Voilà plus de vingt mois que Bazoum Mohamed tient les rênes du pouvoir, succédant à Issoufou Mahamadou mais obligeant à des comparaisons qui fâchent. Quand on sait les conditions dans lesquelles, il arrivait au pouvoir l’on ne peut qu’être surpris de voir à quel point il a de la veine, contenant des colères qui étaient prêtes à surgir. En vérité, le style de gouvernance qu’il imprimait depuis ce 2 avril 2021, complètement à l’antipode de ce que l’on a connu avec son prédécesseur, brutal et méprisant à l’endroit de ceux qui ne partagent pas ses opinions et qu’il a cherché par mal moyen à brimer, les Nigériens se sont montrés tolérants à son égard, lui faisant la faveur d’une trêve pour lui a donné une chance de réconcilier le pays et notamment un champ politique dominé par les rancoeurs et les rancunes, et de dérouler la politique qu’il ambitionne pour la démocratie et pour le pays. Mais après plus d’un an de gouvernance faite surtout de discours et de promesses renouvelées, les Nigériens semblent commencer par s’en lasser, bouillonnant de colères et de révolte quand après les discours, ils ne voient aucun acte courageux qu’il pouvait poser pour convaincre sur la sincérité de ses choix et notamment de ce clignotant à Gauche qui indique la nouvelle orientation du socialisme nigérien.
La vie devient chaque jour chère, avec tous les jours de nouvelles mesures qu’annonce le gouvernement pour compliquer à des populations, une vie déjà trop difficile. Au même moment, les princes brillent de fantaisies, s’inventant de nouveaux espaces de prédation, volant et pillant, détournant et récompensant le mal et la médiocrité et faire prospérer le mal, l’injustice, la mal gouvernance. Aujourd’hui, sur les marchés, il n’y a rien qui n’ait pas connu une hausse de prix alors qu’au même moment les revenus des ménages nigériens sont restés statiques, ne connaissant aucune évolution si ce n’est ce qui vient impacter leur pouvoir d’achat, grevant le budget de la ménagère. Et pourtant, il semble que c’est un socialisme qui gouverne dans le pays !
Les Nigériens ne savent plus où mettre de la tête quand, les mesures annoncées par le gouvernement pour amoindrir l’impact de la hausse des prix ne se mettent pas en place. Que n’avait-on pas dit à propos du gasoil et du pain relativement à des mesures d’accompagnement ? Ayant promis de prendre des mesures pour maintenir l’ancien prix du pain et du transport, l’on est aujourd’hui au regret de constater que pour les deux cas, les prix ont fini par connaitre une hausse. A quel prix peut-on voyager aujourd’hui d’une ville à l’autre, de chez nous à une autre ville de la sous-région, et aussi, à quel prix peut-on manger du pain qui devient de plus en plus un produit de luxe pour le Nigérien moyen ?
Dans les universités, les échos qui parviennent ne sont pas rassurants. Les étudiants piaffent d’impatience de voir le gouvernement apporter des réponses à leurs préoccupations, alors que pour certaines, cela fait des années que le gouvernement – souvent depuis Issoufou – promettait des solutions qui ne viennent jamais. Les dortoirs, la restauration et le transport des étudiants restent aujourd’hui un vrai calvaire pour lequel, l’on ne voit venir aucun début de solution. Qui ne s’effraie pas, en voyant ces bus démodés et terriblement vétustes penchant d’un côté, mais partant quand même, surchargés d’étudiants pour lesquels l’on ne peut que s’inquiéter ? Qui ne peut pas voir surtout, les moments – l’aube – qu’ils bravent, venant dans le froid et dans la nuit, pour attendre afin d’avoir la chance de partir quand, ils ne peuvent avoir qu’un tel moyen pour aller à la fac ? Il y a des filles et des garçons, dans ces rues devenus dangereuses, à prendre des risques car c’est la seule façon pour eux de pouvoir aller aux cours. Ceux qui gouvernent, ne peuvent-ils plus avoir pitié de ces jeunes, et comprendre leur désarroi pour essayer d’apporter des solutions à leurs problèmes que quelques milliards volés auraient pu régler définitivement ? Comment donc, dans un tel pays, les hommes et les femmes, ne puissent-ils pas se mettre en colère ? Terrible socialisme insouciant !
Il y a quelques jours, les étudiants de l’université de Niamey qui en ont visiblement ras-le-bol, avaient bloqué le pont, ne laissant passer aucun usager. Ces humeurs de la part des responsables syndicaux de l’UENUM témoignent de ce qu’ils sont las d’attendre et surtout de voir leurs conditions de vie et de travail se dégrader de jour en jour. Mais l’on peut tout de même se réjouir – puisqu’on n’en parle plus – d’une autre évolution notamment dans la gestion des années académiques qui, peu à peu, se normalisent, les étudiants ne parlant plus de ce qu’ils appellent des « années académiques kilométriques » que l’université est en passe de régler.
Au secondaire, la situation reste la même ; malgré les bons discours, les conditions d’accueil dans les établissements restent précaires et les « enfants « commencent à sortir de leurs réserves, donnant de la voix pour dénoncer leurs conditions de travail. Les enseignants du secteur, eux-mêmes ne sont pas en reste, et crient depuis des jours leur mal-être avec un gouvernement qui ne peut honorer ses engagements pris avec les syndicats enseignants. Qu’y a-t-il dès lors d’autres à faire que de passer à la vitesse supérieure ? Un front social en ébullition…
Depuis des jours, l’on peut voir le thermomètre monter avec des voix qui s’élèvent dans le pays, annonçant presque une fin de trêve dans un pays qui pouvait ne pas avoir besoin, au regard de sa situation inconfortable, de ces nouvelles tensions qui risquent fort bien de pousser le pays dans des situations encore plus difficiles. On ne peut d’ailleurs pas comprendre que cela arrive à un moment où l’on a l’impression que le front politique s’éteint avec une classe politique qui semble, enfin, vouloir faire la paix des braves pour préserver la nation de déchirements inutiles. Le président de la République s’en est-il rendu compte au point de prendre les devants, peut-être ne faisant plus confiance à un gouvernement pourtant plus responsable devant le parlement dans le cadre du régime semi-présidentiel qui est le nôtre, pour prendre l’initiative de prendre langue lui-même avec les syndicats ? Peut-il avoir compris qu’il faut très vite éteindre la flamme pour éviter qu’elle ne se propage très vite avec ces colères diverses qui couvent, se fermentent par le manque d’initiative de son gouvernement, incapable de compromis et de dialogue ?
Il y a pourtant à prendre au sérieux une telle situation quand on voit des syndicats qui commencent à renouer avec les arrêts de travail et une radicalité qu’affichent certains syndicats de secteurs qui ont beaucoup de problèmes pour lesquels ils ne voient venir aucune solution avec aujourd’hui des contractuels qui semblent n’avoir plus aucune chance d’être recrutés et aussi de ne pas avoir de retraite, même après avoir servi l’Etat pendant de nombreuses années.
Tous les travailleurs ne sont qu’unanimes à reconnaitre que leurs conditions de vie se dégradent avec des salaires qui ne changent pas quand, de l’autre côté, la cherté ne fait que prendre des proportions inquiétantes. Ce socialisme insouciant ne peut pas rassurer lorsqu’il est incapable d’entendre ces colères et surtout quand, il ne peut pas distribuer équitablement la richesse nationale, laissant, sans punir, d’autres, voler et piller.
Avec une telle gouvernance, les Nigériens finiront par en avoir marre et on le voit, mêmes les amis, du mouvement ouvrier nigérien, commencent, quand ils ne voient plus de perspectives, par sortir des griffes. Un confrère n’a sans doute pas tort de se demander : « qui pour sauver le soldat Bazoum » !
Par Waz-Za