N’est-ce pas Bazoum Mohamed qui a parlé d’officiers ethnicistes au sein de l’armée nigérienne ?
N’est-ce pas le même Bazoum qui a affirmé que Hama Amadou a réchappé jusqu’ici parce qu’il aurait bénéficié de la complicité de quelques juges corrompus ?
Une chose est sûre : s’il y a un parti politique qui a bénéficié de la complicité des acteurs syndicaux et de la société civile, c’est bien le Pnds Tarayya et le silence actuel des centrales syndicales, dans un contexte où les travailleurs sont malmenés, violentés et incarcérés parce qu’ils revendiquent leurs droits légitimes, en est une preuve indiscutable. Combien sont-ils qui officient aujourd’hui en qualité de conseillers à la Présidence ou à la Primature ? Et il faut bien se demander avec quels moyens le pouvoir actuel est-il parvenu à mettre dans ses poches tant d’organisations syndicales, les centrales syndicales ayant carrément choisi de jouer la carte du spectateur engagé.
Mohamed Bazoum prétend qu’ils ne violent pas les droits humains, mais ils gardent toujours dans leurs prisons des gens contre lesquels ils n’ont rien pu prouver. N’est-ce pas le cas de Saïdou Bakary, IdéKalilou et Malla Ary, qui croupissent depuis plus d’un an en prison, sans jugement ? À considé- rer que l’on ne tienne pas compte de leur proximité politique avec Hama Amadou, estil admissible de maintenir ces gens en prison alors que l’enquête de la Gendarmerie nationale les a totalement blanchis et que l’Union européenne, le bailleur des fonds mis en cause, n’a que des satisfécits à leur endroit ? Qui les maintient alors en prison ? N’est-ce pas le cas de tous ceux qui ont fait la prison pour un faux coup d’État, manifestement inventé pour mettre des gens au frais ? Certains sont encore en détention, sans aucune possibilité d’y sortir alors que, malgré la grave accusation de Mahamadou Issoufou, il n’y a manifestement la moindre preuve sur laquelle pourrait s’appuyer un juge pour les condamner. D’ailleurs, le pouvoir les a, un à un, libérés en catimini, à l’exception de deux officiers, paraît-il.
Le hold-up électoral n’est-il pas une violation grave des droits humains ? Les répressions violentes des marches et meetings des citoyens, l’interdiction systématique de leurs manifestations, ne sont-elles pas des violations des droits de l’homme ? Or, il se trouve que tous ces faits sont imputables à ce ré- gime que Mohamed Bazoum et Jeune Afrique tentent désespérément de faire passer pour un régime civilisé et respectueux des droits de l’homme. Et puis, entre nous, un régime dont les premiers responsables violent sans discontinuer la loi fondamentale de leur pays peut-il être crédible lorsqu’il prétend qu’il est respectueux des droits de l’homme ?
Le journaliste Baba Alpha et son père viennent d’être condamnés à deux ans de prison ferme pour usage de faux tandis que les charges contre le faussaire, Omar Sidi, proche de la première dame Malika Issoufou Mahamadou et conseiller à la présidence de la République, ont été carré- ment abandonnées. Un régime qui respecte les droits de l’homme ne fait pas, mon cher Bazoum, dans la discrimination en matière de justice. La détention préventive, une exception et non une règle dans les pays où les droits de l’homme sont respectés, « semble être devenue le moyen juridique par lequel on tord le cou à l’Etat de droit en jetant en pâture l’un des fondements indispensables à son effectivité, en l’occurrence le principe de la présomption d’innocence » dixit le juriste Adamou Amadou Bachir dans les colonnes d’un confrère. Pas plus tard que la semaine dernière, Gamatié Mahamadou a été libéré après 14 jours de détention préventive, pour faits non constitués. Et c’est systématique dans tous les cas ciblés : la victime fait, dans le meilleur des cas, au moins quatre jours de garde vue à la Police judiciaire.
Bazoum Mohamed, qui a pourtant une mé- moire irréprochable, a sans doute oublié qu’ils ont interné à l’école nationale de police, pendant des jours, des dizaines de militants du Moden Fa LumanaAfrica et envoyé d’autres en prison, sans autre motif que d’appartenir à ce parti politique.
La police judiciaire a-t-elle le droit de convoquer un député pour l’entendre en dehors de tout flagrant délit ? La Police judiciaire l’a pourtant fait le 22 mai 2014 en convoquant trois députés membres du groupe parlementaire du Moden Fa LumanaAfrica, en violation flagrante des dispositions en vigueur.
Cette fois-ci, la coupe semble pleine et Amnesty International, qui a suivi, pendant tout ce temps, le feuilleton politique de ce régime, scabreux à tous points de vue, sait parfaitement à qui elle affaire.
Mallami Boucar
20 juillet 2017
Source : Le Monde d'Aujourd'hui