Curieuse démocratie que celle du Niger d’aujourd’hui où le pouvoir depuis son élection contestée et controversée de 2021, peut malgré tout se la couler douce, réussissant, on ne sait par quelle magie, à fragiliser une opposition pourtant très forte a priori mais qui doute d’elle-même, inculquant en son sein la peur de se battre et la méfiance, et même, finalement, à réussir à la diviser, poussant bien de ses acteurs, à renier leurs choix politiques, à se dédire et à regagner la mangeoire, non sans remodeler leurs discours désormais faits d’éloges à l’endroit d’un système qu’ils pourfendaient naguère. Pourtant, ce n’est pas que le Niger marche bien, ou que tous les problèmes dénoncés seraient réglés par l’homme qui venaient pour, prétendait-il, régler les problèmes d’injustices et d’impunité que le pays a connus depuis dix ans avant lui. Pourquoi donc, bien d’acteurs politiques, depuis des mois, ont choisi de se taire, incapables d’avoir un discours qui justifie et qui assume leur choix de l’opposition pour continuer de se battre pour un certain idéal, ou au moins pour que ce pays et sa démocratie aillent mieux ? Leur mutisme calculé pourrait-il avoir un dessein plus profond pour lequel, peut-être, ils pouvaient manquer l’audace de sortir à visages découverts pour la mise en oeuvre de leur agenda secret et montrer qu’en venant à l’Opposition, ils trichaient avec elle, jouant presque le rôle de flics en son sein mais au service du pouvoir ? Mais voilà, curieusement que l’opposition n’existe plus, en tout cas celle qui combat, pas celle institutionnelle qui peut avoir, par des textes arrangés, des faveurs et des privilèges que peut concéder une République objet de marchandages politiques, faite de connivences et de clientélisme de mauvais aloi. Et le pays et sa démocratie ne font que sombrer, le pouvoir rassuré de n’être plus contrarié, marchant sur son boulevard, l’autoroute qu’il s’est construite pour perpétuer, en l’absence de contre-pouvoir, les actes de mauvaise gouvernance pour lesquels, le PNDS n’a jamais été capable de faire payer ses impairs à la meute de brigands qui infestent les rouages de son système qu’il mettait en place depuis 2011. Aujourd’hui, c’est en rangs dispersés que l’opposition nigérienne évolue, ou pour être plus vrai, s’égare. Il y a certaines voix, notamment du parti de Hama Amadou qu’on n’entend plus depuis plus de deux ans : le député Nassirou Halidou, le prisonnier du système Issoufou Bakari Saidou, Léger, et tant d’autres, toutes ces voix bavardes qui se sont miraculeusement tues, ne trouvant plus rien à redire du chaos nigérien. La déception de ce qu’ils ont pu voir dans le parti et au sein de l’Opposition, peut-elle justifier cette attitude de la part de ces acteurs qui vivent désormais en marge de l’opposition, et peut-être aussi de leur parti ?
La semaine dernière, sur les réseaux sociaux, l’on avait entendu un acteur de l’Opposition, un certain Tahirou Guimba, se prononcer sur la léthargie de l’Opposition, indexant plus le parti de Hama Amadou, notamment ses leaders de Niamey qui ne feraient rien pour sortir l’opposition de sa léthargie, et même – si intéressé curieusement aujourd’hui par le sujet – pour sortir les leaders du parti qui sont encore en prison. Cette parole relève plus de la manipulation que d’un souci sincère de ranimer la flamme de la lutte. Car l’homme était où, quand le tout Niamey se mettait dans la rue, brûlant et cassant, contestant une élection qu’eux opposition, en leaders, avaient dit ne jamais accepter si jamais on la leur volait ? L’avait-on entendu sortir à chaud pour exprimer sa solidarité avec ceux qui se battaient au nom de tous, ou tout au moins pour leur exprimer toute sa préoccupation face au sort qui fut le leur ? Non, cette parole qui vient en retard, et par opportunisme sans doute, ne convainc personne, et surtout pas au Moden Fa Lumana, ce parti qui, depuis qu’Issoufou gouverne, a toujours vu ses militants et ses responsables politiques aller en prison alors que dans le même combat, du moins par les engagements politiques et les discours, ils n’étaient pas seuls. Non, le combat concerne tous les Nigériens et au moins tous les hommes et toutes les femmes qui ont fait le choix de l’opposition ; on ne peut donc pas vouloir pousser le seul Moden Fa Lumana à la radicalité pour être les seuls à payer quand d’autres, par malice, peuvent avoir une autre attitude gentille, peu en phase avec les choix politiques et de combat qui sont ceux de toute une opposition qui a accepté de travailler ensemble pour que la démocratie marche bien et pour que le pays soit mieux gouverné.
Mais face à cette démission collective, l’on ne peut entendre qu’une seule vaillante voix qui laisse vivre quelques espoirs pour comprendre et entendre que notre société, pour autant, n’a pas baissé les bras, n’est pas vaincue par le fatalisme et qu’elle entend résister. Un sursaut est possible et, la démocratie nigérienne peut être heureuse d’avoir au moins un leadership sur lequel elle peut compter pour sauver – le mot n’est pas de trop – le pays et sa démocratie malmenée par des socialistes qui réduisent tout à leur personne et à leurs ambitions. Depuis quelques temps, le seul homme politique à ne pas avoir sa langue dans la poche est Omar Hamidou dit Ladan Tchiana, disant haut tous les jours, tout le mal qu’il pense des hommes qui dirigent le pays, tout le mal de leur gestion et de leur démocratie caricaturée et rabaissée. Et le Président d’Amen-Amine, n’a raté aucune occasion pour dénoncer sur les médias et sur ses pages Facebook et Twitter la mal gouvernance, disant tous les jours que les Nigériens ne peuvent avoir rien à attendre de la gestion des socialistes même lorsqu’elle se fait sous Bazoum Mohamed.
Ce rôle, malgré la campagne de dénigrement qu’on orchestre autour de lui pour le discréditer, saper son morale et ce dans l’espoir de le décourager dans le choix qui est le sien, celui de battre pour le Niger et pour sa démocratie, pour la justice et pour l’honneur d’un Niger aujourd’hui déshonoré par des socialistes qui n’ont, dans leur gestion, donné aucune preuve du sens de l’Etat et de la responsabilité. Ce choix, il entend l’assumer vaille que vaille contre vents et marées, avec le seul Nigérien engagé qui restera avec lui pour sauver les meubles, dans un pays où le socialisme a tout vandalisé, tout saccagé. On comprend donc que l’homme se demande ce qui est arrivé à la COPA qui a aujourd’hui, bien de ses responsables, par le renoncement à leurs convictions, de l’autre camp, mangeant avec ceux qu’ils dénigraient et vilipendaient. Quand tous ceux qui, de sa génération, jeunes, jouent à se compromettre et à hypothéquer leur carrière politique, Ladan Tchiana, reste le seul homme politique sur lequel les Nigériens peuvent compter pour tenir encore sur les chemins, pour l’émergence d’une nouvelle classe politique qui aspire à assurer la continuité générationnelle quand d’autres et leurs enfants tragiquement compromis, ou par l’âge ou par leur gestion désastreuse et le mauvais souvenir qu’ils laissent aux Nigériens, finiront par changer de métier, le Niger et ne devant jamais être le royaume dont ils rêvent pour construire leur aristocratie. Cet homme qui a la chance d’une vie qui le met à l’abri du besoin, a des chances de tracer un parcours, de réussir une belle carrière politique dans un pays où l’élite trop alimentaire et opportuniste, s’est égarée, obnubilée par le rêve désastreux d’une réussite sociale pourtant sans honneur. Il ne marchande rien avec le pouvoir ayant l’intime conviction que ce socialisme « frelaté » est incapable : vols, crimes constituent le lot de ses hauts faits par lesquels, depuis plus de dix ans, les Nigériens ont fini par découvrir le vrai visage de ses hommes.
ISAK