Monsieur le “Président”

La situation est préoccupante au Niger et je crois, en toute humilité, pouvoir vous dire de rester souvent au pays et de consacrer ces petits mois qu’il vous reste à faire à la tête de l’Etat aux préoccupations sociales de vos compatriotes. Si vous avez échoué à le faire durant près de neuf ans, vous pouvez toujours essayer de colmater les brèches, en changeant de paradigmes dans la gestion des affaires publiques. De toute façon, j’ai remarqué que les dépenses publiques n’ont jamais suivi les règles de l’orthodoxie financière et qu’il ne tient qu’à vous de décider de ce que l’on doit faire de telle ou telle ressource budgétaire. En une année, si vous avez la volonté de terminer sur une note qui vous donnera assez bonne conscience lorsque vous ne serez plus là vous êtes aujourd’hui, vous pouvez faire réaliser beaucoup de puits et forages, beaucoup de salles de classe d’amphithéâtres et autres infrastructures scolaires, doter les hôpitaux de matériels et produits pharmaceutiques de première nécessité, bref, consacrer le budget de l’Etat au social plus qu’à tout autre chose.

Monsieur le “Président”

En une année, vous pouvez également restaurer le processus électoral dans son intégrité légendaire, en créant les conditions d’un dialogue inclusif et sincère et en veillant à ce que les institutions chargées de la mission d’organiser les élections s’acquittent au mieux de leurs rôles. Les partis politiques nigériens, toutes tendances confondues, ont fait connaître leur désir ardent de trouver rapidement des solutions acceptées de tous aux problèmes qui divisent la classe politique à propos du processus électoral. Ils l’ont dit et votre Premier ministre, indice encourageant, a initié des échanges avec l’opposition et les partis non-affiliés en vue de se concerter sur les grands axes d’un dialogue politique inclusif. Il ne reste plus que votre partition pour y aller et ramener le Niger, notre cher pays, sur la voie de la sagesse. Le consensus doit primer et il n’est pas conséquent de vouloir empêcher au peuple nigérien, dans sa diversité, de se retrouver autour de l’essentiel. Vos compatriotes ont soif d’élections inclusives, apaisées et transparentes et vous devez, pour convaincre davantage de votre bonne foi, mettre le pied sur l’accélérateur afin de donner le déclic attendu.

Monsieur le “Président”

En attendant, de là où vous êtes en ce moment, je vous prie de bien vouloir tirer les oreilles du porte-parole de votre gouvernement qui, manifestement, n’est jamais sorti des “prairies” de l’université et se croyant, lorsqu’il prend la parole, qu’il est encore à la conférence nationale souveraine. Lorsqu’on prend de l’âge, on grandit et on s’assagit. Les propos extrémistes, les attitudes belliqueuses, n’ont pas de place dans ce qui se profile à l’horizon. Demandez, don Allah, de se taire à jamais ou de se rallier à la bonne cause. La bonne cause ? Celle du Niger et de son peuple qui a plus que jamais besoin de sérénité, d’humilité et de sagesse. Qu’il sache raison garder et qu’il s’interdise tout propos abusif. S’il ne comprend pas que son rôle dans cette dynamique nouvelle faite. d’espoir pour le peuple nigérien, il n’a pas sa place dans le jeu. À moins que vous, le chef d’orchestre, ne soit tiraillé quant à la voie à prendre. En tout état de cause, sachez que vous n’avez pas beaucoup de temps pour vous déterminer et que le Niger tout entier vous attend sur des actes concrets, pas des discours.

Monsieur le “Président”

Moi, je plaide pour ce dialogue que vous avez l’impérieux de devoir de convoquer rapidement dans un message à la nation. Vous n’avez pas beaucoup de temps pour le faire dans la mesure où les délais constitutionnels ne sont susceptibles d’aucun tripatouillage selon la constitution de notre pays. Vous ne pouvez ni prétendre à un autre mandat supplémentaire, ni proroger, de quelque manière que ce soit, le mandat actuel. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est la loi fondamentale, en son article 47 alinéa 2. À mon humble avis, vous devez, dès votre retour du Japon ou de la Russie, je crois, où vous devez passer avant de rentrer au Niger, entériner cette volonté partagée de la classe politique en convoquant le dialogue politique inclusif en vue de revoir, de façon consensuelle et sans démagogie, le code électoral et la Ceni qui posent problème.

Vous savez, nombre de vos compatriotes soutiennent qu’ils n’accordent pas le moindre crédit à vos propos dans la mesure où, disent-ils, vous clignotez toujours à droite pour virer à droite. Les propos, les vôtres, prononcés lors de votre message à la nation le 2 août 2015 et ce qu’il est finalement advenu des élections générales de 2016, ont marqué vos compatriotes. C’est pourquoi, et je les comprends aisément, ils disent attendre de voir pour se convaincre que vous n’avez pas d’autres intentions que celles que vous clamez. Si, à votre retour du Japon et de la Russie, vous tergiversez en donnant l’impression que vous avez du temps pour vous déterminer, même ceux qui vous croient sur parole vont avoir tendance à vous lâcher. Et le monde entier découvrira pourquoi vos compatriotes sont très nombreux à vous brocarder.

Bon retour au pays et que Dieu, dans sa miséricorde infinie, vous inspire pour ce dialogue inclusif et sincère, gage de stabilité politique, de paix sociale et de perspectives de développement heureuses pour le peuple nigérien.

07 novembre 2019
Publié le 23 octobre
Source : Le Monde d'Aujourd'hui