Pierre Foumakoye Gado, pour ceux qui ne le savent pas, c’est le «prince émirati» du pétrodollar nigérien qui a gardé la grande caverne de l’or noir avant de céder, dix années d’opacité après – héritage oblige – sa place au Fils, car très ami avec le Père, très complice aussi, car d’une certaine façon, «grand frère» du camarade Zaki qui confiait alors son héritier à Bazoum Mohamed devenu président pour le coacher. Mais, cette précaution ne semble pas suffire pour un autre qui aura regretté d’avoir cédé son fauteuil, et ne pas avoir plus de mainmise sur le nouveau pouvoir ainsi qu’il le rêvait pour avoir un troisième mandat déguisé dans un scénario où il se servirait d’un président fantoche, n’existant que pour la vraisemblance. Ainsi, le complice pouvait être catapulté «haut représentant» du président comme s’il ne devrait pas être si sûr de son poulain pour avoir à ses trousses le «grand frère» qui pouvait mieux – fidélité oblige –scruter la gestion de Bazoum et rendre compte à qui de droit afin, imagine-t-on, de prendre au besoin, les mesures qui s’imposent pour ne pas perdre le contrôle du pouvoir. C’est pour une telle raison que le premier responsable de la communication présidentielle, proche de Bazoum Mohamed, avait été boudé par certains milieux du PNDS qui ont fini par avoir sa tête et depuis, choisissant l’ombre, l’homme repartit, s’éloignant du pouvoir de la Renaissance, et peut-être d’un certain Pnds-Tarayya qu’il a fini par découvrir et par détester.

Si, à la suite des élections controversées de 2016, pour tenir dans l’illégalité d’un pouvoir que des adversaires disent confisqué, Issoufou Mahamadou conscient sans doute du défaut de légitimité dont souffre son pouvoir, pouvait aller chercher deux frères-ennemis – Seyni Oumarou et Albadé Abouba – qu’il opposait pour son propre agenda pour contenter le premier du statut de puissant ministre d’Etat et le second de «Haut Représentant» d’un président pourtant si omniprésent qu’une telle invention pouvait paraître autant superfétatoire qu’abracadabrantesque. Mais alors qu’au départ le poste est taillé sur mesure pour faire plaisir à un adversaire qui a fini par se renier, désormais soumis pour trouver à manger, l’on ne peut comprendre alors que le Pnds se donnait – ou se fabrique – une majorité confortable à l’Assemblée nationale, mais sans gagner pour autant la présidentielle à la régulière, l’on ne peut qu’être surpris de voir le même poste non constitutionnel revenir, peut-être pour caser un «vieil homme» que Bazoum qui aspire à rajeunir son équipe ne voudrait plus avoir à garder avec lui surtout avec les soupçons qui pèsent sur la gestion du pétrole nigérien. Depuis un an, il est là à talonner le nouveau président auquel un clan du parti semble ne pas faire trop confiance surtout quand on le juge si frileux, imprévisible et inconstant mais aussi désormais si compréhensible à l’égard d’une certaine opposition qu’il tenterait d’adouber, ne pouvant plus avoir à son égard, le même comportement belliqueux qu’il avait pour elle en d’autres temps.

L’homme, après le Pétrole, trône là, sur l’empire vide qu’on lui a taillé pour vivre l’illusion d’une nouvelle grandeur qui le rend si ivre de pouvoir. Peut-il savoir que Bazoum, comme Issoufou avec Seyni Oumarou, n’a pas besoin de représentant, haut ou bas, conscient de ce qu’il a à assumer un pouvoir, pour le bien-être des Nigériens, non pour le confort de quelques camarades même si, s’y déployant depuis plus d’un an, il ne put faire que du surplace, les hommes n’étant pas ceux avec lesquels il aurait bien aimé travailler. C’est donc jouant ce rôle farfelu qu’on le découvre sur des images largement partagées sur les réseaux sociaux, montrant un «homme-roi» quadrillé par une garde zélée qui aurait pu faire croire que le pouvoir a changé de centre pour se retrouver autour de l’homme de confiance d’Issoufou Mahamadou.

L’homme n’a pourtant rien pour prétendre à cette hauteur, manquant autant de charisme que d’élégance pour charmer politiquement. Mais l’argent du pétrole a du changer le destin de l’homme, les complicités avec Issoufou Mahamadou lui ayant permis de se hisser à la tête d’un patrimoine immense au point d’être un pôle incontournable du directoire du parti dans lequel, pour certains militants, il reste un dieu – pardon un tuteur plus sûr – pour avoir la chance d’une promotion, du moins pour ceux qui restent dans le sillage de l’ancien président dont lui, Gado, assure la pérennité politique dans un pays qu’il aspire à régenter pour en faire presque un patrimoine privé où devra se bâtir pour la gloire du clan au moyen d’une monarchisation programmée de la démocratie nigérienne.

Soyons humbles…

L’humilité fait partie des qualités des grands hommes mais c’est bien la chose qui a manqué à Issoufou Mahamadou qui s’est cru être un surhomme pour vouloir que les hommes se mettent à ses genoux, ivre de grandeur et de vanité. Pierre Foumakoye Gado travaille dans le même jardin de la puissance de l’impuissance pour faire croire qu’il est devenu dans le nouvel équilibre socialiste, un autre pôle incontournable qui pourrait avoir l’avantage de parler plus avec Issoufou qu’avec Bazoum Mohamed que certains de son entourage peuvent considérer comme une marionnette impotente. Pourquoi donc, Pierre Foumakoye Gado, pour cet habillage politique dérisoire, peut-il avoir ce zèle, ces extravagances qui le détournent même du socialisme et de son simple et futile rôle de haut représentant ? Peut-on d’ailleurs avoir deux capitaines dans un même bateau à manquer tant d’humilité pour gérer humblement un «truc» de fabrication locale car n’existant pas par la Constitution, mais voulu par les fantaisies d’hommes qui ont cru qu’ils peuvent faire tout d’un pays qu’il croient avoir conquis pour humilier son peuple et ses lois. Pourtant, selon le protocole, à en croire certaines sources, il ne serait que la 5e personnalité du pays ? Mais alors pourquoi devrait-il mériter tant de gardes du corps ? L’Etat s’est-il personnalisé pour n’exister qu’autour de certains individus quand le peuple, lui, manque de protection, tous les jours harcelés, et sommés d’abandonner ses terres pour les laisser à une horde de criminels qui tuent et travaillent, on ne sait pour qui ?

Ces extravagances sont incompatibles avec les valeurs de la République et avec certains signes que l’on peut voir sur ces images, il y a de quoi s’inquiéter. Existe-t-il, cet autre pôle informel du pouvoir concurremment avec celui de Bazoum, pour lui dénier une part de son pouvoir ? Notre démocratie n’a que faire de ces institutions informelles, sans intérêt politique pour le pays. Ces tenues que l’on voit, est-ce des tenues officielles, où un choix personnalisé qui ferait alors de «ses» hommes presque une milice aux ordres et au service du nouveau roi ? Il faut vite arrêter ces dérives car c’est ainsi que très souvent, les Etats basculent dans le désordre. Il faut se détacher de ces manières trop nigériennes où, pour rein, des hommes, même élus, peuvent s’encombrer de sirènes, de m’as-tu vu alors qu’on aurait pu aller partout, presque inaperçu, humblement.

En vérité, Pierre Foumakoye Gado n’est plus rien même si par les fonctions qu’il a occupées sous Mahamadou Issoufou, il pourrait avoir amassé tant d’argent pour se donner ces arrogances démesurées. Pour ainsi dire, au Niger, il y a à respecter les textes pour que n’existe dans l’architecture institutionnelle que ce que la loi a prévu, non ce que les fantaisies des hommes peuvent décider. Faut-il d’ailleurs croire que parce que le Pnds- Tarayya est au pouvoir, il y a désormais des hommes qui ne peuvent plus chômer et qu’il faille leur trouver à chaque fois un «refuge» quelconque, une place pour continuer à grignoter. Gado, ainsi qu’on peut le voir, est plus le représentant d’Issoufou dans la renaissance III que de Bazoum Mohamed qui ne peut qu’être gêné par cette «fabrication » qui nuit à son pouvoir, à son épanouissement politique. Comment d’ailleurs, dans le même Pnds- Tarayya au pouvoir, l’on peut avoir besoin d’un autre du PNDS pour être le «représentant» d’un président qui est aussi du PNDS ? Cette démarche qui abâtardit le pouvoir, à terme, ne peut que conduire à des frictions, à des suspicions, et donc à des conflits difficilement gérables au sein du pouvoir.

Mettre de l’ordre…

Cette situation ne peut pas et ne doit pas continuer. Il urge alors de faire fonctionner les textes de la République car l’Etat ne saurait se plier aux desideratas des hommes, à leurs folies de grandeur. Les Nigériens ont élu un seul président, et là même… On ne peut donc pas laisser des hommes rendre informel l’Etat pour le soumettre à leurs fantaisies et à leurs vanités.

Le Niger reste une République.

A.I