La page du scandale des détournements massifs des fonds de l'armée est certainement loin d'avoir été tournée. Face à d'autres préoccupations, celles liées aux élections générales de fin de mandat, entre autres, les Nigériens ont quelque peu baissé la garde pour exiger que lumière soit faite sur l'affaire et que les responsables, au sommet de l'État, soient châtiés. Cependant, à l'extérieur du Niger où l'affaire a fait grand bruit et intéressé la presse internationale, des enquêtes sont menées en vue de déterminer l'ampleur et le niveau d'implication de certaines autorités nigériennes. Un consortium de journalistes d'investigation d'Afrique et d'Europe continue ainsi à creuser. Leur sujet d'enquête porte essentiellement sur les "End User" ou utilisateurs finaux dans des transactions d'armes dont le Niger a été au centre.

Pour le consortium, le soupçon d'un trafic international d'armes au profit de forces armées non autorisées à en acquérir par des voies régulières est fort

Sur la brèche depuis la publication du rapport d'enquête interne, le consortium est en train d'aider à faire lever un coin de voile sur ces End User. Pour le consortium, le soupçon d'un trafic international d'armes au profit de forces armées non autorisées à en acquérir par des voies régulières est fort. Pas uniquement pour la presse, mais également pour une entreprise ukrainienne du nom de " Spets Techno Export ". Cette entreprise ukrainienne, spécialisée dans la production et la commercialisation de produits et services militaires, est restée dans l'embarras, malgré sa volonté d'être édifiée par rapport la pratique des "End User" pour le compte du Niger. Selon le consortium, durant des mois, elle a tenté de rencontrer des autorités nigériennes, dont le ministre de l'intérieur de l'époque, Bazoum Mohamed, en vue de leur relever un certain nombre d'incongruités et d'échanger avec lui sur la question en sa qualité de ministre de l'Intérieur. En vain. Pour quel "paria" le Niger a-t-il acheté des armes ?

Des lettres de l'entreprise ukrainienne à Bazoum restées sans réponses

Selon toujours le consortium de journalistes, dans une lettre en date du 20 juillet 2016 et adressée à Bazoum Mohamed, Spets Techno Export a tenu à lui rappeler qu'elle a demandé une audience, à Niamey, à sa convenance, mais qu'elle est restée sans réponse. Le souci de Spets Techno Export est simple, déterminer avec précision celui qui est qualifié, selon la législation nigérienne, à agir dans les transactions liées à l'achat d'armes. À l'appui de sa requête, l'entreprise ukrainienne indique avoir relevé des irrégularités dans la transaction d'armes vers le Niger. Et comme pour donner à Bazoum la nature des irrégularités constatées dans les transactions d'armes en direction du Niger, Spets Techno Export a souligné que les End User sont délivrés aux entreprises situées en zones franches. Pourquoi les autorités nigériennes ont fait recours à des entreprises situées en zone franche alors que l'État est habilité à agir en son nom comme bon lui semble ?

Bazoum était au courant des irrégularités liées aux End User très tôt

L'entreprise ukrainienne a bien insisté sur sa volonté à rencontrer Bazoum à une date qu'il lui conviendrait de lui fixer. Il s'agit pour elle de rencontrer le ministre de l'Intérieur de l'époque en vue d'une meilleure explication et compréhension adéquate des irrégularités constatées. Elle restera sur sa fin. Pourquoi Bazoum n'a pas répondu à l'entreprise ukrainienne ? Si on a cru Bazoum très éloigné de ce scandale, les lettres du 13 mai et du 20 juillet 2016 indiquent toutefois qu'il était, au moins, au courant des irrégularités liées aux End User très tôt.

Laboukoye