Le dimanche 07 février 2021, au lancement de sa campagne pour le second tour de la présidentielle, auréolé de ses 90 et quelques partis politiques et consorts qui le soutiennent au Cendre de Conférence Mahatma Gandhi, Bazoum Mohamed a offert un autre visage, gagné visiblement par le doute et l’anxiété. La multitude inutile qui s’est agrippée autour de lui et de sa candidature ne semble pas le rassurer. Et il l’a dit. Clairement.
Pour impressionner et faire étalage de sa nouvelle fortune, le Pnds, pour intimider et bluffer ses nombreux et inutiles soutiens, les a conviés au Cendre de Conférence Mahatma Gandhi dans la luxure de ce nouvel espace dédié aux grandes rencontres internationales, don de l’Inde, nous disait-on. Le lundi 08 février 2021, le candidat, pour mettre à l’épreuve un de ses alliés de poids (par le score) sur lequel on aura compris qu’il a quelques doutes quant à sa capacité à faire appliquer en faveur du candidat de la continuité, la consigne de vote qui le faisait choisir à la surprise générale de ses militants, le camp de Bazoum Mohamed. Le lendemain donc, Bazoum, après l’opposition qui y lançait sa campagne un jour plus tôt, s’y rendait pour aller à la rencontre des populations de la région, affublé par son risible «faiseur de roi» qui, dolé, devrait l’accompagner sur un terrain qui serait son fief, et prouver à son nouvel ami de quel soutien il peut lui être dans la nouvelle aventure.
Comme hier à Niamey au lancement de la campagne de Bazoum Mohamed, à Tillabéri, Bazoum devrait envoyer au charbon son souteneur en le poussant à prendre la parole. Peut-être est-il le seul sur lequel on doute au Pnds. On peut lire ici et là la gêne dans l’exercice de la part d’un homme qui a conscience de sa perfidie, de son inconstance. On soupçonnait bien : après tout ce que l’homme a pu dire du candidat qu’il soutient aujourd’hui – fric oblige diront ses détracteurs – on comprend que l’homme ait quelques problèmes de conscience à être dans le camp qu’il défend aujourd’hui, choix qui a humilié ses militantes et militants qui tenaient à préserver la seule chose qui leur reste aujourd’hui, après des années d’errance et d’inconduite politique : une dignité. À Tillabéri, Seyni a parlé. Il ne le devait pas. Du moins sur les aspects sur lesquels, usant de manipulation il a tenté de présenter autrement les choses. Les gens ne sont pas dupes. Seyni a mal parlé. Tout le Songhay en était indigné. Les journalistes avaient raison de censurer certaines parties de son intervention maladroite en langue car celles-ci ne peuvent faire honneur à son rang, mais surtout parce que sur le sujet, le président du MNDS sait bien qu’il ne disait pas la vérité. Mais on aura compris que l’homme avait intervenu sans doute sous les effets d’une colère non maîtrisée. Faut-il croire qu’il aura mal aimé les propos du Général Salou Djibo qui avait dit, pour expliquer son choix, que cela obéit aussi à des valeurs que fonde la culture de son terroir où l’homme, astreint à tenir une parole, ne saurait, au nom d’une probité, se dédire. Une telle parole pourtant juste, a-t-elle pu heurter le patron du MNSD qui, visiblement, perd des repères ? Peut-il comprendre que c’est justement pour cela que des militants râlent depuis l’annonce de son soutien étonnement surprenant quand on sait la conduite qui a été la sienne autour de la même candidature dont il est devenu depuis des jours le louangeur attitré.
À Tillabéri, quand partaient les opposants, personne n’a parlé d’ethnie et il est dommage que ce soit lui qui pose un tel débat, chez lui. La manipulation dont il veut se servir pour «renaître» politiquement dans une région qui ne peut plus se reconnaître à travers sa personnalité et sa conduite politique faite de reniement et de renoncement, d’ingratitude et de rancoeurs. Peut-il croire que les Nigériens ne comprennent rien pour ne pas comprendre que cette turpitude de sa part ne vise qu’à protéger un pain et que le problème de l’insécurité et de l’unité nationale ne servent que d’alibis à défendre l’indéfendable ? Personne – et il ne peut pas apporter les preuves du contraire – n’a parlé d’une ethnie ou d’une autre. Faut-il croire que dire qu’un autre n’est pas Nigérien, serait une manière de parler d’ethnie ? Pourtant, s’il en est ainsi, lui-même aura parlé d’ethnie parce qu’il fait bien partie de ceux qui ont contesté la nationalité d’origine de Bazoum et on se rappelle avec quelle entrain il le faisait à l’époque, avant de revenir à de meilleurs sentiments, depuis qu’il s’est rendu compte qu’il n’a plus une position confortable sur l’échiquier qui pouvait lui permettre de prétendre a diriger le Niger. Intellectuellement, il va sans dire que cette manipulation ne peut être honnête. L’Opposition a dit et l’assume – contrairement à lui qui a choisi de se dédire – que le candidat auprès duquel aujourd’hui il bat le tam-tam après l’avoir voué aux gémonies, n’est pas un Nigérien d’origine, ce que l’intéressé devrait reconnaître d’ailleurs à Tillabéri, après la piètre intervention de son «soutien local». En effet, Bazoum, comme pour se chercher une excuse, ne disait-il pas que tout un chacun vient d’ailleurs, confirmant ses «origines lointaines», montrant la couleur de sa peau, dont il dit n’avoir aucun complexe. Mais alors pourquoi Seyni s’agitait tant à Tillabéri, qu’est-ce qui a pu le blesser tant pour être dans cet état, dans cette fureur ? On aura compris qu’il n’est pas un homme d’Etat accompli pour oser tenir les propos qui ont été les siens et que les populations ont ressenti comme un outrage à leur dignité, et il peut voir à quelle vitesse son message a fait le tour des réseaux sociaux où il ne soulève qu’indignation. Peut-être, disent certains analystes, parce que l’accueil n’avait pas été à la hauteur pour le plaisir d’un homme à qui on promettait la présidence de l’assemblée nationale, celui-ci depuis des jours rêveurs à occuper la place de la deuxième personnalité du pays s’est inquiété de perdre la promesse juteuse. Le sable que les populations mettaient dans son «Atchéké», l’avait courroucé. Et dans ses colères, l’homme pouvait dire du n’importe quoi. Tillabéri en avait été choqué, profondément. Peut-il croire que c’est en parlant d’ethnie qu’il se ferait une peau neuve auprès d’une population qui refuse de cautionner son choix ? Seyni a raté sa communication. Et le Pnds n’est pas dupe.
Seyni se trompe. La politique c’est pour les bons esprits et on voit bien, que l’homme sans que ses adversaires n’aient à le nommer, par la seule mobilisation extraordinaire dans «sa» ville, pouvait attraper une grippe pour verser dans les légèretés qui ont été les siennes à Tillabéri où les foules habituelles, avaient déserté, refusant de cautionner l’imposture. Jaloux de la réussite de la mobilisation à Tillabéri, l’homme perd les pédales dans la conscience de ne pas pouvoir offrir à son hôte, la mobilisation qu’il pouvait attendre de son ralliement. Comme cela pouvait d’ailleurs être possible quand par sa malgouvernance du parti, dans «sa» région presque toutes les pointes qui en sont ressortissants ont fini par l’abandonner. Et Seyni, tragiquement est seul.
Mais parlons s’il le veut bien de son affaire ethnique. Peut-il savoir que tous ceux qui étaient avant lui à Tillabéri ce dimanche, avaient, dans leur grande majorité, marché avec Tandja Mamadou et qu’à l’époque, lui qui pouvait être fier d’être sous la protection de Hama Amadou qui le coachait et dont il était si fier de l’amitié, ne pouvait jamais les accuser de ce dont il veut les accuser aujourd’hui. Veutil se présenter comme le meilleur trans-ethnique ? Oublie-t-il d’ailleurs que ceux qu’il voulait vilipendait à Tillabéri y partaient aussi avec Ibrahim Yacoubou, avec Mahamane Ousmane et tant d’autres avec lesquels, ils avaient de la fierté et de la fraternité à cheminer ensemble, et qu’on ne pouvait voir nulle part une affaire d’ethnie qui les diviserait ? Ils étaient des Nigériens et tous d’origine. L’Arabe Bazoum ne pouvait déranger personne. On parle dans son cas de nationalité d’origine qui pouvait se poser à n’importe quel autre, et de n’importe quelle ethnie. Son champion, a-t-il franchement apporté les preuves de sa nationalité d’origine ? Là est tout le problème. Le nouvel avocat de Bazoum, hier procureur qui l’accablait de ne pas être un Nigérien d’origine, ne peut avoir aucun argument à se justifier et à défendre son ralliement que d’aucuns qualifient d’alimentaire, d’opportuniste. C’est tout. Une affaire de président d’Assemblée Nationale était en jeu et ce n’est pas rien quand, par cette promesse depuis des jours, on peut avoir repris sa calculatrice : rêver de nouvelles réalisations. Mais où est le confort des populations dans le calvaire qu’ils vivent et auquel, Bazoum à qui le soumettait, ne pouvait sur place donner une réponse rassurante. Cette affaire d’insécurité qu’il invoque et d’unité nationale ne convainc personne dans le pays. Du reste, en 2016, lorsqu’il avait eu envie d’aller «manger» avec le système, c’était les mêmes motifs qu’il avançait, se défendant d’une expertise que son parti pouvait apporter à la Renaissance pour le sauver de ses échecs. Mais après près de cinq ans de collaboration avec le système, la situation sécuritaire, s’est-elle améliorée ? Il n’avait qu’à faire ce bilan à ses militants pour dire aux Nigériens ce que son expertise a pu apporter au plan de la sécurité du pays quand on sait que cela n’avait pas empêché de vivre les tragédies de Karamga, d’Inatès, de Chinagoder, et plus récemment dans la région de Banibangou. Au contraire, tous les Nigériens sont unanimes à reconnaître qu’elle s’est profondément dégradée.
Aussi, parlant d’unité, peut-il se souvenir que c’est quand même son candidat – Bazoum – qui, tout en rêvant d’une aventure présidentielle, pouvait sur des médias parler sans pudeur «d’officiers ethnicistes», rassurant en même temps qu’ils (lui et son système) les auraient désormais placés à des postes subalternes ? Sur quelle base ? Ethnicisme. Il l’a dit Dans Jeune Afrique. A l’assemblée, un député lui a même posé la question, mais l’homme n’y avait pas répondu. Que Tillabéri accueille un candidat qui pouvait avoir du respect pour lui et refuser la même faveur à un autre n’est donc qu’une question de bon sens. Peut-on aimer logiquement celui qui, sortant à la lumière, dit qu’il vous méprise ? C’est donc entre deux hommes qui incarnent des valeurs différentes que les Nigériens ont à choisir. Et Seyni ne peut forcer personne à faire un choix qui ne l’agrée pas. Il l’a sans doute compris. Mais à ces dépens. Tillabéri est debout pour le changement. Comme beaucoup d’autres régions du pays.
Les Nigériens aussi ont compris les mobiles de la rage de Seyni. Bazoum le philosophe l’a aussi compris. C’est la conséquence qui arrive, lorsqu’en politique, ne jugeant que sur ses seuls intérêts, on refuse de consulter les bases.
Par ses maladresses, Seyni s’est planté une balle dans le pied. C’est triste. Dans ce qu’il a pu dire, devant la foule maigre faite d’enfants curieux, de scolaires mobilisés, venus pour se rire de son aventure et de sa déchéance politique, l’homme est apparu aigri, désorienté : il a conscience d’avoir sacrifié le MNSD et ruiné sa carrière politique.
Seyni peut rester tranquille : tout le monde a compris. Les peuples ne sont plus des moutons à ne servir qu’au confort d’un autre…
Gobandy