Nul ne sait dans quelle circonstance précise la mort va l’arracher un jour de l’affection des siens et c’est en cela qu’elle reste un événement choquant pour les proches et connaissances du défunt. Ces 21 passagers du bus de la compagnie de transports STM à destination de Niamey via Téra parmi lesquels certains ont embarqué à Ouaga et d’autres au niveau du poste de police de contrôle frontalier de Pételkoli, allaient renoncer au voyage s’ils savaient que c’est le dernier qui les attendait sur l’axe routier. Parmi ceux-ci les deux agents de police comptabilisés parmi les victimes de l’attaque meurtrière perpétrée par des assaillants lourdement armés en véhicules et à motos. Lesquels assaillants n’ont pas fait de quartier. Ils ont fait descendre les passagers du bus, selon une source locale, pour procéder à une vérification de leur identité, avant de les abattre à bout portant et incendier le bus ainsi qu’un camion remorque transportant des fruits et légumes à destination de Niamey. La barbarie s’est déroulée vers de 13 heures à une dizaine de km de Pételkoli. Et comme d’habitude, malgré le temps que cela a dû prendre, les assaillants sont parvenus à s’évanouir dans la nature après leur forfait. Outre les 21 morts, l’attaque armée a aussi causé 7 blessés dont 4 cas jugés graves qui ont été évacués à Niamey pour recevoir les soins d’urgence. Le ministre de l’Intérieur et son homologue de la Santé ont fait le déplacement de l’hôpital où sont internés les blessés évacués pour s’enquérir de leurs conditions de prise en charge sanitaire et leur apporter un réconfort moral en leur octroyant des enveloppes. Cette énième attaque barbare est, pour une rare fois, mis sur le compte des bandits armés. D’habitude, le qualificatif utilisé renvoie aux groupes Jihadistes et terroristes qui opèrent dans cette zone ouest de notre pays dont le contrôle tend visiblement à échapper aux autorités, malgré sa forte militarisation ces dernières années. En témoignent les attaques récurrentes contre des patrouilles militaires, des voyageurs qui empruntent les axes routiers menant au Burkina Faso et les paisibles habitants des gros villages. Plus grave dans ce massacre gratuit, c’est ce recours sauvage aux engins explosifs improvisés (EEI) par les bandits [c’est le mot qui sied le mieux pour le désigner] pour perpétrer leur forfaiture. D’où viennent-ils exactement ? Pendant longtemps, sinon depuis que l’insécurité s’est installée pour prendre racine dans cette région de Tillabéri, les attaques qui y surviennent sont systématiquement attribuées à des groupes Jihadistes lourdement armés en provenance du Mali. Ils viennent généralement à motos et en voitures et parviennent chaque fois à se volatiliser dans la nature après avoir commis leurs crimes. C’est peut-être vrai au début, mais avec l’extension progressive de la crise à toute les contrées de la région, il faut désormais admettre que nombre d’attaques enregistrées ces derniers temps, surtout dans les zones de Téra et Torodi, sont probablement perpétrées par des gens qui ne viennent pas d’ailleurs. Tout laisse croire aujourd’hui qu’ils vivent au sein des populations locales en parfaite symbiose. Ils contrôlent les faits et gestes dans les villages pour s’en prendre aux habitants qui tentent de collaborer avec l’armée, surveillent les mouvements au niveau des positions militaires implantées dans la région et posent leurs engins de mort sur les axes bitumés et pistes rurales en toute discrétion.

Revoir la stratégie de lutte

Si les terroristes présumés ont opté pour ce mode opératoire à savoir la pose de mines qui fait beaucoup plus de dégâts quand un véhicule roule dessus, c’est parce qu’il comporte moins de risques pour eux, contrairement aux attaques des positions militaires. C’est avec ce genre d’individus, ces criminels qui n’ont aucune revendication, qui prennent simplement plaisir à ôter des vies humaines avec une cruauté indicible, que le président Bazoum a affirmé chercher à ‘’négocier’’ dans sa quête de paix durable dans le pays, à l’occasion de la conférence des cadres qu’il animée en février dernier. Comme on le sait, ces propos du président Bazoum, qui a clamé avoir même fait libérer certains chefs Jihadistes qu’il a par la suite reçus au Palais de la présidence, ont retentit comme une insulte dans l’oreille des Nigériens. La tentative de correction de cette bourde présidentielle par certains de ses ministres et conseillers a aussi lamentablement échoué. En lieu et place de l’effet escompté, elle a plutôt définitivement convaincu les plus sceptiques des Nigériens que le président Bazoum et son gouvernement naviguent à vue dans leur gestion de la crise sécuritaire. Son récent déplacement en Turquie pour passer personnellement des commandes d’armes de guerre (avions de chasse, drones, chars, etc.) vise à mieux combattre les mêmes groupes armés non étatiques avec qui il dit chercher à négocier. Allez comprendre quelque chose dans cette démarche ! Cet arsenal de guerre dont Bazoum veut doter notre pays servira à quoi face à des assoiffés de sang qui vivent à visage découvert avec les paisibles populations, qui craignent de les dénoncer par peur des représailles ? Que peuvent des avions de chasse ou des chars contre des mines discrètement posées pour provoquer des dégâts de grande ampleur ? Il faut changer de stratégie pour espérer gagner rapidement cette sale guerre. Et cela passe inévitablement par des actions de ratissage surpris de tous les villages et hameaux suspects des zones où surviennent régulièrement les attaques meurtrières dues aux mines. En procédant de la sorte, les résultats seront certainement plus probants.

Tawèye