Une bien maigre moisson dont on n’a pas à être particulièrement fier au regard de l’étendue des détournements dont l’Etat a été victime. Rien que dans l’affaire des 495 containers de la Soraz, une affaire encore toute fumante, ce sont plus de six milliards qui ont été dissipés. Et la Halcia, qui a conduit les enquêtes, sait mieux que quiconque les personnalités au sommet de l’Etat qui sont impliquées dans cette dilapidation des biens de l’Etat. Un d’entre eux, à lui seul, a vendu pour son propre compte une centaine de biens. Quant à Issaka Assoumane, ancien directeur général de la Douane, ses comptes bancaires ont été bel et bien saisis parce que les soupçons de culpabilité qui pesaient sur lui étaient lourds. Dans l’appréciation de ces premiers résultats et de la conduite générale de la traque des délinquants à col blanc, deux leçons sont à tirer : premièrement, les Nigériens attendent d’être convaincus que les dossiers ne sont pas triés au volet. Et pour ça, il va falloir que la justice examine, sans interférence aucune et sans atermoiements, ces dossiers sulfureux dans lesquels l’Etat a été grugé ou dans lesquels il a été victime de la légèreté et de l’irresponsabilité de certains décideurs. Le jour où de grands militants du Pnds Tareyya, soupçonnés de malversations dans des affaires qui ont défrayé la chronique, seront embastillés, jugés et incarcérés, les Nigériens diront Bravo à la justice.

Deuxièmement, c’est que les propos du procureur Samna posent problème. Car, en disant que « s’il fallait mettre en prison tous ceux qui sont poursuivis pour ces faits malgré le paiement, il faudrait alors construire trois autres prisons à Niamey », Chaïbou Samna confesse implicitement qu’ils ont dû choisir qui doit aller en prison et qui doit être relaxé après paiement de la somme qu’on lui reproche d’avoir subtilisée. Selon quel (s) critère (s) ce choix a-t-il été opéré ? Car, tandis qu’un Ada Cheffou et Adamou Issaka sont envoyés méditer leur sort en prison, d’autres sont remis en liberté. Ou bien, la justice a décidé d’envoyer en prison ceux qui refusent de payer – encore que seul un procès permet d’établir la culpabilité d’un individu – ou bien, elle a choisi selon ce qu’on peut facilement qualifier de libre arbitre. Le problème est que la culpabilité des personnes incriminées n’étant pas établie par un tribunal, il est difficile de lier ce qu’on leur reproche à une sanction. En un mot, la Police judiciaire n’est pas qualifiée pour juger. Dans tout ça, le citoyen, lui, se demande si c’est parce que les délits de ceux qui sont épargnés de prison ne reposent sur aucun fait matériel. Le procureur Samna doit repréciser les choses.

02 février 2017
Source : Le Monde d'Aujourd'hui