataires et à des émissions de bons de trésor, non pas pour financer des projets mais pour payer des salaires, la situation doit être encore pire aujourd’hui. C’est le comble de l’échec. Je vais vous le dire : la gestion que vous semblez brocarder, dans le silence acheté de ceux qui ont en priorité le devoir moral et politique de vous répondre, est celle-là qui vous a permis de recruter tant de médecins, tant d’enseignants, bref de fonctionnaires, les yeux fermés, comme des gens qui ne comprennent rien au rapport étroit qui existe entre les ressources internes et les capacités de recrutement. Et c’est exactement une situation désastreuse comme celle que votre gestion actuelle a occasionnée que Hama Amadou a travaillé, dans un esprit de rigueur et de responsabilité d’Etat qui vous est manifestement étranger, à corriger. C’est lui qui a labouré dur, sous le soleil ardent et c’est ce travail qui explique que vous ayez pu faire ce dont vous vous targuez aujourd’hui. Afin que vous ne puissiez plus abuser de l’ignorance de nos compatriotes, j’ai tenu à rapporter la situation exacte, telle que le Premier ministre Hama Amadou l’a trouvée, cinq jours après l’investiture du Président Tanja Mamadou :

•Les disponibilités effectives sur l’ensemble du territoire s’élevaient à 622.474.047 CFA, alors que pour le seul fonctionnement régulier de l’Etat, supposant le paiement des salaires, des bourses, des allocations scolaires, des fournitures et de la contrepartie des projets de développement, notre pays avait besoin d’un minimum de 10,54 milliards de Francs CFA par mois ;

•Le compte Trésor de la BCEAO accusait un découvert de 30 604 909 585 FCFA, pour un plafond statutaire de 21.700.000.000 FCFA, soit un dépassement de 8.904.909.585 FCFA ; •Les engagements du Trésor national vis-à-vis des banques primaires se chiffraient à 4.225.404.021 FCFA ; •Le cumul des arriérés intérieurs, évalué à 118 milliards de FCFA au 31 mars 1998 pour les exercices 1997 et antérieures, s’est gonflé depuis lors en ce qui concerne particulièrement les salaires, les bourses et allocations scolaires ;

•Quant à la dette extérieure, l’encours et les arriérés de paiement sur le service s’élevaient respectivement à 859 milliards FCFA et 68,8 milliards FCFA à la date du 30 juin 1999. Je suis certain que la situation actuelle est encore pire.

Le mensonge, dit-on, fleurit mais ne donne jamais de fruits. Les revers que vous êtes en train de vivre sur le terrain social et politique découlent des actes graves que vous avez posés dans la gestion des affaires de l’Etat. Et ce ne sont sans doute pas les fausses statistiques, les prix et récompenses achetés ou encore les articles encenseurs d’une Jeune Afrique qui vont y changer quelque chose. Entre nous, est-ce sérieux que Mahamadou Issoufou « laisse écrire que son programme 2011-2015 a été réalisé à 97% alors même qu’en septembre 2015, les chiffres officiels du ministère des Finances disent tout autre chose pour la seule année 2015, avec une exécution réelle du budget d’à peine 50% et une faible mobilisation (27% seulement) des appuis extérieurs, obligeant l’Etat à faire recours à ces fameux emprunts auprès des banques » ? La conclusion, pour Abdou Gado Maliki, coule de source : « … les 8 000 milliards prévus sur la période 2016-2021 ne sont que de la poudre aux yeux, une chose irréaliste, pour rester poli, que le Guri système veut faire avaler aux Nigériens. Ce programme cache aux Nigériens les vrais problèmes et le Guri, en faisant comme si tout roulait bien…ne prépare pas les Nigériens à assurer les indispensables réformes dont le Niger a encore hélas besoin pour faire face aux lendemains incertains qu’il a créés. Il est vrai que la pluie des billets de banque craquants neufs, observée au cours des meetings organisés par Guri, ne reflète pas la réalité des comptes publics déficitaires dans le pays, classé dernier sur l’IDH en 2015 et la propagande de certains médias internationaux ne serait qu’une petite main qui tente de cacher une forêt déjà bien visible ». Tout est dit.

En vérité, vous êtes apparemment le seul à ne pas comprendre que « le roi est nu » et que vos prétendues performances ont causé plus de tort qu’elles n’en ont réglés. Tout ce que vous avez méthodiquement construit en vue d’emprisonner vos compatriotes dans une bulle de faux s’effondre aujourd’hui comme un château de cartes. Vous avez tant persisté dans la préférence du faux ! Comment pouvezvous, s’est interrogé notre cher Maliki, présenter un soi-disant programme dans un document de 117 pages qui passe sous silence la réalité économique et financière du pays, qui ignore les signaux rouges lancés par les partenaires internationaux pour promettre, pour la période 2016-2021, de mobiliser 5 000 milliards de FCFA alors même qu’en 2015, vous avez été obligés d’emprunter 115 milliards pour boucler le payement des salaires des fonctionnaires auprès des banques privées ? ». Pendant longtemps, le Nigérien Lambda, qui ne comprend pas que vous le tuez ainsi à petit feu, a eu tendance à penser que, du moment où vous payez les salaires, tout va bien. Mais à présent, vos échecs crèvent tellement les yeux, même des aveugles, que vos coups de peinture rustique ne suffisent plus à tromper.

Vous n’avez sans doute pas compris pourquoi Hama Amadou, puisque c’est sur sa personne que vous vous focalisez, n’a pas pu recruter plus de 2000 fonctionnaires comme vous dites ; que de 2000 à 2007, il n’y a pas eu un seul médecin qui ait été recruté. Eh bien, je vais vous l’expliquer publiquement afin que ceux que vous tentez d’abuser comprennent que c’est Hama Amadou qui a construit, avec abnégation, durant des années, le toit sous lequel vous vous êtes si confortablement abrités, mais que vous n’avez même pas été capables de préserver dans l’essentiel. Vous ne pourrez sans doute pas comprendre, ayant été habitués à profiter du labeur des autres, que pour investir, recruter et construire, il a bien fallu que quelqu’un se tue à la tâche et qu’il ne fasse pas dans le populisme et les actes inconsidérés. Ce quelqu’un, c’est Hama Amadou et pas vous, Mohamed Bazoum. Car, si vous avez pu recruter 530 médecins qui étaient en situation de chômage lorsque vous étiez arrivés au pouvoir selon vos propres confessions, c’est que vous reconnaissez implicitement n’avoir aucun mérite dans leur formation, hautement plus importante. Ils se sont formés, se sont spécialisés grâce à des bourses de l’Etat qui avait comme Premier ministre un certain Hama Amadou. Et contrairement à ce que vous prétendez, Hama Amadou n’a nullement maintenu les fonctionnaires dans la précarité, mais a agi de concert avec eux, dans un esprit de consultation et de concertation, d’entente mutuelle autour des grands enjeux du moment, dans l’intérêt du Niger, chose que vous ne connaissez pas. Pour vous, seule compte la force. Voici, pour votre gouverne, ce que Hama Amadou a dit à l’adresse des partenaires sociaux, le 14 janvier 2000 : « Votre parfaite connaissance de nos réalités sociales et des principes régissant le mouvement syndical ont permis jusque-là d’éviter à notre pays les débordements et explosions que l’on a connus ailleurs. Ce qui nous autorise à penser que le Gouvernement peut compter sur vous dans l’intérêt bien compris du peuple nigérien, du seul peuple nigérien ». Vous vous gargarisez également d’avoir recruté, sur les cinq ans, 34 913 fonctionnaires. Comme toutes vos statistiques, ces chiffres recèlent probablement une part de faux. Mais ce n’est pas le plus important. Le plus important à savoir est que vous n’avez pas agi ainsi dans une logique de construction puisque vos actes ont conduit l’Etat dans un désastre financier sans égal. À quoi bon recruter quelqu’un lorsqu’on ne peut pas le payer ? Ces recrutements anarchiques dont vous vous vantez transpirent à fond la mauvaise foi et vous en avez donné la preuve dernièrement en annulant, sous prétexte de fraudes dont vous aviez parfaitement connaissance dès le départ, les concours d’entrée à la Fonction publique au titre des ministères de la Santé et des Finances alors que, dans le second cas, vos victimes étaient déjà en service depuis dix longs mois. Vous continuez à payer les salaires régulièrement, dites-vous? Arrêtez de le dire car tout le monde sait que vous y arrivez grâce à des prêts qui n’honorent pas un gouvernement. Les salaires se paient sur des ressources internes propres. Il n’y a donc aucun mérite à se vanter de les payer avec des prêts destinés à financer des projets. Et d’ailleurs, un Etat étant un tout, sachez qu’à la ville de Niamey, les travailleurs attendent, depuis sept mois aujourd’hui, d’avoir un seul salaire.

Monsieur Bazoum a aussi parlé des étudiants, rappelant que sous Hama Amadou, l’université de Niamey a été fermée trois fois à 2 heures du matin. Oui, mais Hama Amadou n’a jamais fait tuer des étudiants. Ce n’était pas Hama Amadou qui gouvernait lorsqu’en 1994, Issaka Kaïné a été froidement abattu sur les franchises universitaires, mais plutôt un certain Mahamadou Issoufou. Déjà ! Ce n’était pas non plus Hama Amadou qui gouvernait lorsqu’il y a eu les évènements tragiques de Zinder où un ou deux, voire trois élèves, ont trouvé la mort dans des répressions sanglantes. Ce n’était pas enfin Hama Amadou qui était responsable des évènements malheureux de Gaya où un jeune garçon a trouvé la mort par balle. Des bourses des étudiants que vous affirmez si fièrement avoir multipliées par, je ne sais plus, combien, je ne vous répondrai pas à partir du moment où vous ne comprenez pas que vous n’avez fait que récolter les fruits d’un travail dont vous n’êtes pas les auteurs.

Monsieur Bazoum, vos compatriotes auraient apprécié que vous parliez de ces recrutements, teintés de fraudes massives et honteuses mettant en cause des personnalités de l’Etat. Mais je ne vous accablerai pas davantage à ce propos. Cependant, je vous demanderais d’être moins prolixe lorsque vous parlez des Forces de défense et de sécurité que vous prétendez misérables avant vous et qui, ma foi, seraient bons à voir aujourd’hui, en parlant précisément de leurs tenues. Monsieur Bazoum, vous feriez mieux de vous renseigner auprès des hommes de rang pour savoir à quel coût et selon quelles modalités changentils leurs tenues dont vous semblez vous vanter. Demandez auprès des gendarmes et des gardes comment arrivent-ils à s’acheter des motos aussitôt qu’ils finissent leur formation. Vous comprendrez qu’il n’y a aucune gloriole à se faire dans cette affaire. Au contraire !

Quant aux commerces détruits qu’ils auraient l’intention de recaser sur des sites ciblés, il faut bien croire que nous sommes dans un pays d’absurdités extraordinaires. A-t-on besoin de détruire les commerces pour les relocaliser ? Pourquoi certains commerces dont les tenants sont connus pour leur proximité avec certaines autorités du moment, n’ont pas subi les mêmes traitements ? Que Mohamed Bazoum explique aux Nigériens pourquoi et comment certains commerces ont été épargnés ? Pour le reste, je préfère m’en tenir aux jugements de nos compatriotes qui savent que Hama Amadou ne boxe pas dans la même catégorie que Mohamed Bazoum et que le régime dont se vante ce denier est celui des scandales.

Modi Alzouma Moussa