
Le régime sortant était fier de faire de Niamey la nouvelle ville lumière qui rivalise avec Doubaï et Paris, tellement, Niamey aura changé qu’on ne peut la reconnaitre, scintillant de mille deux et de gratte-ciel à la New-yorkaise. Mais reconnaissons qu’il y a eu quelques infrastructures qui ont souvent changé la physionomie de la ville mais sans que ce ne soit véritablement ce dont ont besoin les Nigériens. L’urbanité telle que conçue par le régime Issoufou, inspiré par la brillance, ne correspond à aucune priorité nationale et pour certains, ce ne sont que des chantiers conçus pour s’en mettre les poches, pour s’enrichir au moyen de pots de vin, de dessous de table.
Le plan d’urbanisation de la ville n’est pas un plan intégré qui prend en compte l’ensemble des problèmes qui ne peuvent permettre à la ville de s’urbaniser à l’image d’autres grandes villes du continent. Dans son programme « ambitieux » le régime n’a visé que la bretelle qui va de l’aéroport à la présidence pour impressionner les hôtes qui lui arrivent de l’extérieur afin que ses visiteurs, lorsqu’ils arrivent au perron de la présidence, s’écrient devant lui : mais que vous avez changé Niamey ! Et l’homme que l’on sait, gourmand d’éloges, ne peut que s’extasier devant ses flatteurs intéressés. Et pourtant, le reste de la ville reste le même chaos de désordre et de misère. Les deux échangeurs situés plus loin de sa ville-lumière, aujourd’hui, avec les pluies, offrent un piteux état de son urbanisme échoué car, comme on peut le comprendre aujourd’hui, aucune étude sérieuse n’a été faite avant d’engager de tels travaux. Comment peut-on imaginer un échangeur qui retient de l’eau au point de devenir une mare le temps d’une pluie ? D’ailleurs, comment peut-on apprécier ces travaux quand on voit que, dans la conception, l’on ne s’est intéressé principalement qu’à une voie qu’empruntent les hôtes de marque qui arrivent dans le pays, celle qui conduit de l’aéroport à la présidence ? Pourtant à quelques mètres de la présidence, vers les bureaux de la banque mondiale, dans les alentours du château 1 notamment, l’état de la ville est dégueulasse en ces endroits en cette saison de pluie. Devant ses bureaux la Banque Mondiale pouvait initier un projet de pisciculture pour exploiter l’étang que quelques travaux menés au hasard n’ont pu éviter. Ne parlons pas des autres quartiers oubliés et pour lesquels, l’on n’a consenti aucun investissement sérieux et perrerin pour améliorer leur cadre de vie. Aujourd’hui, les rues sont nombreuses qui, lorsqu’il pleut, deviennent des presque des talwegs avec souvent des torrents impressionnants face auxquels les usagers prennent de grands risques à les traverser avec leurs motos ou leurs véhicules.
La Renaissance, actes I et II, a gouverné par l’improvisation et cela rend compte de ce que le programme qu’il vantait tant n’a rien de sérieux. On se demande même si d’ailleurs l’on en a tenu compte une fois au pouvoir pour la mise en oeuvre d’un certain nombre de chantiers. C’est le cas du projet du rail conduit par Vincent Bolloré et son Groupe qui ainsi que l’a avoué Bolloré lui-même, ont commencé et conduit les travaux sans étude préalable, ne répondant qu’à la seule demande du président qui veut avoir un chemin de fer – sans doute n’importe lequel – pour lui permettre d’aller par le train un 18 décembre à Dosso afin de bluffer les populations les dossolais et être ainsi, dans l’Histoire, le premier président nigérien à voyager par le train dans le pays. Mais Dieu, Tout-puissant a refusé d’exaucer le voeu. Le projet, sans étude, était assez complexe, et l’Ami et entrepreneur français, controversé sur le continent, ne réussit pas le pari, et le président manqua son rendez-vous, du moins par le train. Et l’homme chargé de la diriger les travaux, Albadé Abouba, se rendant compte de l’impossibilité du voyage par le train alors qu’approchait la date, finit par se résigner et dire que le manquer, ce n’est pas pour autant la fin du monde. Un peu, comme pour se consoler du fiasco.
Mais alors que les travaux devraient se poursuivre jusqu’à Dosso, plusieurs années après, le train ne put inaugurer son trafic, cloué quelque part à la Blue Zone, comme une ferraille inutile, vestige de l’industrie ferroviaire qui trouve chez nous sa poubelle alors qu’on ne s’en est jamais servi. La renaissance a donc voulu ces grands travaux pour son image, malheureusement, aucun, ne lui a réussi, à l’instar de son chemin de fer, devenu, par la suite, le « plus grand regret » du grand timonier.
Pourtant, on veut faire croire que jamais homme n’a travaillé pour le pays comme celui-là. Mais là n’est pas le problème. Il s’agit aujourd’hui d’apprécier la qualité de ce travail mené dans le cadre de Niamey Nyala, considéré sous l’urbanité au nom de laquelle, on aimait dire que Niamey n’aurait plus rien à envier aux autres capitales africaines. Ce qui est faux pour qui connait bien de capitales autour de nous.
Des infrastructures discutables
Ne parlons pas de ces hôtels de trop pour un pays aussi pauvre qui a en plus le plus faible taux de la desserte aérienne, mais aussi de certaines infrastructures construites dans le cadre de la rénovation de la ville et de ce qu’on a pompeusement appelé « Niamey Nyala ». Ces hôtels, souvent inutiles, ne peuvent servir qu’aux mondanités d’une bourgeoisie nouvelle avide de luxure et de bonne vie, et peut-être aussi pour les surprises-parties de sa progéniture faite de gâteries. L’aménagiste placé à la tête de la ville à la suite d’un coup de force du pouvoir de l’époque qui avait défait le conseil élu, pour faire impression, sans doute comme il l’a vu en France, a cru qu’il pouvait aménager quelques espaces de la ville où il peut planter quelques fleurs comme au parc floral pour dire qu’il a beaucoup travaillé pour la ville et pour sa population. Tout le monde pouvait le faire, mais ce n’est pas ce qui est essentiel pour la ville, ce n’est pas ce dont Niamey a besoin prioritairement. La ville manque de grands espaces de verdure c’est vrai, mais plus de marchés modernes à la taille de la ville grandissante, des voies de communications entre les quartiers (routes), un transport urbain de qualité et surtout une sécurité urbaine de plus en plus préoccupante.
On peut par ailleurs évoquer ces monuments faits à grands frais – à quelques 400 millions parfois selon certaines presses – au niveau des grands carrefours de la capitale, et imputés à certaines sociétés de la place forcées de participer au programme d’embellissement de la ville, quelquefois sans que leur comptabilité ne l’autorise. Ces monuments sont contestables par leur conception technique, architecturale et par leur coût exorbitant. Il se trouve qu’en plus de ces défauts, ces monuments surfacturés, par la symbolisation, sont muets, incapables de traduire quelques significations, pour porter quelques messages. Même du point de vue esthétique comme oeuvre d’art, ils ne sont d’aucune bonne facture. Cette ferraille par exemple placée au rond-point Justice, laid et sans envergure, qui ne saurait avoir la fortune de la Tour Eiffel, laisse indifférent tous les passants. Personne ne peut lui donner sens. Et Dieu sait le temps mis à installer ce « monstre ». Ailleurs, au rond-point Gadafawa, devenu pour un temps le rond-point « Danfana », heureusement que l’autre monstre laid y avait été démonté après les vives critiques des populations qui ne reconnaissaient pas en la statue érigée, le dinosaure qu’elle est censée représentée. Un gros margouillat vilain d’une époque oubliée des historiens…
Et aujourd’hui, les pluies qui se sont abattues sur la ville, ont révélé le mensonge d’une politique urbaine menée depuis des années et qui prétendait avoir tout changé dans la ville. Peut-on faire aux Nigériens, l’état des feux optiques solaires que l’on a placés dans plusieurs carrefours, et nous dire leur coût et surtout la durée de leur fonctionnement pour revenir enfin à leur rentabilité comme investissement consenti par la Ville.
Issoufou a échoué son « Niamey Nyala » qui n’était qu’un trompe-l’oeil, comme d’ailleurs plusieurs de ces grands travaux menés pour les mêmes soucis prébendiers. Il n’y a qu’à regarder l’image qu’offre la ville après une pluie avec des habitants qui ont mille et une difficultés pour rejoindre leurs domiciles. Aller chez soi en ces temps de pluie est un véritable parcours de combattant. Quel que soit le prix proposé, certains taximen ne peuvent accepter à s’y hasarder. Ils n’ont pas tort et que ne paient-ils pas pour la municipalité sans avoir le réseau routier adéquat ? Les marchés, les quartiers surtout périphériques, les rues, deviennent après les pluies impraticables et la raison est bien simple : l’aménagiste ne s’est pas attaqué aux vrais problèmes de la ville et notamment la question de l’hygiène et de l’assainissement.
Repenser la politique urbaine de la capitale
Le problème majeur qui se pose à la ville de Niamey et à beaucoup d’autres villes du pays, c’est que lesterrains, avant leur lotissement, n’ont jamais été viabilisés et les terrains, avec leurs crevasses, leurs trous, leurs ravins, sont morcelés pour être vendus, souvent comme terrains viabilisés. Malheureusement, à l’acquisition, pour faire les constructions, les gens à leur tour, n’ayant pas de moyens, n’ont pas essayé de faire un travail de terrassement pour que, à l’occasion des pluies, leurs habitations ne soient pas menacées. Certains ont construit dans des bas-fonds humides et ne peuvent pour la fondation avoir un soubassement en béton sur lequel la construction peut être montée pour tenir durablement.
Le péché originel se situe donc à ce niveau.
L’autre problème est lié à l’assainissement. Comment comprendre qu’une ville comme Niamey manque de grands caniveaux passant souvent sous la ville, alimentés par les petits caniveaux des quartiers et des eaux de pluies qu’ils peuvent recueillir pour vite les déverser en toute discrétion vers le grand. Mais cela ne peut être imputé à la seule gestion des dix dernières années. Il se trouve qu’il n’y a pas ces grands caniveaux et ceux qu’il y a sont souvent mal conçus parce quel mal fermés ou pas du tout pour être ainsi vite remplis de sable et bloquer le passage des eaux, ce qui, dans beaucoup de quartiers, cause problème pour l’évacuation des eaux des ménages et des pluies.
Urbaniser une ville a un coût. Cela revient à défaire des quartiers, à retracer des voies, à réaménager des espaces, en prenant le pari pour que, dans un premier temps, sur un certain rayon, l’on ne puisse avoir nulle part du sable. Tant qu’il y aura du sable, la ville ne peut être propre comme on le voudrait et les eaux de pluies ne peuvent que se stagner, sinon ne peuvent qu’inonder les quartiers, les habitations, les services ainsi qu’on le voit ces derniers jours dans la capitale.
Niamey Nyala est un gros mensonge. Oumarou Dogari le sait et on sait bien pourquoi, depuis quelques temps, il n’a pas de repos : cherchant des partenariats, mobilisant ses équipes, écoutant les populations, peaufinant des projets porteurs pour la ville. Les nouvelles autorités de la ville doivent donc se servir de cet échec pour réussir le réaménagement de la ville pour montrer qu’on avait tort de les chasser injustement. L’autre n’est pas élu ; il a été imposé pour un agenda échoué que tout le monde sait aujourd’hui, et il n’a peut-être pas de compte à rendre et pouvait gérer la ville comme il veut en plantant des fleurs. Elles, sont élues, et devront dans cinq ans rendre compte aux populations qui ont fait confiance. Là est toute la différence.
Par Waz-za