La conquête et la gestion du pouvoir d’Etat sont des objectifs que vise tout parti politique. Une fois le candidat du parti élu aux plus hautes fonctions de l’Etat, il devient président de tous ses concitoyens. Tout ce que le parti peut faire c’est de l’accompagner pour réaliser le programme du candidat pour le bonheur de ses concitoyens. Pour le PNDSTarayya, c’est plutôt tout pour les militants du parti, tout pour le parti. Rien pour les autres nigériens. Quant à l’intérêt général, basta ! Les intérêts stratégiques et vitaux du pays sont réduits aux seuls intérêts du clan et des membres de la galaxie rose. Ou, à tout le moins, les intérêts du parti prévalent sur ceux du Niger, les intérêts des militants roses sur les droits des autres nigériens. Le Niger étant comme un terrain conquis, tout doit leur revenir. A eux et à eux seuls. Même ce à quoi ils n’ont pas droit. C’est ce qui explique les multiples scandales de détournements de deniers publics dans lesquels ils sont chaque jour empêtrés. Eximbank de Chine, le don de riz pakistanais, l’uraniumgate, le scandale du ministère de la défense, etc. C’est également la corruption généralisée qui plombe le pays depuis 2011, parce que les règles cardinales de gestion et d’attribution des marchés, entre autres, sont bafouées. Le Niger est en effet un pays réputé corrompu ces dernières années. Très corrompu même. Un rapport du Fonds monétaire international a conclu, en aout 2019, que « la corruption est répandue et enracinée au Niger ». De 2011 à aujourd’hui, le Niger est régulièrement classé dernier en termes d’IDH, malgré ses multiples richesses et potentialités : pétrole, uranium, or, bétail...Ce sont justement ces fléaux que Bazoum Mohamed, arrivé au pouvoir dans les conditions qu’on sait, a décidé de combattre, à la satisfaction de l’écrasante majorité des nigériens, même ceux qui ne l’ont pas soutenu. Lors de son discours, le 2 avril 2021, il disait : « Je serai implacable contre les délinquants parce que j’ai conscience du tort que porte la corruption au développement du pays. Elle constitue par ailleurs une grave source de discrédit pour un régime et comme telle, elle est un grand facteur d’insécurité ». Après avoir souligné que « Quiconque a une responsabilité dans l’administration publique répondra désormais tout seul et entièrement de ses actes. Son parti politique, sa base, sa famille, sa communauté ne lui seront d’aucun secours au cas où son comportement devrait commander une mesure coercitive à son égard ». Depuis plus rien. Même le dernier scandale du ministère de la défense, où des milliards destinés à la lutte contre le terrorisme et pour la défense de l’intégrité territoriale ont pris une destination autre, a été royalement ignoré et étouffé. Malgré que tous les protagonistes, civils et militaires, sont connus de tous. Le parti feraitil alors de la résistance en les protégeant ? Apparemment oui. L’on sait que tous ceux qui sont impliqués dans tous ses scandales financiers qui ont jalonné ces deux dernières décennies sont, dans leur grande majorité, du parti rose.

Au-delà du parti qui ferait ombrage à Bazoum, il y a également son prédécesseur, son ami et camarade, qui ne lui facilite pas la tâche. Celui-ci se comporte en président encore en exercice, avec tout le protocole d’Etat qui sied. Les récentes vacances de Mahamadou Issoufou dans son village natal, avec tambours et trompettes, des membres du gouvernement et autres officiels, des communiqués officiels invitant à son accueil, font penser aux nigériens que la réalité se trouve ailleurs. Le centre de gravité du pouvoir n’est pas au palais présidentiel. Tout sauf dans les mains de Bazoum Mohamed qui, assurément, se sentirait à l’étroit. Il est vrai que chacun a le droit de prendre des congés, même les chômeurs. Mais, à quoi les nigériens assistent dépassent l’entendement. Les nigériens ont même eu droit à des menaces du genre « Malheur à qui trahira Mahamadou Issoufou ». Un avertissement qui, en vérité, ne semble pas s’adresser à tous les nigériens, mais à quelqu’un de précis. Quelqu’un qui serait lié à Issoufou et le parti par un contrat. Serait-ce Bazoum qui serait visé ? En tout cas, ce n’est pas l’opposition et la société civile qui sont visées. Dans ce cas, les ennemis de Bazoum ne se trouveraient pas ailleurs que dans son parti. Toujours est-il qu’il y a manifestement des choses qui échappent aux nigériens et qu’ils n’arrivent pas à cerner, mais qui révèlent une guerre de clan des plus féroces. Surtout en cette veille du congrès du PNDS. La guerre des clans sera d’autant plus féroce que chaque groupe voudra contrôler l’appareil du parti pour se positionner, et surtout pour défendre les positions et les avantages acquis, en s’accaparant des appareils et institutions de l’Etat. En attendant, les défis qui assaillent le Niger ainsi que les préoccupations existentielles des nigériens vont devoir attendre. Pendant ce temps des zones du pays sont occupées par les groupes armés qui tuent, brûlent, exigent des impôts et des taxes auprès de populations suffisamment paupérisées dont ils chassent les récalcitrants de leurs terres. Pendant ce temps, le pouvoir d’achat des citoyens s’amenuise alors que les prix des biens de consommation, en premier les produits de première nécessité, grimpent en flèche. Pourtant, la Constitution de la République du Niger contraint le président de la République à se mettre au-dessus de la mêlée et d’oeuvrer dans l’intérêt de tous ses concitoyens avec tous les moyens légaux que lui offre l’Etat. Et à être…juste.

Un parti politique ou un groupuscule d’individus ne peuvent pas se substituer à l’Etat. Notre pays traverse actuellement moult difficultés. Mais ce sont justement les épreuves qui appellent de grandes décisions fortes et courageuses, voire difficiles. Les hommes sont la somme des décisions, bonnes ou mauvaises qu’ils prennent. L’homme est l’ensemble de ses actes, dira le philosophe. A Bazoum de choisir entre satisfaire les caprices et les désidératas des militants de son parti ou d’oeuvrer résolument pour l’ensemble des nigériens, comme du reste il s’y est lui-même engagé. Et comme l’y contraint la loi fondamentale. A ce stade et dans les conditions actuelles, peut-il même avoir les mains libres pour espérer briguer un second mandat ? A moins que tout cela ne soit qu’un cirque, une comédie qui viserait à amuser la galerie et divertir les nigériens.

Bisso