Le Niger, décidément, est un pays singulier et ceux qui le dirigent semblent assurément venir d’une autre planète. Ce n’est que sous cet angle, bien singulier par ailleurs, que l’on peut comprendre la décision, saugrenue en temps de guerre, de supprimer des postes de contrôle aux portes de la région la plus rouge en termes de dangers et de risques terroristes. Que cherche Bazoum Mohamed et son gouvernement en préférant faire suite à un desiderata des transporteurs qui fait fi de l’insécurité et des menaces terroristes ? Pour de très nombreux ressortissants de Tillabéry, c’est une mesure insolite, voire irréfléchie ou carrément suicidaire. Mais, pour qui est-il suiciaire de supprimer des postes de contrôle policiers dans un contexte d’insécurité ? Bien évidemment, ce n’est pas pour Bazoum Mohamed, le chef de l’Etat, qui a montré, vendredi dernier, qu’il peut se permettre d’aller dans une des zones dangereuses sans préjudicie. Outre les forces sécuritaires à terre, tout mouvement de véhciule a été formellement interdit et empêché sur l’axe Torodi, un jour de marché hebdomadaire, sans compter les hélicoptères de combat qui ont été mobilisés, prêts à intervenir pour réduire en cendres toutes présences menaçantes.
Le message présidentiel qui n’est pas sorti de la bouche de Bazoum Mohamed est pourtant clair. Il a montré que lorsqu’ils le veulent, eux qui dirigent le Niger, des moyens conséquents peuvent être mobilisés pour sécuriser ces zones devenues si dangereuses pour les populations, contraintes sous la menace terroriste, de quitter leurs terroirs naturels. Il a fait comprendre aux populations que leurs vies, toutes réunies, ne valent pas celle du chef de l’Etat. Ces hélicoptères de combat qui ont survolé la zone de Makalondi et de Torodi mais qui ne sont presque jamais là pour rattraper et anéantir des terroristes après des tueries, servent finalement à qui et à quoi ? Cette question trouve sa réponse dans le déploiement militaire présidentiel du vendredi 3 juin 2022.
La sécurité pour un Etat est d’abord une question de volonté et le Président Bazoum a montré que lorsqu’on veut, on peut. Le commandant en chef des armées nigériennes a laissé, il faut le dire, une très mauvaise impression chez les populations de Tillabéry. Après tant de massacres humains, de désastres financiers et matériels, de désastres économiques, le chef de l’Etat continue à penser qu’il peut séduire les terroristes avec des discours. Il a déjà fait libérer des chefs terroristes et cela n’a rien apporté au Niger en termes d’amélioration de la situation. Au contraire, on dirait que leur libération a accentué les tueries et le dépeuplement des villages de la région. Entre nous, quelle est la raison qui motive le chef de l’Etat à persister à tendre la main à des terroristes ?
Vous avez déjà fait libérer des chefs terroristes et ils ont continué à massacrer les populations nigériennes. Le Président Bazoum a sans doute mieux à faire que de réduire les barrières de police à Tillabéry. S’il les réduit alors que lui-même s’est fait entourer d’une armada militaire pour aller à Makalondi, les Nigéiens doivent tirer la conclusion qui s’impose : lorsqu’il s’agit d’eux, les dirigeants, aucune précaution d’usage, aucun moyen militaire, n’est de top pour assurer la sécurité et le Président Bazoum en a fait la démonstration le vendredi 3 juin. En revanche, il y a du temps à assurer celle des citoyens et les morts qui s’entassent entre-temps, ce n’est pas si dérangeant. Heureusement, eput-on dire, que ce ne sont ni des ministres, ni des députés, encore moins le chef de l’Etat, qui sont quotidiennement flingués ou contraints de vivre dans la terreur et l’angoisse du lendemain. Les autres, ç a peut attendre, n’est-ce pas, monsieur le Président ?
La vérité est amère, mais elle est préférable, de loin, à la duplicité. La suppression des postes de police dans la région de Tillabéry, est une totale aberration qu’i faut rapidement corriger. Elle favorise les terroristes, pas les commerçants, qui vont, comme les usagers de la route ou les autres, faire les frais d’une trop grande liberté de mouvement laissée aux terroristes et leurs complices, les trafiquants d’armes et tous ceux qui travaillent à leur assurer une quelconque logistique. La suppression des postes de police est totalement irréfléchie dans un contexte d’insécurité et de terrorisme. Au contraire, il faut les multiplier, les fortifier et les rendre plus contraignants. Dans tous les pays du monde, lorsqu’une situation dramatique liée à l’insécurité et au terrorisme survient, ce sont les libertés individuelles et collectives qui en pâtissent, restreintes au maximum afin de protéger les vies humaines. Chez nous, suivant une logique bizarre qui n’est loin d’être conforme aux voeux et attentes des terroristes, on supprime des postes de contrôle policiers en prétendant répondre favorablement aux desiderata de transporteurs. Quels transporteurs ?
Vraiment, c’est grave. Avec ça, le terrorisme a de beaux jours devant lui au Niger. Ils peuvent se frotter les mains, les terroristes, le gouvernement nigérien étant en train de leur faciliter la tâche en supprimant, au lieu de les multiplier, les postes de contrôle routier. Au grand désarroi des Nigériens, la liberté gagne du terrain là où elle doit en perdre au profit de la sécurité et de la défense. Pour des terroristes qui arrivent déjà à circuler aisément à moto, la suppression de postes de contrôle policier est une aubaine supplémentaire. À qui, donc, profite cette mesure saugrenue, sinon qu’aux terroristes et à leurs réseaux d’approvisionnement ? La vérité est là : si la situation sécuritaire, déjà grave, se dégrade davantage, le responsable, c’est le gouvernement. S’il travaille véritablement à combattre le terrorisme, il doit impérativement restaurer les postes de police supprimés et en créer d’autres, supplémentaires partout où cela est nécessaire sur les routes de Tillabéry.
Bonkano