Que Bazoum Mohamed l’admette ou pas ; qu’il tienne un discours antinomique sur le sujet ou qu’il se taise, ; qu’il le confesse ou qu’il le rumine au fond de lui, Bazoum Mohamed ne peut ignorer qu’il est d’abord un prisonnier de sa propre conscience. Pourquoi ? Eh bien, il savait et sait qu’Issoufou Mahamadou n’est pas un modèle pour revendiquer quoi que ce soit de lui. Il est d’ailleurs, sans aucun doute, le chef de l’Etat nigérien le plus "détesté" des Nigériens, celui qui a concentré sur sa personne une haine tenace de ses compatriotes du fait de sa gouvernance scabreuse. A tous points de vue.

Depuis que Issoufou Mahamadou a quitté le pouvoir et que Bazoum Mohamed a pris la place, c’est une autre logique sécuritaire qui prévaut. Une autre logique sécuritaire pleine de promesses et qui n’a rien à voir avec le détachement, voire, le mépris, d’un certain Issoufou qui ne se gêne pas de prendre l’avion alors que son pays est lourdement endeuillé par des attaques terroristes. En tout cas, s’il est encore tôt pour juger et ennoblir Bazoum face à un Issoufou diabolisé par ses compatriotes, il est toutefois indiqué de tirer une première leçon.

La question sécuritaire est en train de produire des résultats qui sont en conformité avec les attentes des Nigériens. D’abord, le retour des populations de l’Anzourou, promis, puis effectué dans les délais indiqués, est incontestablement un fait qui prouve que nous ne sommes plus dans la même logique sécuritaire. L’un, Issoufou, se contentait de twitter pour exprimer aux Nigériens sa compassion alors qu’il s’envolait parfois pour des festivités à l’étranger ; l’autre, Bazoum, évite tout de même de froisser ses compatriotes, prend la peine de les écouter et prend des mesures sécuritaires sur conseil des cadres militaires nigériens. Toute une différence que les Nigériens relèvent, autant pour brocarder l’ancien président que pour encourager le nouveau dans sa volonté de montrer que les choses ont changé.

Ensuite, la réaction spontanée et énergique des Forces de défense et de sécurité (Fds) à Diffa, suite à l’attaque terroriste du vendredi 28 mai 2021, a montré une autre face des soldats nigériens, braves et déterminés dans la défense intérieure et extérieure. Ce n’est pas un hasard. Déjà au gouvernement en qualité de ministre de l’Intérieur, Bazoum ne s’est pas gêné de déclarer que les pertes et revers concédés par les Fds sont dues à un sous-équipement militaire. C’était à Ouallam où le Niger venait de perdre 13 gendarmes et c’était bien avant que la révélation sur le scandale du ministère de la Défense soit faite. Bazoum savait sans aucun doute de quoi il parlait.

Aujourd’hui à la tête de l’Etat, Bazoum est en train de changer la donne. En plus du matériel militaire jusqu’ici confiné à Niamey et dans un certain rayon présidentiel, Bazoum a sans doute changé de paradigme à propos des cadres de l’armée dont de nombreux cadres ont été écartés par simple bon vouloir d’Issoufou. Le retour programmé à une orthodoxie dans la gestion de la question sécuritaire laisse clairement entendre que la logique suicidaire d’Issoufou a fait désormais place à un certain altruisme insoupçonné d’un Bazoum dont les premières notes sonnent bien dans les oreilles de ses compatriotes. Soyons clair et sincère. Malgré tout, Bazoum Mohamed est certainement meilleur que son prédécesseur qui n’a jamais été ébranlé, le moins du monde, par une attaque terroriste. Les deux ne sont pas comparables et Bazoum gagnerait davantage à faire le procès de son prédécesseur et de son système. Cela ferait rentrer le Niger nigérien dans ses droits et lui pourrait, enfin, imprimer à la marche de l’Etat, la marque qu’il peine à lui donner dans des actes secondaires.

Bonkano