L’affaire Boureima Moumouni dit Tchanga, l’ancien chef d’État-major général des armées nigériennes est un cas insolite qui prouve, si besoin est, que la justice, au Niger, est à géométrie variable. Ayant bénéficié d’une liberté provisoire le 26 octobre 2022, il est aussitôt retourné en prison, le ministère public s’étant opposé à cette liberté provisoire. Le général Tchanga qui reste, donc, en prison. L’opposition du ministère public est d’autant plus surprenante pour les Nigériens que des chefs terroristes ont bénéficié d’une indulgence du président de la République, Bazoum Mohamed. Moumouni Boureima constitue-t-il un danger que ne sauraient être ces chefs terroristes qui sèment la désolation au sein de très nombreuses familles nigériennes et qui ont provoqué le déplacement de milliers de Nigériens, contraints de quitter leurs terres ?

L’affaire Tchanga est un cas d’école qui met en mal la posture, pleine de contradictions du chef de l’Etat qui a du mal à convaincre à propos de la justice. Le 10 novembre passé, il invoquait une surprenante logique : « Sans confiance entre les justiciables et le service public de la justice, il n’y a pas de justice ; sans justice, il n’y a pas d’État de droit et sans État de droit, il n’y aura point de développement ». Président de la magistrature, c’est lui qui est habileté à instruire le ministre de la Justice et c’est ce dernier qui est fondé à ordonner une conduite au ministère public. Alors, qui s’est opposé à la libération du général Moumouni Boureima, maintenu en prison pour des propos alors que des terroristes et d’autres criminels de tous acabits comme ceux du ministère de la Défense, bénéficient d’une indulgence de la même justice ? Le Président Bazoum, qui est le chef suprême de la justice au Niger, doit nécessairement revoir sa copie. Dans le contexte judiciaire nigérien, la responsabilité est d’abord la sienne, pas celle des juges qui agissent en fonction des desiderata de leurs supérieurs hiérarchiques.

Doudou Amadou