Lettre au “président de la République” Monsieur le “Président” Vous êtes, certes, le chef de l’État, mais demain ne vous appartient pas

J’ai appris que vous avez réussi à gagner votre premier pari, aller vers l’organisation d’élections inclusives mais sans Hama Amadou, et transparentes avec un fichier électoral truqué, une commission électorale aux ordres et une Cour constitutionnelle dont je n’oserais pas relever le discrédit au risque de me retrouver en prison. Je n’oserais pas le dire, mais je tiens à vous informer qu’un peu partout, ils sont diabolisés et invectivés. C’est si grave ce que j’ai entendu ici et là que je me suis dit que ces juges ont attiré sur eux les foudres d’un peuple qui a compris, depuis bien longtemps, où risque de le mener cette fin de règne que je vois personnellement chargée de tumultes. La disqualification du chef de file de l’opposition, Hama Amadou, Un Nigérien né au Niger, de parents nigériens ne peut que choquer ce peuple qui a montré toute sa détermination à faire de Hama Amadou, son prochain président de la République. Cela est d’autant plus choquant, et je le comprends, qu’un certain Bazoum a réussi, lui, son test. Ah, ce Bazoum, tout de même !

Monsieur le ‘’Président’’

J’ai suivi tout le débat autour de la légalité de la candidature de Bazoum et je dois reconnaître qu’avec cet acte de naissance et ce certificat de nationalité, votre candidat n’a pas la qualité requise pour briguer la magistrature suprême. D’abord, il n’a pas cette nationalité d’origine exigée par la Constitution, car n’étant pas né de mère et/ ou de père nigérien. Il n’est pas non plus né au Niger comme celui dot il a été l’artisan de l’exil forcé, le journaliste Baba Alpha. En outre, ses actes d’état-civil sont manifestement des faux. Le nom dont il est porteur n’est pas celui de son père, mais plutôt celui de son frère aîné, un goumier de la coloniale qui a pris sa retraite en 1984, année où Bazoum a obtenu son diplôme d’études approfondies (DEA). Celle qui a été présentée, dans les mêmes actes d’étatcivil, comme étant sa mère est en réalité sa belle-soeur, l’épouse de feu Mohamed. C’est l’acte de naissance de cette bonne dame, nigérienne née de parents nigériens, qui a servi à octroyer à Bazoum, un acte de naissance en tant que Nigérien né d’une mère, virtuelle bien entendu, puis, dès le lendemain, un certificat de nationalité sur lequel il lui est conféré une nationalité usurpée. Bazoum, dont le père s’appelle en réalité Salim, n’est pas naturalisé Nigérien, il a usurpé une identité et une nationalité qui ne sont pas les siennes.

Monsieur le ‘’Président’’

Savez-vous que sur la base de la date de naissance indiquée pour la belle-soeur/mère de Bazoum, qu’il est invraisemblable que Hadiza, l’épouse du frère aîné de Bazoum, soit la mère de ce dernier ? Hadiza est née en 1944 et ce n’est guère faux. En la faisant passer pour la mère de Bazoum qui est le cadet et 7e enfant de Ndilila, sa mère véritable, on veut faire croire aux Nigériens que Hadiza n’a pratiquement que huit ans ou neuf ans, dans le meilleur des cas, lorsqu’elle a mis Bazoum au monde. L’affaire est cousue de fil blanc pour ne pas s’en rendre compte. Mais, comme il y a l’article 137 du code électoral, vos compatriotes disent ne pas désespérer de vous voir remettre les pendules à l’heure. Vous allez le faire, n’est-ce pas ? N’est-ce pas vous, et personne d’autre, qui a fait de Bazoum Salim, le candidat du Pnds Tarayya ? C’est votre poulain et vous devez comprendre qu’il est un candidat hors série. Je comprends, aujourd’hui, pourquoi ses compagnons du Pnds sont nombreux à refuser sa candidature. Je comprends mieux, pourquoi ils redoutent la candidature de Bazoum. Ce qui est certain, c’est que le statut véritable de Bazoum est connu de très nombreux ténors du Pnds, dont vous, selon toute probabilité.

Monsieur le ‘’Président’’

Savez-vous d’ailleurs ce que disent vos compatriotes à ce propos ? Pour eux, vous avez imposé la candidature en sachant qu’il ne répond pas aux exigences de la loi fondamentale et qu’en tout état de cause, ses actes d’état-civil sont faux. Bazoum est désormais candidat à une élection présidentielle il n’ a pas qualité à prendre part. Malgré tout, certains de vos compatriotes que vous allez faire en sorte qu’il soit par la suite éliminé de la course et pour eux, c’est cela, le sens et l’utilité de l’article 137 du code électoral qui autorise un parti politique ou un groupement de partis politiques à remplacer un candidat déclaré inéligible par la Cour constitutionnelle en pleine campagne électorale. Ah, notre compatriote n’a pas vraisemblablement imaginé tout du Gondwana. Cet article 137, c’est tout de même insolite. Si cet accident de parcours arrive à Bazoum, il y a forcément un 3e larron qui sortira du bois et que vous allez instruire les barons du Pnds d’envoyer le dossier certainement apprêté à l’heure actuelle.

Monsieur le ‘’Président’’

Il n’y a pas que ça que disent vos compatriotes. Le retour en force du Covid 19 dans les statistiques du ministère de la Santé publique, les récents appels à la vigilance et à la fermeté lancés à l’endroit des forces de sécurité, notamment aux barrières et aux bases sont considérés comme des alibis qui vont être utilisés en temps opportun pour expliquer qu’il est impossible, dans un tel contexte de montée en puissance de l’insécurité et du Covid 19 de tenir les élections à date. Certains avancent qu’il y aurait même un comité qui a déjà travaillé sur une proposition de décalage des dates retenues et que bientôt, les Nigériens seraient édifiés sur tout ce montage éhonté. Quoi qu’il en soit, vous n’êtes pas en train de rendre service au Niger que vous allez quitter dans une crise profonde. Outre le fait que vous avez soutenu jusqu’au bout un processus électoral partisan, source de division et de déchirements, vous allez aussi installer, pratiquement, un homme qui ne doit pas être candidat à l’élection présidentielle pour les raisons que vous connaissez et que je vous ai rapportées dans cette lettre. J’ignore ce que vous cherchez pour ce pays. Oui, je me demande vraiment ce que vous nourrissez pour ce pays pour le conduire dans une si grande impasse. Vous êtes, certes, le chef de l’État, mais demain ne vous appartient pas. Il n’y a plus lieu de vous appeler à la raison et de vous demander de corriger le tir, car il est déjà tard pour la tenue, à date, des élections. Pour les municipales et régionales, il ne reste plus que qu’une vingtaine de jours.

Mallami Boucar