Cela fait des années que dans la région de Tillabéri, plus rien ne va. Insidieusement, sous l’œil passif et indifférent des uns et des autres, l’insécurité s’est étendue sur tout le territoire régional, contrariant la mobilité et l’activité économique, les rêves et les espoirs torpillés de tout un peuple que la politique a méthodiquement divisé pour ne lui laisser que les réseaux sociaux comme espace de défouloir pour s’indigner et se lamenter, pour se plaindre et insulter. Depuis quelques années, des chefs traditionnels que les terroristes accusent de composer avec les autorités régulières dont ils relèvent, les accablant de leur donner des informations sur leurs mouvements, avaient été sauvagement tués, si bien que, beaucoup de chefs, à l’époque, avaient été contraints de quitter leurs villages, et pour les plus audacieux d’y rester quand même mais sans jamais passer la nuit dans leur famille.
La semaine dernière, à Banibangou, à Méhanna, dans le village de Wabon, à Boura, dans le secteur du site d’orpaillage de Komabangou, les « bandits » sont revenus tuer, semer la terreur, voler et piller et s’en aller, penauds, laissant derrière eux des populations qui pleurent, indignées et sans défense et qui se demandent chaque jour, chaque soir, à quel autre drame vont-elles être confrontées. On ne voit ni les drones, ni les avions de chasse, ni les blindés… Rien.
Ça ne va pas. Et on l’a trop dit. On fait semblant dans le pays que tout va bien alors que rien ne va. Doit-on continuer à se lamenter, à pleurnicher surtout quand on ne peut voir personne d’autre venir pour soulager, pour protéger, pour consoler ? L’heure est venue de poser avec courage le problème. Il y a eu trop de larmes, trop de deuil, trop de tombes souvent mal fermées. Et ça suffit comme ça !
Doit-on continuer à regarder, peureusement, tous les chefs mourir, toutes les populations s’éteindre silencieusement ? Sans rien dire ? Sans se lever ?
Parce que les peuples ont droit à la vie, ils doivent sortir de ces passivités dangereuses, et prendre leur destin en main. Pour devenir plus responsables. Et ceux qui gouvernent doivent comprendre que l’un de leur contrat avec le peuple c’est de leur assurer la sécurité. Après plus de dix ans s’ils ne peuvent pas, ils doivent changer de discours. Peut-être, rendre courageusement le tablier. Le peuple est mort. Pardon, le peuple se meurt…
Et Barkhane s’installe, inutilement.
Hamani Garba