L'attribution du marché de construction de la route Agadez /Tiguidit (limite régions Agadez /Zinder), longue de 171km, provoque des échanges épistolaires interminables entre le Niger et son partenaire, la Banque mondiale. En effet, pour le financement du projet d'amélioration de la connectivité dans le Nord-est du Niger, des accords de financement avaient été signés, le 1er juin 2021, entre le Niger et l'Association internationale de développement (AID).

Dans le cadre de l'exécution des travaux, la Banque mondiale a émis des réserves sur le sociétaire de l'entreprise retenue qui est en groupement avec UNASEL, une entreprise nigériane, suspectée d'avoir abusé sur ses expériences qualifiantes. Dans une correspondance, en date du 25 juillet 2022, le représentant de la Banque mondiale au Niger indique que, sur la base des informations reçues, il prie le ministre de l'Equipement " de procéder à une diligence supplémentaire pour authentifier les qualifications du groupe BABATI/UNASEL et de fournir à la banque ses conclusions … ".

A Monsieur Han Fracters d'ajouter qu' " en raison de la gravité des préoccupations soulevées dans le document, la question a été renvoyée séparément à la vice-présidence de la Banque mondiale chargée de l'intégrité (INT) et la Banque pourrait être contrainte d'envisager d'autres mesures, le cas échéant ". Des menaces à peine voilées pour amener le Niger à renoncer de signer le contrat avec le groupe BABATI/ UNASEL, apparemment, au profit d'une entreprise tunisienne. Mais, une enquête des journalistes d'investigations révèle que cette entreprise tunisienne pour laquelle des responsables de la Banque mondiale semblent militer ne serait pas aussi propre qu'elle le pense. Car, les turpitudes de cette entreprise ont participé au retard connu dans la réalisation du barrage de Kandadji. En 2020, le Niger avait signé un contrat avec l'entreprise tunisienne en question pour la réalisation des travaux de construction de la route de contournement du barrage de Kandadji pour une enveloppe de plus de neuf(9) milliards de FCFA. Les travaux ont tardé à démarrer. L'entreprise reportait chaque fois le démarrage des travaux pour insuffisance de capacités à réaliser la route de contournement.

Jusqu' à ce qu'elle jette l'éponge pour des raisons d'insécurité dans la région de Tillabéry. En Cote d'ivoire, en avril 2017, la grogne des usagers relative à la mauvaise qualité du bitume sur l'autoroute du Nord a amené les autorités à sommer les responsables de l'entreprise tunisienne adjudicataire du marché à reprendre les travaux. La reprise des travaux portait sur le revêtement, la réparation des parties endommagées et la reprise des canalisations construites pour drainer les eaux de ruissellement. Le gouvernement ivoirien a obligé l'entreprise à supporter le coût des travaux de reprise estimé à 14,37 milliards de FCFA.

Toujours dans leurs investigations, les journalistes ont découvert qu'au Cameroun, en 2020, dans le cadre de la réalisation d'une route dans le Nord-ouest, l'incapacité de l'entreprise à justifier un chiffre annuel de 20 milliards conformément aux exigences du code des marchés camerounais. Tout comme au Niger, dans ce pays de l'Afrique centrale frontalier du Nigeria également, l'entreprise tunisienne s'était appuyée sur l'insécurité pour justifier son incapacité en abandonnant le chantier.

En plus, dans un autre marché, les responsables de l'entreprise ont eu à entrainer deux grands commis de la Banque africaine de développement (BAD) et de la Banque mondiale dans une affaire de corruption. L'entreprise était en concurrence avec une entreprise nigériane du nom de GITTO dans l'acquisition du marché pour la construction de la route Bogo/ Pousse, longue de 63,16km. C'est un marché de plus de 37 milliards de FCFA. Pour pouvoir déclasser l'entreprise nigériane et être pistonnée, elle a proposé d'ajouter 10 milliards de CFA à l'offre de Gitto. Une surfacturation qui allait être partagée entre les responsables de la BAD et de la BM. La supercherie a été découverte et dévoilée par le Ministère des travaux publics du Cameroun qui a décidé de récuser l'entreprise. C'est cette même entreprise, avec des références sombres, qui semble avoir de la bénédiction à la représentation de la Banque mondiale au Niger.

Le jeu trouble, puisque c'en est un, réside dans le fait de chercher des noises à l'entreprise nigériane pour permettre à la tunisienne de reprendre le marché, une entreprise tunisienne qui, on le voit bien, est coutumière de corruption. Certains des responsables de l'institution financière de Niamey envisageraient- ils de réussir ce qui a échoué chez Paul BIYA ?

Ali Soumana